PTU, le duo de Kazan réinvente la techno bricolo-sauvage et signe chez Nina Kraviz
I Am Who I Am est le premier album du duo de producteurs de Kazan P.T.U., formé de Alina Izolenta et Kamil Ea. Actif depuis des années, le duo a attiré l’attention de la Berlinoise Nina Kraviz qui a d’abord mis un de leurs titres sur son mix à succès Fabric 91, avant de les signer sur son propre label Trip. Et ça décoiffe.
Le duo ne manque pas d’humour puisque que leur nom peut signifier selon la langue employée soit Police Tactical Unit ( BAC en français, de triste mémoire nantaise) ou mieux en russe, Professional Technical Schools, la filière d’éducation professionnelle réservée comme ici dans les banlieues à tous ceux qu’on ne trouve pas digne de fréquenter l’enseignement supérieur. Et, en tant que déclassés, c’est bien de cela qu’il s’agit, même si leurs connexions avec la scène artistique et intellectuelle est assez patente. Au sein de la scène kazakh, ils sont passés de groupe en groupe, passant du rock, à l’ambient et à la techno, au gré des montages/démontages de groupe, avant de se fixer à deux et de trouver leur son singulier.
PTU - A Broken Clock Is Right Twice A Day - le single qui a tout déclenché pour eux …
Ce premier envoi est assez remarquable, à l’écart des modes et des scènes européennes, très loin de l’EDM robotique et les 12 titres qui filent sur 3/4 d’h, montre en main, les voient débouler sur fond de percussions cogneuses et de montées acides pour faire bonne mesure, en évoquant une armée de robots déglingués qui en savent quand même long sur les micro-tonalités. Comme dans les Tontons Flingueurs, “passé le normal, on arrive vite au brutal et au sauvage” qui fait justement l’intérêt de l’album. A l’oreille, ça ne sonne pas du tout comme les autres, ça n’arrive jamais d’où on pourrait l’attendre - mais ça fait grave le job, à la fois en intriguant et en faisant danser les têtes. Tout le bonheur de l’album - et du son du groupe - vient de là, de cette propension à faire fonctionner de concert des trucs apparemment disjoints, mais qui, par leur boulot sonne fluide dans la contrainte. La critique anglo-saxonne parle au sujet de I Am Who I Am d’une probable BO alternative du Stalker de Tarkovsky … Mais, du maximalisme véloce de Castor & Pollux aux savantes polyrythmies de After Cities, en passant par le marteau-pilon de Sirocco, PTU fait surgir la vie de territoires jusque là inexploités …
Comme disait Actuel autrefois ; “nouveau ET intéressant !”
Jean-Pierre Simard le 27/06/19
PTU - I Am Who I Am - Trip