Le Star Band de Dakar, en version salsero
Emmené par le redoutable Ibra Kassé, le STAR BAND DE DAKAR fera danser au fil des 70’s le gotha dakarois et deviendra une école incontournable de la musique sénégalaise, révélant des prodiges comme le surdoué Youssou N'Dour ou le salsero de charme Labah Sosseh ou encore Pape Fall. Pour célébrer les 60 ans de la révolution cubaine, le label Ostinato Records sort Psicodelia Afro-Cubana de Senegal, un échantillon des six titres à la fois psychédéliques et afro-cubains de du groupe sénégalais.
Au long des années 70, la musique afro-cubaine régnait en maître sur le continent africain. La proximité de ses rythmes et son aura symbolique de révolution branchait bien la jeunesse africaine qui s’en délectait et ondulait en rythme sur des mélodies importées. Mais pas seulement. Dans les clubs de Dakar, dont le célébrissime Le Miami, le groupe du lieu, l’inévitable Star Band de Dakar composait et jouait des titres qui seraient plus tard enregistrés sur le matériel maison avec deux micros branchés sur le quatre pistes Revox, aux mains du leader du groupe, Ibrahim Kassé. Et, ce qui ne gâche rien, aussi propriétaire du club et donc des bandes …
Tout l’enjeu des titres était donc de sonner à la fois africain et contemporain ( psyché donc) et d’ajouter un groove cubain sur le dessus, comme crème sur le gateau. De suite, délivrés par la bande de tueurs de l’orchestre, cela sonnait juste et avec entrain, au point que Youssou et Labah Sosseh intégraient les constante cubaines dans leurs propres compostions, en ajoutant au recettes de la guajira, du changüi et du montuno leurs guitares électriques, leurs cuivres et leur batteries Sabar. Comme la rumba au Congo est une hybridation qui fit date, leur son devint la base du Mbalax qui, à son tour, devint le son national du Sénégal.
La compilation Psicodelia Afro-Cubana de Senegal rend ainsi hommage à cette connexion transatlantique, en un temps où Cuba était l’alliée du combat pour l’émancipation des pays africains, son socialisme tropical offrant un modèle à la jeunesse en lutte contre les gouvernements locaux affiliés aux puissances occidentales des ex-colonisateurs.
Les sonorités cubaines leur sont naturelles comme l’explique un des guitaristes du groupe, Yakhya Fall : "Nous sentions qu’il y avait du sang africain dans les veines de la salsa". Danguele Fiasso, chanté en espagnol avec ses cuivres et ses rythmes, aurait d’ailleurs été sorti par un groupe cubain que cela n’étonnerait pas.
Malgré la piètre qualité d’enregistrement, ces disques sont des archives sonores rares de la scène musicale de l’époque. Long de trente minutes, cet album rappelle ce moment où les sonorités afro-cubaines se mélangeaient avec les rythmes des sabars.
Jean-Pierre Simard le 19/03/19
Star Band de Dakar - Psicodelia Afro-Cubana de Senegal - Ostinato Records