Mexique : La “maison qui saigne” de Yael Martinez
Et si on parlait de l'actualité avec émotion ? "La maison qui saigne" du photographe Yael Martinez est un hommage bouleversant aux 250 000 mexicains morts et disparus dans les violences de la guerre des cartels, les crimes d'une police corrompue ou la délinquance ordinaire depuis 2006. C'est la vie (et la mort) d'une famille, la sienne.
La nuit tombait quand j'ai reçu l'appel. Luz, ma femme, me disait qu'ils avaient tué son frère Beto. Elle était incontrôlable - je ne l'avais jamais entendue parler comme ça. Sa voix tremblait, se brisait. Je n'ai pas pu dormir de la nuit. "Beto a été tué, pendu", résonnait dans ma tête, "il a été battu, brûlé, mais ils nous ont dit qu'il s'était suicidé". Ses autres frères, David et Nacho, avaient disparu depuis plus de 3 mois.
Après ces événements en 2013, j'ai commencé à documenter ma famille et celles d'autres personnes disparues ainsi que les communautés fracturées qui sont immergées dans la violence au Mexique ; j'essaie de créer un travail qui représente le lien entre l'absence et la présence, et cet état d'invisibilité de manière symbolique, en travaillant avec les concepts de douleur, de vide, d'absence et d'oubli. La construction symbolique du territoire où la violence pénètre tout et cette violence traverse l'espace physique et spirituel de ceux qui l'habitent. Le territoire comme analogie à un corps/espace qui peut être une maison, une personne, une famille, une communauté ou un pays.
NDLR -> Parallèle avec ici - le couvercle commence à se soulever devant le pathétique des positions et discours gouvernementaux : à reculer sur le symbolique, l’empathie er le retour d’une lutte des classes qu’ils auraient bien aimé oublier.
Martínez est basé à Guerrero, au Mexique. Son travail a exploré les liens entre la pauvreté, le narcotrafic, le crime organisé et la façon dont cela affecte les communautés de son Guerrero natal, dans le sud du Mexique. Il tente de représenter la relation entre l'absence et la présence et cet état d'invisibilité de manière symbolique en travaillant avec les concepts de douleur, de vide, d'absence et d'oubli.
Yael Martinez a reçu le fonds d'urgence Magnum, Magnum On religión, et a été nommé l'un des 30 photographes nouveaux et émergents à suivre 2017 par le PDN. En 2015, il a été sélectionné dans la Master Class Latinoamerica de Joop Swart. Il a été finaliste de la bourse Eugene Smith en 2015 et 2016. Il a été nominé pour le prix Foam Paul Huf, le prix Pictet et le prix Infinity de l'ICP. Plus sur son travail sur son site.
A l’heure où la France affiche dorénavant plus d’uniformes que d’agriculteurs, on se demande à quoi ça rime. Faut-il devenir anthropophage ?
Jean-Pierre Simard le 7/04/2021
La maison ensanglantée de Yael Martinez