Après Londres, not again, not again... par Nina Rendulic
savez-vous quel goût pourrait avoir du plomb dans la bouche?
car j’ai ce matin comme un goût du plomb dans la bouche. comme un goût un peu lourd et acide, qui n’a pas sa place dans la bouche un mardi matin du début de printemps. le corps est lent et incrédule. je te l’avais pourtant dit, corps, qu’il faut vivre, corps, vivre, tant qu’on peut, vivre et sourire, car les lendemains sont dans l’ombre. je te l’avais dit, corps, tu ne m’as pas cru. un pas en avant, deux pas en arrière. une danse de la mort engagée avec ces ombres, sordides et aléatoires, et nous sommes fatigués, fatigués, et les corps sont lents et incrédules. ce matin le soleil perce ses trous dans les nuages et les feuilles sont jeunes, ridées et d’un vert très, très clair. la Loire se retire et on apercevra bientôt des bancs de sable et des petits poissons qui scintilleront couleur argent sous le ciel bleu. ce matin c’est le prélude du printemps et sur l’écran brillent les mots bilan Bruxelles aéroport fermeture métro blessés soupçon panique qui forment des syntagmes série d’explosions alerte attentats sécurité renforcée numéro d’urgence qui forment des phrases auxquelles nos corps refusent de croire. not again, not again...
aimons-nous, aimons-nous dans l’ère de l’ombre, dans la peur, la peur, la peur, soyons incrédules et aimons-nous, aimons-nous fort.
Nina Rendulic
C'était écrit après Bruxelles. C'est encore là après Londres. Dans le coeur, dans le coeur.