Antoine d'Agata attaque l'ATLAS

Dans mes œuvres les plus récentes, j’essaie de forger un langage secret, illégal, construit en déconstruisant l’esthétique. Mon intention est de pervertir et détruire les perspectives qui polluent les normes du langage photographique. (A. d'Agata)

ATLAS est d’abord un voyage, l’enregistrement des obsessions et des expériences sensorielles de l’artiste. De continents en continents, Antoine d’Agata documente ainsi une histoire anxiogène et trouble, celle des prostituées rencontrées et des lieux visités. Il extrait de ses nuits « ses réalités sombres » et la « satisfaction destructrice du désir ».

Antoine d’Agata, Sans titre (Pink), 2016 Courtesy of the artist & Galerie Les Filles du Calvaire, Paris

« Au sein des chronologies et accumulations qui constituent Atlas et Paradigmes, les certitudes s’effondrent et la réalité se défait sous forme de séquences de vie fragmentées. Je suis attiré par la part sombre et cachée du monde, par son caractère maudit ou tabou. Sous l’influence préméditée de désordres sexuels et narcotiques, je me compromets, physiquement et mentalement. L’addiction aux substances chimiques est le principe actif de ma capacité à réinventer constamment mon propre destin, mon regard et mes gestes à travers l’action photographique ».

Antoine D'agata, Yama, Cambodge, 2009, 2016 Courtesy of the artist & Galerie Les Filles du Calvaire, Paris

Chez Antoine d’Agata, si au départ l’expérience prime effectivement sur le concept, la formalisation s’illustre ici par la mise en place d’une imagerie morcelée et d’un ensemble volontairement fragmenté. A partir du désordre, Antoine d’Agata établit un système ordonné et séquentiel. L’anarchie existentielle des sujets et des lieux devient alors une « grille », un ensemble de lignes et de colonnes dont la forme, apparemment simple, joue pourtant avec la confusion des sens et la répétition obsessionnelle. La saturation et l’excès d’images que l’artiste examine comme une fatalité chargent ses œuvres d’une évidente impertinence esthétique. Le parti pris de l’accumulation n’est pas sans évoquer les essais scientifiques de Muybridge. Les chevaux au galop sont ici troqués contre le sexe d’une femme se masturbant, une sorte de chronopornographie justifiée par la nécessité « d’enregistrer l’intensité de l’événement, des séquences d’existence ». Les lieux deviennent également les motifs répétés suggérant le pire : la noirceur d’une forêt (Selva), les pavillons fantômes et délabrés de Fukushima.

ATLAS réunit les tous derniers travaux d’Antoine d’Agata. Cette exposition s’entend comme le maillon d’une entreprise cinématographique et artistique commencée en 2013 par la sortie du film ATLAS. Une installation (White noise) pensée à partir de ce film est d’ailleurs exposée à LaBanque dans l’exposition Dépenses (commissariat Léa Bismuth). De ce projet, Antoine d’Agata a également conçu un livre du même nom, dont la sortie est prévue pour le mois d’octobre aux Editions Textuel. La dernière série « Paradigmes » présentée à la galerie fait quant à elle état d’une nouvelle approche formelle à la frontière du photographique et du filmique.

Antoine d'Agata ATLAS -> 26/11/16
Galerie Les Filles du Calvaire - 17, rue des Filles-du-calvaire 75003 Paris

Antoine D'agata, Amoeba, Planches contact 2007-09, 2016 Courtesy of the artist & Galerie Les Filles du Calvaire, Paris