L'underground de Villejuif fait des siennes ( et un second album !)
Il y a longtemps que le Villejuif Underground est une des attractions principales du rock français. La rumeur sur ses concerts est phénoménale : inspirés, foutraques, déjantés, marrants, tout d’un bloc. Bref, c’est l’allumette au bord du papier journal avant un beau brasier. Mais l’arrivée du second album laisse sur sa faim.
S’il faut tisser des liens avec d’autres grands groupes de rock, - car c’en est un -, c’est du côté de Fat White Family qu’il fait les chercher, ou dans l’histoire du rock (anglais), du côté des foutraques Faces, à vivre à fond l’idiome, à faire croire, live, que ça existe encore. Pour notre plus grand plaisir indeed. Mais malgré deux ans d’attente et cet album repoussé aux calendes grecques, (que voici enfin), on reste dubitatif. Et pour cause, "When Will the Flies in Deauville Drop ?" fait long feu.
On se demande s’il ne faudrait pas d’abord remettre au goût du jour le concept album et sa déclinaison sur 10/12 titres d’un idiome qui se voit bousculer sous toutes les coutures pour en extraire, à coups de gueule, de guitares, de claviers et de voix, un truc qui fait son de bout en bout, raconte son histoire en brèves de comptoir développées à l’envi. Et puis basta hein. Tous sur scène et on continue à développer le propos, à a le violenter, à le faire encore plus mordant, plus joli ou dégueu, selon le mood du moment. Parce qu’il faut que cela claque, vive et meurt d’un même mouvement cathartique et festif. Comme ici, tiens …
Mais en 11 titres proposés ici, on se perd, malgré la vision développée, les paroles qui jouent leurs petites scènes, écrites et propulsées par le brillant Nathan Roche, on se trouve un peu dépité que lesdites scènes n’aient pas plus de ciment entre elles, que l’histoire bien dite au fil des titres ne fasse pas plus battre le cœur ou exciter les sens… pour en raconter une autre plus longue en bouche, forte tout du long.
Alors oui, on a toujours ça : « Un bassiste qu’on croirait sorti d’un film de surfers tourné aux abords de Tchernobyl. Un guitariste qui vous parle plus volontiers de Lunatic ou de musique thaïlandaise que des Stooges. Un clavier invité sur un malentendu à une répétition qui a été engagé parce qu’il s’est endormi sur son synthé. Un chanteur-poète australien sans-papiers resté en France pour une fille, qui s’est improvisé une chambre dans une cabane au fond d’un jardin. » dixit la présentation officielle du groupe (qui est signée Lelo Jimmy Batista) qui a le mérite de poser le décor.
Une fois dit tout cela, on est bien emmerdé. Mais, la vision en plongée dit tout autre chose : pris séparément, il reste une petite collection de miniatures rock qui sortent du lot (d’un album à la prod pas aboutie, voire d’un idiome pas assez fouillé ?????) comme John Forbes, Wuhan Girl, Can You Vote for Me et Haunted Chateau ? Et comme d’hab, cela sera servi chaud avec clips qui pallient aux absences flagrantes révélées ailleurs et donnent la clé de l’album, en morceaux, mais la clé quand même…
Et là, on affirmera tranquille que si ça marche à l’œil, la sensation de départ était bonne et qu’on vous recommandera, en plus de voir tous les clips qui font sens ( l’imagerie rock a certaines constantes manifestes ) que si cela avorte sur disque, il reste la scène. Alors, on écoutera l’album pour se faire une idée - et surtout, on ne ratera sous aucun prétexte les futurs concerts.
Parce que, quand même, sur scène, là où ça fait son, sens, vie et déflagration, il n’y aura plus aucune raison de s’en priver… C’est dit !
Jean-Pierre Simard le 18/02/19
Le Villejuif Underground - "When Will the Flies in Deauville Drop ?" (Born Bad)