Dada Africa, nouvelles perspectives à l'Orangerie
Dans leur radicale fin de non recevoir de toutes les manifestations de la civilisation industrielle et de la Première Guerre mondiale, les Dadaïstes se sont tournés vers la part maudite de XXe siècle, les arts issus de la colonisation pour prendre là où les autres avaient volé, de quoi forger un nouvel imaginaire, en miroir du poussif art de l'époque. Nouveau véhicule de discours pas dupe et réévaluation des cultures négligées d'avant à l'Orangerie.
Dada, mouvement artistique foisonnant et subversif, naît à Zurich en 1915 et se déploie ensuite à travers plusieurs foyers, de Berlin à Paris en passant par New York et ailleurs. Par leurs œuvres nouvelles – poésie sonore, danse, collages, performance –, les dadaïstes rejettent les valeurs traditionnelles de la civilisation, tout en s’appropriant les formes culturelles et artistiques de cultures extra-occidentales, l’Afrique, l’Océanie, l’Amérique.
Ils ont ainsi regardé et collectionné les oeuvres d'art africaines, amérindiennes et asiatiques : elles étaient pour eux synonymes de liberté, puisque éloignées des standards européens et des traditions. Leurs formes exotiques leur paraissaient étranges, et ils puisaient en elles un nouveau répertoire, qu'ils réemployaient ensuite dans leurs peintures, sculptures, et même dans leur mode de vie à travers d'insolites performances.
Le Musée de l’Orangerie propose une exposition sur ces échanges en confrontant œuvres africaines, amérindiennes et asiatiques et celles, dadaïstes, de Hanna Höch, de Jean Arp, de Sophie Taeuber-Arp, de Marcel Janco, de Hugo Ball, de Tristan Tzara, de Raoul Haussmann, de Man Ray, de Picabia….
Ainsi seront évoquées les soirées Dada, avec plusieurs archives, film de danse et documents sonores, musicaux, mais aussi la diversité, l’inventivité et la radicalité des productions Dada – textiles, graphisme, affiches, assemblages, reliefs en bois, poupées et marionnettes – face à la beauté étrange et la rareté d’œuvres extra-occidentales, statue africaine Hemba, masque africain de Makondé, masque Hannya du Japon, proue de pirogue de guerre maori...
En contrepoint de l’exposition seront présentées dans le musée des œuvres de deux artistes contemporains :
- deux photographies de l’artiste Athi-Patra Ruga issues d’une performance et d’une réflexion sur l’identité… A Vigil for Mayibuye (from the Exile series), 1915 et The Future White Woman of Azania, 2012
- un ensemble d’œuvres (tapisseries, photographie et dessins) d’Otobong Nkanga dont deux tapisseries In pursuit of Bling, 2014.
Friedrich Engel
Dada Africa -> 19/02/18
Musée National de L'Orangerie - Jardin des Tuileries 75001 Paris