Avec LR, la Corrèze a mal à son élagage façon boucherie en gros
Depuis qu'on a évacué la Chiraquie du pouvoir en Corrèze, le LR Coste s'en donne à cœur joie pour déboiser à tout va. Pour "installer la fibre", au lieu de l'enterrer comme prévu, on a annoncé aux habitants qu'il fallait qu'ils déboisent au bord des routes pour l'installer en hauteur, à leurs frais. Mais, il s'agirait avant tout de faire bosser les usines à bois de la région…
Une campagne de coupe commandée par le conseil départemental tourne au désastre paysager et provoque une insubordination des habitants. En commandant, à l’automne dernier, un élagage expéditif des arbres bordant ses routes, le conseil départemental a semé un vent de panique qui lui vaut de récolter, le printemps arrivant, une tempête de malédictions. L’affaire s’est emparée des réseaux sociaux et a rebondi dans la presse locale. Si le ministère de la Transition écologique et solidaire n’en a pas encore eu ouï dire, cela ne saurait tarder.
Une lettre a été envoyée dernièrement à Nicolas Hulot : ni par la poste ni par courriel, mais par vélo, histoire de faire du buzz. « Ce ne sera pas une balade, mais une opération du désespoir », explique Sébastien Birou, arboriste-grimpeur (élagueur), volontaire pour pédaler jusqu’à Paris. « S’il faut camper devant le ministère, je camperai, du moment que cela mette fin au saccage. »
Depuis cet hiver, des arbres tombent en Corrèze, branche après branche, voire par parcelles entières. La faute à Pascal Coste, le président LR du conseil départemental, accusent ceux qui s’en émeuvent et l’implorent de reconsidérer cet ordre tombé début septembre. Quelque 28 000 Corréziens, propriétaires de terrains longeant les routes départementales, recevaient alors une missive leur intimant de procéder à l’élagage rapide de leurs arbres situés en bordure de chaussée. L’enjeu, expliquait Pascal Coste, était de permettre le déploiement aérien, sur 4 700 kilomètres de routes, « du projet 100 % fibre 2021 ». Les propriétaires avaient jusqu’à fin février pour s’exécuter. « En cas de non-réalisation », prévenait le département, la collectivité procédera, après mise en demeure, à « l’exécution d’office des travaux nécessaires et mettra à la charge des propriétaires (…) les frais engagés ».
Très vite, quelques passionnés s’inquiètent de la disproportion de l’ultimatum. Imposant un élagage sur toute la hauteur de l’arbre, n’autorisant aucune branche à dépasser sur la chaussée, « le schéma de coupe allait à l’encontre de tout ce que nous recommandons », raconte Sébastien Feuillade, arboriste-grimpeur. Un arbre, explique-t-il, a une architecture. Il faut veiller aux angles de coupe, respecter des volumes, jauger les proportions. Et surtout parler le végétal. « Si vous retirez une grosse branche en hauteur, vous provoquez un déficit de photosynthèse. Pour compenser, l’arbre crée de nouveaux rejets : en peu de temps, ces derniers repoussent dans les fils électriques. »
L’injonction, en outre, ne faisait pas de distinguo entre arbres remarquables ou communs, ni ne se préoccupait des niches de biodiversité. Pis : elle menaçait de sanctions financières les propriétaires, sans leur proposer d’accompagnement. « Ici, la terre n’est pas chère, les gens possèdent de la surface », explique Agnès Longevialle, concernée par l’affaire. « La hauteur des arbres rend le travail difficile, voire irréalisable pour les plus âgés. Et les entreprises demandent autour de 150 euros les 100 mètres de chaussée à traiter. Alors que le département nous parlait quant à lui d’une facture de 5 euros le mètre. » Elle-même possédant 600 mètres en bord de route, la douloureuse qui lui pend au nez oscille entre 900 et 3 000 euros.
Beaucoup ont fait le même calcul. Et certains ont paniqué, choisissant, la mort dans l’âme parfois, d’abattre des arbres avec lesquels ils vivaient depuis toujours. « Les arbres, c’est quelque chose de profond en Corrèze. Ce sont eux qui font sa singularité », rappelle Louis Dubreuil, de la Société française d’arboriculture, engagée dans la joute contre le conseil départemental. « Dans certains coins, poursuit-il, on croirait qu’une bombe est tombée. Comme si les gens avaient été pris d’une folie destructrice et s’étaient dit : “Puisque c’est ça, j’arrache tout !” » Des marchands de bois ont, dit-on, aggravé le saccage, en proposant aux propriétaires de couper leurs arbres pour rien, à condition d’étendre le travail à d’autres parcelles afin de se payer en nature. Quoi qu’il en soit, l’hiver arrivé, châtaigniers, gros chênes et vieux hêtres sont tombés comme des feuilles.
Les photos qui circulent donnent à voir des paysages désolés, faits d’essences déchirées ou de souches arrachées. « Le département a entraîné la population dans un processus de destruction de son patrimoine », vitupère Louis Dubreuil.
« Nous ne demandons pas d’interdire l’élagage, expose Sébastien Feuillade, mais de procéder dans les règles de l’art, en conservant une voûte de branches à 7-8 mètres de hauteur et en prenant le temps du cas par cas afin de respecter la qualité paysagère. »
Mi-février – et après plusieurs lettres ouvertes à Pascal Coste –, les associations ont finalement été invitées à un comité de pilotage. Le département a mis de l’eau dans son vin, autorisant le maintien d’une voûte de branches – mais à 14 mètres de hauteur – et repoussant le délai d’exécution de l’élagage au 31 mars. Une goutte d’eau, estiment ses opposants, qui continuent de demander un moratoire. Et s’interrogent sur l’obstination du département à vouloir élaguer de façon aussi précipitée. « Aujourd’hui, il n’évoque plus la fibre optique, mais la dégradation de la chaussée provoquée par les gouttes d’eau tombant des feuilles… » relève Agnès Longevialle. Faute de réponses concluantes, les rumeurs vont bon train. On entend parler de magouilles, ou d’une opération visant à renflouer les usines à bois. Beaucoup se sont mobilisés pour demander des comptes, dont le Collectif D-E-A-R-LIM : Défense de l’Environnement Arboré des Routes du Limousin, auteur du texte ci dessous.
À l'attention : de M.Pascal Coste, Président du Conseil Départemental de la Corrèze
Nous demandons au Conseil Départemental de la Corrèze
-de renoncer à l’élagage ou à la coupe de tous arbres de bords de routes qui ne domineraient pas les lignes de fibre optique
-de renoncer à l’argumentation prétendant que les arbres représentent un (réel) danger pour la circulation et un (vrai) problème pour la durabilité des chaussées
-de conserver tous les arbres ou alignements d’arbres (en bon état sanitaire) ayant un intérêt ‘’patrimonial’’ esthétique, écologique….(arbres centenaires, arbres d’espèces, variétés ou formes remarquables)
-de renoncer à mettre les élagages ou abattages aux frais des propriétaires riverains ne souhaitant pas intervenir eux même pour cela (dans ce cas le bois issu de ces interventions pourrait être à disposition du Département ou de la commune concernée)
-d’engager une réflexion à long terme sur un enfouissement futur de ces lignes
-d’expliquer comment va être géré (techniquement et financièrement) à moyen et long terme le ‘’problème’’des repousses qui ne tarderons pas (dans beaucoup de cas : moins de trois ou quatre ans!) à réinvestir les lieux…
-de se positionner quant aux effets néfastes pour les chaussées induits par la dévitalisation des souches et la suppression des haies en terrain ‘’accidenté’’ (fréquent dans notre département vallonné!)
-de mieux se positionner sur le ‘’problème’’des feuilles prétendues dégrader le goudron ou provoquer des accidents(!). Ces feuilles pouvant provenir d’arbres situés à une certaine distance du domaine public, faudrait-il supprimer tous les arbres susceptibles de provoquer cette ‘’pollution’’?
-de clarifier les conséquences techniques et financières du passage à la fibre optique pour les branchements des abonnés (démarches, frais, abonnements) et de préciser si les anciens branchements cuivre ADSL vont êtres maintenus et pendant combien de temps.
-de cesser la mise en place de (hideux) poteaux télégraphiques blancs et de privilégier l’utilisation des poteaux bois plutôt que les poteaux acier galvanisé.
C'est assez étonnant de voir la Corrèze qui a gagné, en partie, avec les années Chirac, un réseau routier tout neuf se faire ainsi toiletter le réseau par un membre de la FNSEA qui, sous prétexte de vouloir installer la fibre à moindre frais, en profite pour tenter de faire bosser les usines à bois de la région, non ? Et, si cela ne suffit pas, peut-être qu'on pourra aussi utiliser du défoliant pour assainir les bords des routes, non ? Merci patron !
Jean-Pierre Simard avec l'Humanité, et Mes.Opinions.com le 10/04/18