Les portraits fantômes de Liu Bolin à la MEP
Incroyablement mimétique, comme un caméléon dans la ville, Liu Bolin se fond littéralement dans l'urbain. Est-ce le réflexe d'un Chinois dans son environnement policé à outrance ou bien une démarche rigoureuse ? qui partirait quand même de là, dans la parano toujours présente de l'après Tien An Men. Ce qu'il en dit et expose à la MEP est ci dessous…
« J’ai décidé de me fondre dans l’environnement. Certains diront que je disparais dans le paysage ; je dirais pour ma part que c’est l’environnement qui s’empare de moi. ».
Sculpteur, performeur et photographe, Liu Bolin, surnommé "l’homme invisible", présente dans cette rétrospective des photographies issues des quatre grands thèmes abordés dans son œuvre depuis plus de dix ans : la politique et la censure, la tradition et la culture chinoise, la société de consommation et la liberté de la presse.
En 2005, sa première série « Hiding in the City » (Se cacher en ville) présente un autoportrait de l’artiste immobile et recouvert de peinture, se confondant avec les décombres de son atelier, situé dans le quartier d’artistes rasé par le gouvernement chinois. Une protestation silencieuse : Liu Bolin se rend invisible pour se faire remarquer.
Depuis, il crée des œuvres mêlant photographie, body art, art optique et sculpture vivante. Cet homme-caméléon pose pendant des heures devant un mur, un paysage ou un monument pour arriver à se fondre dans le décor – les yeux fermés, sa silhouette à peine visible – avec l’aide des ses peintres-assistants, sans aucun trucage numérique. À la fin du processus de camouflage, il fige la performance grâce à la photographie.
Ses clichés, souvent ludiques, sont également porteurs d’une charge symbolique forte. Caché devant un drapeau, il nous montre comment l’individu se perd dans l'identité collective ; noyé dans le rayon d’un supermarché devant des canettes de boissons importées, il dénonce la société de consommation. Ni rouge ni jaune, Liu Bolin adore toutes les couleurs de ses masques. Ironie? Perplexité humoureuse plutôt devant le changement de paradigme chinois actuel.
Liu Bolin est né en 1973 dans la province de Shandong, à l’est de la Chine. Il étudie à l’Académie des Beaux-Arts du Shandong avant d’obtenir son diplôme au Beaux-Arts de Pékin en 2001. Il vit et travaille à Pékin. Artiste conceptuel qui plaît, il ne dérange personne avec son beau bien propre, mais plaisant.
Maxime Duchamps le 14/09/17
Liu Bolin Ghosts Stories -> 29/10/17
MEP 4, rue de Foucry 75004 Paris