L.A.M.F. : le Tonnerre des queutards dans un mix de 77 enfin propre
Ressortie inopinée de la version 1977 des London Mixes du fameux L.A.M.F. de Johnny Thunders & the Heartbreakers - à ne pas confondre avec le Tom Petty éponyme de la même époque. Deux albums majeurs, pas vraiment le même discours. Le premier, suite logique du rock dynamite des New York Dolls rapportées à Londres par un McLaren qui lance les Pistols et le second, premier envoi conséquent et salué de tous d'un rock américain classique, lignée Byrds, mais pas que. Définitivement Born to Lose pour les premiers…
Des Dolls, McLaren avait importé Thunders et Nolan, dont le son proto-punk l'intéressait au plus haut point pour mettre à l'eau la formule des Pistols. Le dernier import de McLaren étant l'idée de Pretty Vacant, piquée à Richard Hell et sa façon de se fringuer sur un poster de la première mouture des Heartbreakers, dont il était le bassiste avec déchirures et épingles à nourrice. Voilà pour la légende.
The Heartbreakers étaient évidemment de la tournée Anarchy Tour de 1976 (vendus sur l'affiche comme “ex-NY Dolls” ) et ont impressionné les autres groupes, juste par leur professionnalisme, donnant l'idée à Steve Jones de piquer plans et poses de guitar hero de Thunders dans un premier temps. Bizarrement, c'est Kit Lambert et Kris Stamp, les managers des Who qui signent sur Track Records les Queutards à Londres, seuls à ne pas être dérangés par leur sulfureuse réputation de partouzeurs bordéliques et défoncés qui inquiète les majors du cru. La paire colle le groupe aux Essex Studios puis à Ramport chez lesWho pour enregistrer le matos que les Heartbreakers jouent live depuis des années -et ça va vite, avec 300 prises au bas mot, dont le mix actuel est un écrémage digitalisé des meilleures. On ajoute, pour la légende que le manager des Heartbreakers, Leee Black Childers, a démarché en même temps, tous les labels anglais possibles, à la suite d'un différent sur la propriété des bandes - foutant un bordel sans nom et empêchant, jusqu'à aujourd'hui, la diffusion de ce pressage et de ce mix particulier.
C'est le mix boueux sorti par Track qui a atteint les bacs et fait sérieusement tiquer les rock critics qui, d'un côté apprécient les compostions impeccables - c'est du brutal et du définitif - y a pas à mégoter là dessus le titre de classique est vraiment mérité. Mais noyé qu'il était dans un magma bourbeux, c'était pas vraiment évident au départ. Et, c'est là que les critics ont, à juste titre crissé salement des dents -> est-ce de là que vient le son dégueu de la majorité des disques punks anglais- la question est posée - tant cet album a eu de retentissement sur la scène ? A tel point que les plus fervents supporters anglais comme Julie Burchill et Nick Kent exprimaient un certain malaise dans leurs papiers… D'autant que la cassette promo qui avait circulé possédait un super son. D'où embrouille managériale sur le produit vinyle final - qui trouve son explication ici…
Et qu'y trouve-t-on à cet album légendaire pour le situer ? Simplement ce qu'il met en jeu dans ce qu'il raconte. On y trouve aussi bien des vieux trucs réactualisés par le groupe comme des plans de rock bien datés 50's, du doo-wop, que le son des girl groups de Shadow Morton, tout comme du garage, du punk et même des touches glam. Mais il met aussi en avant le son des Dolls, avec l'attitude qui fait le reste : un vrai sens du danger rock avec la junkie manner bien glamour, la saleté du punk et une vraie brillance qui s'exprime au fil de 14 titres impeccables- et dorénavant millésimés qui définissent un son qui ouvre la route au punk britton qui malheureusement n'en retiendra que le côté dégueu et DIY dans ses premières manifestations.
Morrissey, rappelez-vous, était le plus grand fan des New York Dolls; ce qui, assurément devrait vous parler. Je vous évite le titre à titre lassant et vous laisse avec quelques extraits, en ajoutant que, pour ma part, je préfère la version des Ramones de Chinese Rocks - même si Hell y a écrit une ligne du refrain (I'm living on a Chinese Rock/ Everything is in the pawn shop) le reste étant du stylo de Dee Dee Ramone :-)
Un album indiscutable, révélant parfaitement l'air du temps pestilentiel du Londres de 1977. Genre obligatoire dans toute bonne discothèque. Du panache, de l'esbroufe, du glamour et pas encore les overdoses en cascade, à venir… Un rien à foutre définitif, toujours totalement jouissif ! Et, ultime galéjade, réalisé par des New-Yorkais.
Jean-Pierre Simard le 29/11/17
Johnny Thunders & The Heartbreakers L. A.M.F. ( The lost 77 mixes) - Jungle Records