Passé sous le radar : King Biscuit sort en tapant de sa boîte de métal
Découverts au hasard d’heures harassantes à trouver du son qui change des ritournelles infernales, mises en avant dans tous les jukebox numériques sur internet, King Biscuit et son Well, Well, Well ne sont plus de première fraicheur. Mais, sorti en février de cette année, il s’en est fallu de peu que je passe à côté de ce petit bijou noirci au feu de camp du bord du Miss…Stop. Du bord de la Seine/scène rouennaise.
Les Normands font tourner la crème en baratte, et battre le beurre durant ces durs moments de pénuries nous fait plus que du bien. Bien, bien, bien, des rythmiques basiques, des riffs archi éculés et des mélodies blues ultra réchauffées. Tout pour avoir envie de passer son chemin et pourtant, c’est juste l'inverse qui se passe ! Non seulement on y reste, mais nos oreilles n’en croient pas leurs yeux, ce qu’ils voient n’est pas ce qu’ils semblent entendre et vices vers soi, on en redemande.
En ces 3 minutes et 7 secondes de Down and Below, ils vous attrapent le côté blues que vous vouliez cacher à la face du monde. Ils vous l’attrapent et, dans la pure tradition des origines de cette musique noire américaine, redéfinissent avec talent les contours de ce riff de guitare qui, de John Lee Hooker à Bror Gunar Johnson, en passant par ZZ Top, en a vu des vertes et des pas toujours très sûres.
C’est l’humilité qui frappe d’entrée. Et c’est par le timbre que King Biscuit se distingue de la production bleue du moment. Trempé dans des boîtes de métal, le blues façon Delta du Mississippi a quelque chose de terriblement contemporain. Gageure qu’honorer à la fois les anciens et tracer sa propre route. S'ils racontent qu’ils ont mis un an à trouver leur son, c’est du côté de la musique expérimentale qu’ils ont trouvé le moyen de trafiquer les guitares, leur micro ou bien les violons.
Rien ne ressemble à Son House et son intro grinçante et suintante, d’un violon qui ne voudrait pas l'être, mais se rêverait Stratocaster d’Hendrix, tout en inventant son propre son. Tout le contraire de Turn Out, le morceau suivant qui lui s’affirme en : j’ai un violon et je tape du pied comme Charles Ingalls, mais j’avoue avoir abusé pas mal de mon tord boyau familial juste avant ! C’est aigre, c’est fort et on tape sur tout ce qu’on trouve pour envoyer du bois. Enfin, du métal plutôt !
Je vous laisse vous « attacher » au 9 autres titres qui composent cet album hors du commun des motels de la route 66 (en fait des Formule1 de l’A13), vous « attacher » , parce que la très belle pochette illustrée par la plasticienne Lison de Ridder invite à l’attachement et au lien. Tous font partie des « Vibrants défricheurs » collectifs de Rouen, Frédéric Jouhannet et Sylvain Choinier (duo permanents du groupe) dans une joyeuse folie improvisatrice, créatrice et communicative, on ne manquera pas d’en reparler très vite.
En attendant, ami lecteur (mon sans grade, mon frère), tu peux aller te percher à Alençon, à La Luciole pour aller les écouter, c’est gratuit, t’en profitera pour acheter en vrai leur disque qu’ils auront sûrement avec eux !
http://www.laluciole.org/evenements/king-biscuit/
Richard Maniere le 7/11/17
King Biscuit Well, Well, Well