Tintin détourné : "Un Faux graphiste" lâche l'affaire

Les pisse-froid de Moulinsart SA, qui représentent les ayant-droits d’Hergé, ont demandé à "Un Faux graphiste" d'arrêter toute publication sous peine de procès. Sous la plume acide de Gil, le capitaine Haddock y tenait le discours coincé d'un hipster et son Tintin, la posture d'un journaliste accro aux réseaux sociaux en vue du Pulitzer.

«Un Faux graphiste», Gil de son vrai nom, étudiant en lettres et langues de la région bruxelloise, avait trouvé une formule hilarante : à reprendre les planches de la célèbre BD pour en ré-écrire les dialogues. Le jeune homme de 23 ans s'explique :

"Je les connais par cœur, donc je les parcourais. Quelque chose me frappait sur la page, et l’idée partait de là. Il est très facile d’adapter Tintin à un sujet hyper-contemporain comme les hipsters ou l’état d’urgence à Bruxelles. On a souvent cru que j’étais Français parce que je suis très au courant de votre actualité politique."

Après un an de pratique sur sa page FB et 300 000 fans, Moulinsart SA l'a invité dans leurs bureaux bruxellois pour lui expliquer son fait. En gros, ils m’ont dit 'Vous vous êtes bien amusé ; ce serait bien d’arrêter.' Je n’ai pas de quoi me payer un avocat, donc je n’ai aucun moyen de me défendre. Je n’ai fait ça que pour me distraire, je n’en tire évidemment aucun revenu. Juste la reconnaissance des gens, très agréable."

Ne pouvant arguer ni du droit de citation ni de celui de la parodie - il se contente de refaire les textes sans toucher aux images, ni au droit d'exemple - Gil s'est engagé à tout détruire.
Nous sommes mal ! Envolées, ces planches drolatiques dans lesquelles Haddock peste, devant un professeur Tournesol qui se pose en galeriste recherchant des graffeurs à exposer : «Tout le monde me prend pour un hipster avec ma barbe, putain... Ce quartier a changé. Y a plus que des galeries d’art à la con, des snacks végés et des concepts-store. Plus un seul kebab. Ça me dégoûte. Putain de gentrification !» On ne verra plus non plus ces gitans mués en «communauté autonome d’esprit libre qui survit grâce à un potager biologique» et porte «des vêtements vintage».

Mais on pourra toujours attendre des nouvelles des détournements de détournements, comme ceux réalisés par les fans - auteurs d'un savoureux "Un peu de hardcore sans vulgarité", comme suit. Nul doute que d'autres prendront le relais sur la toile ; pour de nouvelles aventures d'un Tintin drôle, inventif, fichtrement bien senti, saisissant pile-poil l'air du temps,