La colonisation prise dans les rets d'Acrotonie de Leonor Antunes

En divisant l'espace de son exposition en deux, Leonor Antunes fait circuler l'idée de relation et de colonisation de son dispositif, reposant sur des interactions entre plantes et filets tendus là pour symboliser une sorte d'espace à la manière de la circulation de la sève dans les plantes : l'acrotonie. De l'art qui se pense comme réflexion sur l'architecture, ça intrigue forcément. Explications.

Acrotonie / Leonor Antunes

 

L'Acrotonie est le principe selon lequel les plantes alimentent en priorité leurs extrémités. Lorsque les arbres pourvoient leurs cimes, ils nourrissent leur esprit avant leur corps. A travers cette notion, Leonor Antunes questionne la colonisation en associant chacune de ses sculptures, elles mêmes faites de bois et de tubes – tels des tiges et branches – à une plante verte qu’elle accroche à leur sommet. L'alimentation privilégiée de l’extrémité, de la cime en même temps qu’une réflexion sur l’association sculpture – plante symbolise ainsi leur colonisation mutuelle.

Acrotonie / Leonor Antunes

L’espace de l’exposition est divisé en deux par un écran tissé. Celui-ci reprend l'idée dela réalisation architecturale et de design signée par Charlotte Perriand, Le Corbusier, Pierre Jeanneret, René Herbst et Louis Sognot pour l’Exposition Internationale de 1935, La Maison du jeune homme. Cet espace d’habitation temporaire était scindé en deux zones, l’une étant dédiée à l’esprit et l’autre au corps. Il reflétait les convictions politiques de ses créateurs et leur engagement en faveur d’une modernité qui permettrait un nouvel art de vivre.

Acrotonie / Leonor Antunes

La réactivation par Leonor Antunes de l’élément clef de La Maison du jeune homme s’inscrit dans son travail autour de la proportion. L’écran fixe sert ici d’unité de mesure : il agit comme une grille de référence comme le faisait la technique de mise au carreau inventée à la Renaissance pour faciliter la reproduction d’un élément à différentes échelles en peinture et en dessin. Dès l’entrée de l’exposition s’impose ainsi un filtre visuel à la mesure duquel se lisent les œuvres.

Remodéliser le design des années 30 et de le Corbusier avec Perriand, c'est peu commun. Mais de plus, ça laisse place à une autre forme de pensée, plus ouverte - limite tactile, avec les filets pendus. On adore. Allez-y ! 

Maxime Duchamps (avec galerie)

Acrotonie de Leonor Antunes ->25/03/17
Galerie Air de Paris - 32, rue Louise Weiss 75013 Paris