Prendre le vent avec Susumu Shingu
Susumu Shingu conçoit des sculptures animées, cinétiques, dont les mouvements sont générés par les flux et les forces constitutifs de la nature comme le vent, l’eau et la gravité. Quelques exemples, hors exposition…
Si ses études sur le mouvement sont basées tout autant sur l’observation très précise du corps humain et de ses fonctions ainsi que celle des éléments présents dans la Nature — notamment la dynamique de l’eau et de l’air — elles font également appel à la technologie moderne. Son travail de sculpteur démontre qu’il est tout à fait possible de conjuguer science et ingénierie avec art et nature, ce qui a été démontré avec brio par quelques artistes de la Renaissance, dont Leonard de Vinci pour n’en citer qu’un ! La pertinence de cette référence est d’ailleurs très présente dans la recherche artistique de Susumu Shingu.
Depuis plus de quarante ans, Shingu a créé des centaines de sculptures dans le monde, toutes mobiles, dansantes, virevoltantes, polyphoniques, ludiques, parfois libellules, papillons, cerfs-volants ou encore faisant écho aux prémices de l’aviation !
Son projet le plus important : la Caravane du Vent débuté en 2000, constitué de 21 sculptures devenant parties intrinsèques de l’environnement dont elles nous font prendre conscience, a voyagé au sein de six lieux parmi les plus caractéristiques de l’univers : du Japon vers la Nouvelle-Zélande, puis à l’extrême nord de la Finlande, dans le désert marocain, en Mongolie pour finir au Brésil un an plus tard. Ambitieuse, cette aventure cosmogonique a reçu tout l’appui de supporters inconditionnels de l’artiste dont Pierre Restany, Issey Miyake, Frans Krajcberg, Jiri Kylian, Jean-Louis Dumas de la maison Hermès ainsi que Tadao Ando et Renzo Piano avec qui les collaborations ne se comptent plus.
Susumu Shingu alterne des périodes contemplatives de réflexion et d’observation avec — à l’extrême opposé — des moments d’intense créativité. C’est dans cette période d’immersion totale au sein de la nature qu’il parvient le mieux à s’accorder avec ce qu’il considère comme les deux rythmes fondamentaux de la vie : celui, puissant et mystérieux, pénétrant et imprévisible, grandiose et inexprimable, de la Nature qui nous entoure et celui qui se meut et qui respire, qui varie selon notre développement intérieur et les stimulations du monde extérieur, qui nous anime au plus profond de notre esprit mais que nous perdons, distraits et stressés par la vie moderne et citadine. Shingu, à travers toute son œuvre, affirme cependant la nécessaire soumission à ces rythmes pour retrouver l’accord de notre moi profond avec la planète et assurer ainsi la pérennité de leur vitalité.
A l’heure des grands bouleversements, face à l’imminence de la crise environnementale, alors que notre vision du monde est radicalement transformée par l’informatique et ses interconnexions infinies, il apparaît essentiel de montrer que l’ancien postulat de la science d’un fonctionnement précis et mécanique de l’univers est désormais remplacé par la vision nouvelle d’un cosmos vivant, dont le développement et l’évolution sont en constante interaction et création. Ceci implique que nous évoluions d’une perception centrée sur nous-mêmes en tant qu’individus fondamentalement isolés des autres et de la Nature, à l’intime reconnaissance d’être des acteurs tous liés dans cette dynamique. Notre vraie nature se trouverait non pas dans une expression personnelle hypertrophiant l’ego, mais dans la prise de conscience de l’importance des processus globaux et l’accord avec un rythme perpétuellement fluide nous permettant de nous adapter au changement.
Quand notre esprit sera capable de s’accorder avec le mouvement de la nature, notre vision en sera élargie et approfondie à l’infini. Nous parviendrons ainsi à la compréhension de vérités universelles et nous connaîtrons même des émotions profondes et des plaisirs spirituels dans nos contacts avec la nature affirme Shingu.
Vous n’avez certainement pas pu assister à son exposition à Chambord, terminée depus mi-mars… alors en savoir plus, ici et là
Jean-Pierre Simard (avec Artnet) le 25/06/2020
Susumu Shingu, sculpteur de vent