L'origami noir de Jlin est une tuerie

Après la révélation du Dark Energy de 2015, Black Origami de Jerrilynn Patton aka Jlin pousse encore plus loin le bouchon du son footwork en le radicalisant vraiment, mais de manière totalement autonome et personnelle. Pas mal pour une fille qui travaillait encore dans une aciérie il y a encore deux ans de cela… Mais ceci explique peut-être cela.

Jlin

En 2015, avec Dark Energy, la productrice de Gary, Indiana ( comme les Jacksons) avait connu un des plus beaux succès techno de cette décennie, en partant du son créé par RP Boo, DJ Rashad et Traxman pour les propulser dans de nouveaux et plus sombres territoires qui fleuraient bon autant le désespoir que la dépression. Mais cela lui permis à la fois d'exorciser ses démons que de trouver le temps de se poser pour produire plus activement- et surtout de quitter définitivement l'aciérie qui l'employait…

Figure de proue du footwork, Jlin renouvelle le genre,  dix ans après son apparition dans les battles de dance à Chicago. Sous-branche de la ghetto-house, ses secousses se ressentent aujourd'hui dans le r’n’b mainstream comme l’electro indépendante, et ses têtes de proue (RP Boo, DJ Paypal…) sont désormais de tous les festivals.

Avec son nouvel opus, Black Origami, qu’elle définit comme un assemblage de plis à l’image de la vie, Jlin fait tournoyer les rythmiques de manière plus tribale que sur Dark Energy. Ici, la violence ne résume plus à la production et au traitement électronique de ses circonvolutions, elle est portée par des cassures et des sonorités plus organiques que par le passé, assemblant percussions virevoltantes et basses aux pulsations profondes, parsemées de samples minutieusement injectés. La vitesse en souplesse et en profondeur, comme quelque chose d'éminemment féminin.

Jlin compose et produit une musique complexe qui avance constamment, ne regardant jamais dans le rétroviseur, puisant dans les sphères du futurisme avec une notion de vitesse qu’elle conjugue de multiples façons. Des collaborations inattendues sont aussi de la partie, avec Holly Herndon et William Basinski, dont elle a dissous les apports au point de les rendre non identifiables. Jlin écrit sa propre histoire, n’écoutant que sa petite voix intérieure, gravissant album après album les cimes de la perfection. Vital tek - recommandé !

Jean-Pierre Simard

Jlin - Black Origami - Planet Mu