Coup double chez Akuphone avec Mushapata et The Dwarfs of East Agouza

Le label Akuphone balance deux sorties : le premier bien furieux en droite ligne du Caire avec Les nains d'East Agouza, quand le second remet en lumière les aventures reggae et free de Mushapata, boxeur et précurseur underground congolais exilé à Paris. Deux baffes ! 

the Dwarfs of East Agouza.

Akuphone sort le second album, intitulé Rats Don’t Eat Synthesizers, des Dwarfs of East Agouza qu'on avait pu voir aux Instants Chavirés en 2016. Le trio issu du quartier d'Agouza au Caire est constitué d'Alan Bishop à la basse et au saxo alto, de Maurice Louca aux claviers et drum machines et du guitariste Sam Shalabi. Composé de deux titres de 14' et 24'; il fait suite à Bes et a été enregistré en septembre 2015 dans la capitale égyptienne. Les deux longs titres “Rats Don’t Eat Synthesizers” et “Ringa Mask Koshary” ne font pas de quartier en rendant l'atmosphère bien barrée de la ville; sur fond de guitares envoutantes, de beats frénétiques et de la bass omniprésente pour tisser un implacable son égyptien contemporain. Exemple ici-même en live : 

THE DWARFS OF EAST AGOUZA Rats Don’t Eat Synthesizers AKUPHONE AKULP1008
version CD - ANNIHAYA RECORDS END14, Lebanon

« Saba-Saba Fighting » ou se battre pour la paix, est le message que Mushapata, légende underground du reggae africain à Paris au destin extraordinaire, a défendu toute sa vie.

Originaire de Bukavu, ville de l’actuelle République démocratique du Congo frontalière avec le Burundi, Mushapata débarque en France à la fin des années 1970 pour conduire sa carrière de boxeur. Quelques années après, écœuré par le monde sportif professionnel, il se reconvertit comme agent de protection rapprochée sur les conseils de son manager. Il assure alors la sécurité de nombreuses célébrités, mais c’est sa rencontre avec Bob Marley, dont il était le garde du corps lors de sa mythique tournée française de 1980, qui va réveiller le musicien posté derrière le champion de boxe. Mushapata descend du ring pour continuer à se battre avec la musique et  les mots avec son groupe Saba-Saba Fighting.

Boudés par les maisons de disque de l’époque, ses premiers enregistrements auto-produits révèlent un mélange brut de reggae lo-fi, de rythmes afrobeat accompagnés d’une section de cuivres proche du free-jazz. D’apparence nonchalantes, les voix de Mushapata et Tshayi complètent ce cocktail explosif et véhiculent en langue swahili les idées panafricanistes de Lumumba et d’autres grandes figures des luttes africaines-américaines.  Ce maxi single conçu comme une mini-compilation hommage comprend 4 titres issus des deux premiers albums enregistrés entre 1980 et 1984. Et, si vous avez fréquenté les concerts reggae et /ou africains des années 80/90, sa tête vous est forcément connue…  

MUSHAPATA : Saba-Saba Fighting AKUMS1002

Si vous appréciez la musique qui décoiffe les neurones et ouvre sur un ailleurs méconnu, ces deux sorties sont forcément pour vous. Et le plus étonnant est que Mushapata offre ici avec des titres du début des 80's, le son le plus contemporain qui soit… A découvrir d'urgence. 

Jean-Pierre Simard le 6/04/18