Abstractions, distorsions et étranges intuitions avec Ray K Metzker
Solitaire et intuitif, Metzker va pousser dans sa chambre noire, ses recherches de la lumière - pour le noir et blanc uniquement - vers l'abstraction, tout en faisant ses tirages sur fond musical. Rythmes et innovations américaines qui renouent avec les découvertes de Man Ray et Rodtchenko, quarante ans plus tard. Un phénomène, encore peu connu de ce coté-ci de l'Atlantique.
Né en 1931 dans le Wisconsin, Ray K. Metzker s'intéresse à la prise de vue à l'occasion de son passage à l'Institute of Design de Chicago, dans les années 1950. Parcourant les rues, il capte les passants pressés, les subtils jeux d'ombres qu'offre la ville, toujours en noir et blanc et en argentique. Metzker commence alors à passer plus de temps dans sa chambre noire, testant divers procédés artistiques : composition, photomontage, négatifs superposés ou multipliés, voire solarisation. Méconnu en Europe, il constitue une référence photographique outre-atlantique, sa première rétrospective datant de 1967, au MOMA. Cet américain déploie ainsi ses expérimentations, plus technicien que plasticien, tout en gardanten tête qu'un tirage est fait pour être vu, exposé enfin. Sa conception, rare pour l'époque, va à l'encontre du photoreportage et de l'utilisation de la couleur qui commence à se démocratiser. Solitaire et perfectionniste, il laisse la possibilité au réel d'interagir avec l'image qu'il possède cependant déjà à l'esprit.
Après Chicago, Metzker s'attaquera à Philadelphie, avec des compositions aux motifs surprenants, aux silhouettes humaines abstraites évoluant dans la pénombre. Accompagné dans la chambre noire par des percussions, Metzker transpose rythmes et cadences à ses œuvres. Puis, le photographe part découvrir le Nouveau Mexique, où il enseignera en 1970, puis la Grèce et l'Italie. Ces pays lui offrent une nouvelle approche de la prise de vue et plus particulièrement de la lumière dés 1980. Le noir se fait moins récurrent, les contrastes plus atténués. Metzker transmet de véritables sensations par le biais de l'architecture et des sujets. La musique y est d'ailleurs pour beaucoup.
Décédé le9 octobre en 2014, les rétrospectives et vente de tirages commencent à bien fonctionner en Europe pour cette œuvre historique et expérimentale, entre réalité et abstraction, présente dans les plus grandes institutions américaines. A voir absolument pour ressentir cette vie en noir et blanc.
Jean-Pierre Simard le 3/03/17
Ray K. Metzker / Abstractions 4 mars → 27 mai 2017
Les Douches - la galerie 5, rue Legouvé 75010 Paris