Seiu Ito et le kinbaku, bondage king
Tous les goûts sont dans ma nature affirmait déjà Jacques Dutronc au début des 70's. Mais avant ? Avant, au tout début du siècle dernier même, Seiu Ito s'est un jour pris de passion pour le dessin kinbaku ( la photo aussi) et il en a bien vécu. Un temps. Récit…
Seiu Ito n'a pas démarré sa carrière dans l'illustration ou la photo, il faisait plutôt des sculptures sur ivoire ou en métal. Et à 13 ans, il décida de changer de prénom de Hajime en Seiu. A la même époque qu'il se mit à dessiner des femmes ligotées, selon les règles du kinbaku, l'art érotiques japonais du bondage. A 25 ans, en 1907, il pris un poste d'illustrateur dans un journal local de Tokyo qui le fit remarquer et lui offrit de nombreuses opportunités de placer ses dessins.
Avant que le bondage ne devienne un forme de jeu érotique, il était employé durant la période Edo (1603–1867) pour contraindre et immobiliser les criminels et autres captifs. Mais c'est la version érotique qui fit la fortune de Ito. Et bien qu'il se soit marié plusieurs fois au fil de sa vie (humour!), il a aussi entretenu de nombreuses et longues relations avec d'autres femmes. Et elles furent bien sûr ses modèles privilégiés, autant pour ses photos perverses que ses peintures ou illustrations qui incluaient bien sûr les obligatoires suspensions … On y découvre ainsi, sur un cliché, Kise Sahara, sa seconde épouse enceinte jusqu'aux yeux, à la fois modèle de peinture et de cliché, partiellement dénudée et pendue par les pieds au plafond. ( mais ce n'est pas celle-ci - dommage !)
Mais, avec les années 30 et l'arrivée d'un gouvernement très lourd sur la censure de toute type de manifestation artistique, son étoile pâlit et il eut bien du mal à survivre artistiquement. Puis, sa maison et ses œuvres furent quasiment anéanties lors du grand raid aérien contre Tokyo à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Mais la partie sauvegardée de son œuvre en fit plus tard le père du kinbaku moderne. A tel point qu'on lui consacra plusieurs livres et même un film en 1977 : Beauty Exotic Dance: Torture! dans lequel il apparaît. Cherchez bien sur le Net, ça vaut le détour !
Depuis, on ne dira pas que cet art s'est démocratisé, il est plutôt devenu partie intégrante de la culture S.M. mondiale et la photographie japonaise s'en fait toujours l'écho, voir du côté de Nobuyoshi Araki, par exemple.
Jean-Pierre Simard le 31/03/17 (avec Dangerous Minds)