Les Apprentissages de Sheila Hicks

Plasticienne invitée par le Festival d'Automne 2016, Sheila Hicks déploie ses œuvres sur trois lieux jusqu'à fin décembre et pratique un langage artistique directement accessible qui tend vers l'universel et le sensuel. On adore !

Apprentissages est un parcours en trois temps, déployé de septembre à décembre, aux apparitions successives, intimement liées à la géographie parisienne.

Premier temps au Musée Carnavalet, où l’univers de Sheila Hicks dialogue avec l’architecture éclectique de ce musée dédié à l’histoire de Paris, notamment dans la galerie de l’Hôtel Carnavalet, côté jardin, sur la Cour des Marchands-Drapiers.

Second moment, à découvrir au cours de promenades urbaines, avec un ensemble de vitrines habitées par les gestes caractéristiques de son vocabulaire chromatique, textile et pictural.

Un final, enfin, au sein du vaste Atelier décor de Nanterre-Amandiers, ouvert au public pour l’occasion, où l’artiste redéploie, au sein d’une architecture résolument moderne, les œuvres exposées précédemment. Puisque rien n’est jamais figé, qu’il faut rester curieux, Apprentissages souhaite être un parcours « initiatique » ouvert, où la rencontre avec l’art et la matière enrichit l’expérience commune, de nos corps, de notre mémoire, celle de l’artiste comme celle de chacun d’entre nous.

Sheila Hicks

Le tissage : une évidence que les archéologues et historiens ont documentée depuis l'existence des civilisations. Un ouvrage fut essentiel : Les Textiles anciens du Pérou et leurs techniques de Raoul d’Harcourt (1879-1971), paru en 1934, l’année de ma naissance. Quand j’étais à la Yale University, étudiant parallèlement la peinture avec Josef Albers et les civilisations précolombiennes avec George Kubler, je fus happée par les tissages de ces dernières : leur contenu et surtout leurs structures, leurs modes de « fabrication », par les relations entre couleurs,dessins et formes. Ce livre n’était alors disponible qu’en français – ce fut peut-être ma première rencontre avec cette langue. La rigueur et la sophistication avec lesquelles les créateurs péruviens ont maîtrisé les croisements de fils en trois dimensions sont exemplaires. C’était bien plus intriguant que le programme du Bauhaus ! Les anciens Péruviens savaient notamment composer dans un espace prédéfini par quatre lisières, tisser en forme et sans couture – parfois dans des dimensions étonnantes–, utiliser les fentes pour des effets décoratifs ou fonctionnels, jouer sur les symétries et les répétitions de motifs souvent imbriqués les uns dans les autres, achever des double-face et des constructions de plusieurs épaisseurs de même qualité. Mon enthousiasme pour ce livre m’a incité à entrer avec beaucoup de liberté dans le jeu des interactions de fils, m’autorisant, dans la droite ligne de ces créateurs, les jeux intellectuels et la création d’un langage universel.

Galerie kreo / Vitrines Sheila Hicks / 15 octobre au 17 décembre
Nanterre-Amandiers, centre dramatique national /9 au 17 décembre