Knud Viktor, peintre sonore du field recording
D'abord peintre, le Danois Knud Viktor s'est pris de passion pour le Lubéron et ses sons sauvages, quitte à devenir un des premiers "peintres sonores" à la fin des 50's. Figure majeure du mouvement, et pratiquant la vidéo comme prolongement de son œuvre, la Maison du Danemark lui consacre ces jours-ci une exposition.
Praticien hors-pair du field-recording et précurseur de l’écologie sonore, l’artiste danois Knud Viktor (1924-2013) est une figure majeure de l’avant-garde de la « peinture sonore ». Peintre à l’origine formé à l’école des beaux-arts à Copenhague en 1956, il s’installe avec sa famille dans le Lubéron au début des années 1960 pour peindre la lumière qui avait fasciné Van Gogh. C’est en découvrant l’influence de la lumière sur le chant des cigales que l’univers sonore de cette région va le capturer. Il devient alors « peintre sonore ».
Knud Viktor passera sa vie à enregistrer une constellation des sons de la nature, bruts, travaillés, retravaillés, à inventer stratagèmes et bricolages pour garder la trace des sons imperceptibles, insoupçonnés : la vie des insectes, le rêve du lapin dans son terrier, les échos de la montagne. Il se rendra ainsi témoin et explorateur minutieux d’un territoire duquel il ne sortira que très rarement et s’attachera à rendre compte des sonorités qui l’entourent en créant ses « images sonores », expressions de sensations diffusées pour la plupart en quadriphonie. « Je ne prétends pas que ce que je fais est de la musique. Je l’ai toujours pensé comme une continuation de la peinture. »
Plasticien, geek, vidéaste, peintre, compositeur et surtout écologiste, Knud Viktor nous laisse en héritage une œuvre profondément sensible et actuelle au vu de la profonde crise environnementale que connaît notre époque. Peu connu dans son pays natal, Knud Viktor a rencontré un succès critique en France. Dans les années 1970 il était sollicité par France Musique pour ses compositions et a également réalisé deux courts métrages dont Bulles et projeté en avant-première du film La mariée était en noir de François Truffaut. L’exposition présentée pour la première fois à Paris par la Maison du Danemark a été conçue en février 2017 à Digne-les-Bains par le collectif NightOwl* avec la collaboration de l’association Allo La Terre*, du Cairn-Centre d’art et du Musée Gassendi à Digne-les-Bains où sont conservées depuis 2013 les archives Knud Viktor.
Non dénué d'humour, une de ses installations nommée Allô la terre est constituée de cabines téléphoniques, fonctionnant à l'énergie solaire. S'il est moins connu pour ses œuvres qu'Eno et Byrne avec leur carton My Life in the Bush of Ghosts, il est loin de démériter. La visite est donc chaudement recommandée.
Jean-Pierre Simard le 29/01/18
Knut Viktor, Peintre sonore -> 18/02/18
Maison du Danemark 142, avenue des Champs-Élysées75008 Paris
Une programmation des concerts, films, récits et conférences l’accompagne :
*NightOwl: collectif initié par Julie Michel & Olivier Crabbé — www.nightowlechoes.org.
*Allo La Terre: association fondée par Kamilla Viktor et Mark Viktor qui travaille à la conservation, diffusion et valorisation des œuvres de Knud Viktor.