Passé sous le radar, le psyché sans tango argentin de Reynols
C’est bien gentil de subir un gouvernement dirigé comme un conseil d’administration par des visages maquillés comme des (peaux de) fesses de bébé qui passent leur temps à allonger des platitudes d’un autre siècle pour masquer leur indigence et leur totale absence de perspectives ( artistiques,, philosophiques et culturelles - voir écologiques). Mais, à la fin de la journée, on peut/doit préférer quand le masque craque et entendre tous les non dits. Bienvenue chez Reynols, ça pulse.
Douglas Adams de Reynols a écrit : "Il existe une théorie selon laquelle si jamais quelqu'un découvre exactement à quoi sert l'Univers et pourquoi il est là, il disparaîtra instantanément et sera remplacé par quelque chose d'encore plus bizarre et inexplicable." L'auteur a écrit cette pensée des décennies avant que Reynols n'existe, et pourtant Minecxio - le monde imaginaire dont le groupe prétend s'inspirer - pourrait bien être ce quelque chose de bizarre et d'inexplicable qu'Adams a théorisé. L'univers dans lequel Reynols existe est un univers où le caquetage de 10 000 poulets devient une symphonie ; c'est un univers où l'on s'attend à donner des concerts pour des plantes, des pierres et de la glace sèche - même sans qu'une pandémie mette un terme à la musique live ; c'est un univers où la vraie liberté d'expression, même si cela signifie enregistrer et sortir un CD contenant uniquement du bruit de bande, est un principe fondamental. Et là, on pense au Lou Reed de Metal Machine Music ou aux Japonais Rallzes dénudées.
Ces Argentins farfelus n'ont pas sorti d'album studio depuis 17 ans, concentrant leur énergie, entre autres, sur l'assemblage de l'imposante collection de 6 CD/DVD Minecxio Emanations. Rassemblant un large éventail de la musique du groupe, des premiers enregistrements aux collaborations avec d'autres musiciens, genre comme c’est bizarre Acid Mother Temple ; c'est probablement un tourbillon trop profond pour que les non-initiés tentent de pénétrer dans le cosmos de Reynols. Il serait plus sage pour les néophytes de commencer par leur dernier album, le plus accessible, Gona Rubian Ranesa.
Avec ce disque, Reynols explore les orbites extérieures du psychédélisme des années 1960/1970, exploitant une veine primitive proche des modes chamaniques de la première incarnation d'Amon Düül ou de Ya Ho Wha 13. Le groupe n'est pas associé à une commune hippie ou à un collectif sectaire, mais il attribue ses méthodes ésotériques au batteur/chanteur et figure de proue quasi-spirituelle Miguel Tomasín. Son jeu de tambour, ses chants et sa façon d'exister en général sont la pierre angulaire qui fait avancer les membres du groupe, Anla Courtis et les frères Rob et Pacu Conlazo. Il est la magie derrière Reynols.
Petit exemple datant de 20 ans en arrière ci dessous
L'infusion sonore énigmatique et primordiale de Gona Rubian Ranesa dégage quelques arômes différents. Le morceau d'ouverture, "Cameso Cator Sitero", se présente avec un rythme de boogie sans fin qui s'infiltre dans les crevasses de votre crâne et s'installe dans votre mémoire pendant des jours. D'un autre côté, "Linitri Teperoli" présente un orgue improvisé glissant et se déploie avec une cadence hypnotique, presque lente. Le chant de Tomasín est à l'avant-plan et est suffisamment sinistre pour faire dresser les cheveux sur la nuque.
"Acotan Silago Foli" est une lugubre complainte, avec des guitares moroses qui tournent en spirale autour des gémissements impies de Tomasín. Comme s'il courait un marathon, le groupe semble trouver un dernier élan d'énergie sur "Corlo Saturu". Des carillons et des figures de flûte pimpantes agrémentent un rythme guitare/batterie quasi-motorique. Imaginez Neu ! s'entêtant à ne pas s'enfermer dans un groove et vous comprendrez. Le groupe augmente le tempo jusqu'à ce qu'il parvienne enfin à décoller et disparaisse dans le ciel, Tomasín lâchant une dernière syllabe pour mettre un terme à ce maelström de rock acide.
Après cela, comprenez qu’il n’est plus possible de reagarder du même œil le père cache-sex annoncer qu’il annoncera plus tard de nouvelles dispositions relatives au discours de son maître/chef d’entreprise. A la prise de tête, on préférera l’emprise-multiple de Reynols. C’est dit !
Jean-Pierre Simard le 12/03/2021
Reynols - Gona Rubian Ranesa - Outlier Communications