Policier juif italien (mais fort éloigné de la religion), vivant à Rome au moment même de la résurgence actuelle du fascisme – sous des noms éventuellement différents, et avec d’autres oripeaux -, Ruben Massei, blanchi sous le harnais, d’apparence terne, entre pourtant en quelques pages dans le panthéon des grandes figures du noir contemporain, par son obstination, par son sens de l’Histoire chevillé au corps et au cerveau, et par son refus d’accepter certaines fatalités apparentes. Confronté à la disparition brutale de la femme de l’un des patriarches de la communauté juive romaine, en même temps qu’à celle de trois jeunes skinheads, il refuse de se plier aux consignes de « ne pas faire de bruit » issues aussi bien de sa hiérarchie que de ses amis fréquentant la synagogue, et orchestre de ce fait un terrifiant télescopage entre 1943 et 1997. Membre fondateur du « Groupe des 13 » de Bologne, Marcello Fois est sans doute – comme le rappelle Carlo Lucarelli dans sa jolie préface – l’auteur italien de noir le plus proche, dans son écriture sèche et subtilement poétique, des Français Jean-Patrick Manchette ou Frédéric H. Fajardie, et du grand précurseur Giorgio Scerbanenco.