12 août 1952, La nuit des poètes assassinés - ce que Dieudonné et Soral doivent à Staline
Alain Soral, dont l’obsession des juifs est connue, comme son amour pour les régimes autoritaires, est passé par le PCF et le Front National avant de fonder en 2007 sa petite boutique des horreurs sur Internet. Nous devons, à lui et son compère Dieudonné, le commode remplacement systématique du mot “antisémite” par celui d’”antisioniste”, beaucoup plus dur à définir, et surtout à traduire en justice, dans les bouches de ceux qui s’en prennent aux Juifs, dans des termes qui n’ont pas changé depuis “La France juive”, le fameux pamphlet antisémite d’Edouard Drumont publié en 1886. Peu de gens savent que c’est Staline qui inventa ce tour de passe-passe sémantique pour justifier l’élimination des communistes juifs au début des années 50. L’URSS qui venait d’abattre les nazis ne pouvait naturellement pas s’avouer antisémite. La création toute récente d’Israel a donc été utilisée pour justifier qu’on assassine des “espions d’un pays étranger” et parler d’un “complot sioniste.” Le vieil antisémitisme russe portait maintenant de nouveaux habits.
Officiellement la seconde guerre mondiale débuta le 1 septembre 1939 par l’attaque de la Pologne. Mais les citoyens soviétiques ont encore vécu près de deux ans dans l’état d’une paix précaire, suite au pacte de non-agression germano-soviétique, signé le 23 août 1939 par les ministres des Affaires Étrangères, Viatcheslav Molotov et Joachim von Ribbentrop. Le plan Barbarossa, c’est-à-dire l’invasion de l’Union Soviétique par le Reich débuta le 22 juin 1941. Les premiers mois de la guerre furent catastrophiques pour l’armée soviétique.
Dès les premiers jours, les pertes sont immenses : près de 2000 avions cloués au sol ou abattus au soir du 22 juin ! De juin à décembre 1941, l’Union soviétique perdra 5,5 millions de soldats, dont 4 millions de prisonniers et 1,5 millions de morts. Dans cette situation, Staline adopte une nouvelle ligne politique pour créer un grand élan patriotique. Les lieux de culte fermés dans les années 1930 seront rouverts en partie, le clergé ressort des « catacombes », les écrivains muselés sont de nouveau imprimés (au compte-gouttes, il est vrai !), on remet à l’honneur les maréchaux de l’Empire russe comme Koutouzov, le vainqueur de Napoléon.
Création du Comité Antifasciste Juif
La création du Comité Antifasciste Juif s’inscrit aussi dans le cadre de cette nouvelle doctrine plus ouverte sur le monde. Pour comprendre l’importance de ce Comité qui va devenir une institution légendaire, il faut revenir à la première année de la guerre, lorsque l’Armée rouge subissait des revers sur tous les fronts. Même Moscou était menacée et le gouvernement soviétique se replia sur Kouïbychev[1]. Dans la ville il y avait aussi les missions étrangères, notamment polonaise, créée depuis l’accord signé à Londres le 21 juillet 1941 entre le général Wladyslaw Sikorski[2] et l’ambassadeur Ivan Maïski[3] qui prévoyait la libération massive des Polonais, retenus dans des camps de concentration et en relégation en Sibérie et en Asie Centrale. Il s’agissait de citoyens polonais, dont de nombreux Juifs, qui habitaient avant la guerre à Lwȯw ou dans sa région et qui avaient été arrêtés par milliers entre septembre 1939 et juin 1941.
Parmi eux figuraient Viktor Alter[4] et Henryk Ehrlich[5], respectivement dirigeants de la section polonaise de l’Internationale socialiste et du Bund, le Parti ouvrier juif. Les deux hommes avaient rédigé un rapport à l’intention de Staline qui avait été remis à Beria.[6] Ils proposaient de créer un Comité international juif antifasciste afin de mobiliser en faveur de l’Union Soviétique des millions de Juifs, surtout aux États-Unis, en Grande Bretagne, en Amérique du Sud, en Afrique du Sud et en Australie. Ce rapport fut accueilli avec beaucoup d’intérêt par des responsables soviétiques. Pourtant Viktor Alter et Henryk Ehrlich seront arrêtés par le NKVD, juste avant leur départ pour Londres, siège du gouvernement polonais en exil. Personne ne revit jamais les deux hommes qui furent accusés d’espionnage et exécutés dans des conditions demeurées mystérieuses. À ce jour, on ignore même la date exacte de leur mort et leur tombe n’a jamais été retrouvée.
Récupération des autorités soviétiques
Pourtant leur projet fut rapidement repris par les autorités soviétiques, mais avec un objectif quelque peu différent. Au lieu d’un comité international, on créa le Comité antifasciste juif de l’Union Soviétique. C’est ainsi que, le 24 août 1941, de nombreuses personnalités juives participèrent à un meeting retransmis par la Radio Moscou, afin de proclamer officiellement la naissance du Comité. Un appel aux Juifs du monde entier fut alors lu en yiddish qui débutait ainsi : « Brider und shvester, jidn fun der gantzen welt… » [Frères et sœurs, Juifs du monde entier…]. Étaient présents les représentants les plus remarquables de l’élite culturelle juive : des écrivains, (David Bergelson[7], Peretz Markish[8], Itzik Fefer[9]), Solomon Mikhoels, le directeur du Théâtre Juif d’État, le violoniste David Oïstrakh[10], le physicien Piotr Kapitsa[11], le metteur en scène Sergueï Eisenstein[12], le professeur de biologie Lina Stern[13]– la seule femme -, membre de l’Académie des sciences et beaucoup d’autres encore. Solomon Mikhoels fut élu président de ce Comité et lança sur-le-champ un appel vibrant aux Juifs du monde entier. Un court discours de l’écrivain Ilya Ehrenbourg[14] impressionna les présents :
Dès le juin 1942 le CAJ avait créé un journal en yiddish. « Eynikeyt » (Unité). Dans son éditorial du premier numéro, le président du comité demandait aux Juifs du monde entier de faire des dons afin de réunir une somme d’argent suffisante pour fabriquer mille chars et cinq cents bombardiers. Les dirigeants soviétiques ne pouvaient évidemment qu’être d’accord avec une telle démarche !
Mais peu à peu la faille apparut : les hommes au pouvoir voyaient dans le Comité une agence de propagande soviétique en direction de l’Occident, tandis que le Comité se considérait, par le biais de son journal, comme le porte-parole des Juifs d’Union Soviétique. Pendant les années de guerre, les Juifs d’Union Soviétique suivaient attentivement les activités du Comité Antifasciste Juif un organisme qui, entre 1942 et 1945, les représentait tant à l’intérieur du pays qu’auprès des pays alliés.
Reconnaissance internationale
Il publia des livres, des brochures, des témoignages. En effet, pendant de longs mois, Ilya Ehrenbourg et Vassili Grossman[15] avaient collecté des récits des rescapés des ghettos et des camps de concentration nazis pour les faire paraître dans un « Livre noir[16] ». Mais cette publication sera interdite et verra le jour bien des années après la mort des deux écrivains, lorsque l’Union Soviétique implosa.
Le Comité jouissait d’une reconnaissance internationale après le voyage de sept mois de Solomon Mikhoels et d’Itzik Fefer aux États-Unis, au Mexique, au Canada et en Angleterre. Pendant leur périple, quarante-cinq millions de dollars furent collectés pour l’Armée rouge, une somme énorme, si on considère qu’elle était uniquement constituée de dons privés.
Dans le même temps, les membres du Comité étaient tels des équilibristes sur un fil, continuellement suspectés de déviationnisme nationaliste, un reproche grave en Union Soviétique. Une fois la guerre achevée, l’existence du Comité s’avère assez rapidement menacée. Ses membres étaient soumis à une surveillance constante et à des critiques très virulentes de la part des dirigeants. Leurs appels vers les Juifs, exprimés de surcroît en yiddish, étaient stigmatisés comme preuve de l’esprit cosmopolite et nationaliste, incompatible avec le régime soviétique. Ils devront le payer de leur vie quelques années plus tard.
Après le départ des Allemands
En 1944 les troupes allemandes sont chassées du territoire de l’Union Soviétiques et les Juifs qui avaient pu être évacués pendant la guerre, peuvent revenir chez eux. Ils constatèrent alors l’immensité des pertes. Dans la vie quotidienne ils rencontrèrent alors moult problèmes et se tournaient souvent vers le Comité, en réclamant de l’aide. Après l’éclatement de l’Union Soviétique en 1991, on retrouva dans les archives du CAJ, confisqués par le KGB, une lettre de Mikhoels, adressée à Viatcheslav Molotov[17] dans laquelle il évoque ce problème :
Or les persécutions des Juifs s’aggravèrent après la victoire et surtout à partir de la fin 1947. La première victime fut le président de CAJ Solomon Mikhoels, assassiné à Minsk, le 13 janvier 1948. Cette mort, maquillée en accident de circulation, sera le prélude à une immense vague antisémite qui va recouvrir le pays entier.
Arrestation des intellectuels juifs
À l’époque, mes parents habitaient au Birobidjan, dans la Région Autonome Juive. Aussi bien chez nous que dans les autres régions de l’URSS, les gens, probablement, ne pouvaient pas prévoir toutes les suites tragiques de l’assassinat de Mikhoels. Mais déjà toute petite, je me souviens que ce sujet fut souvent évoqué à mi-voix. Dans les années 1948-1953, ce nom était comme un thermomètre pour apprécier la situation des Juifs en Union Soviétique. Bien avant la guerre, en 1936, Mikhoels avait joué dans un épisode du film d’Aleksandrov « Le cirque ». Il y chantait une berceuse en yiddish. Ce film, très populaire, était régulièrement projeté, toujours avec le même succès, car il était exceptionnel d’entendre le « mame loshn » dans un film soviétique. Cette séquence fut coupée après la mort de l’artiste ; alors les spectateurs juifs comprirent que leur situation était devenue vraiment critique.
La répression, commencée en janvier 1948, continuait, en s’accentuant de plus en plus. Quelques mois après, pratiquement tous les membres du Comité furent arrêtés et accusés de haute trahison et d’espionnage. Ensuite débuta une énorme vague d’arrestations parmi les intellectuels juifs. Il est intéressant d’ajouter un autre détail : cette persécution eut lieu juste après la création de l’État d’Israël. Or l’Union Soviétique a voté pour l’apparition de cet État sur la carte du monde. En septembre 1948 le premier ambassadeur d’Israël en Union Soviétique présenta ses lettres de créances. C’était Golda Meyerson, qui bientôt changera son nom en Golda Meir. Quand elle vint à la grande synagogue de Moscou pour la fête de Rosh Hashana, elle fut accueillie par des milliers de personnes. (Les témoins avancent le chiffre de 40000). Au Kremlin, pendant une réception officielle, elle bavarda très amicalement en yiddish avec la femme de Molotov, Paulina Jemtchoujina, proche de plusieurs membres du CAJ. Dans ses mémoires Golda Meir a même cité une phrase de Jemtchoujina : « Je suis la fille du peuple juif ». Quelques semaines plus tard elle sera arrêtée pour les mêmes raisons que les artistes et les intellectuels du Comité Antifasciste Juif.
La nuit des poètes assassinés
Les membres emprisonnés du CAJ furent jugés du 8 mai au 18 juillet 1952. Treize accusés furent condamnés à mort et exécutés secrètement le 12 août 1952. Cette nuit sera appelée « La nuit des poètes assassinés »[18]. Mais la persécution de l’élite juive ne s’arrêta pas là, puisque pendant cette période, de très nombreux écrivains, acteurs, musiciens, sculpteurs, scientifiques furent emprisonnés ou fusillés. Le monde intellectuel juif fut complètement décapité. Comment se relever d’un tel désastre ?
Chez nous au Birobidjan, à voix basse, on évoquait les personnalités juives arrêtées et exécutées à Moscou. On pleurait l’acteur Veniamine Zouskine[19], car il avait joué dans le film « Les chercheurs du bonheur » consacré au Birobidjan., Il a été arrêté en 1948 et fusillé aussi le 12 août 1952, après une détention de quatre ans pendant lesquels il fut impitoyablement torturé.
Dans la Région autonome juive (RAJ) les persécutions furent tout aussi nombreuses. On avait arrêté les cadres du parti et les écrivains, les journalistes, le directeur du musée municipal. Ils étaient accusés d’espionnage en faveur des États-Unis et du Japon, on parlait même d’une tentative de rattacher le territoire de la RAJ au Japon ! On condamnait pour des faits qui quelques mois auparavant étaient autorisés, voire souhaités. Les actions éducatives pour développer l’enseignement juif étaient dénoncées comme un exemple d’esprit nationaliste. La mise en valeur de quelques objets juifs du musée était considérée comme une preuve d’esprit bourgeois, cosmopolite et antisoviétique. Les timides tentatives pour développer la publication des livres en yiddish, élargir le tirage du journal local « Birobidjaner Shtern », ou implanter des cours de yiddish, devinrent des crimes contre l’État soviétique. Dans la ville et dans la région, les écoles et les cours furent fermés, le théâtre aussi, (il deviendra le Palais des Pionniers où, toute petite, j’allais dans la section musicale), des livres yiddish de la bibliothèque municipale furent expurgés. Les œuvres des auteurs arrêtés et fusillés en 1952, même des éditions anciennes, furent passées au pilon. La majorité des livres furent brûlés. Sur 37000 livres, il n’en resta que 4000 ! Le personnel en sauva un certain nombre, les déposant à la remise ou les « déguisant » par des couvertures anodines. Dans la bibliothèque qui portait le nom de Sholem Alekheïm, ses livres dans des éditions originales furent considérés comme des preuves des actions subversives envers l’État !
Tragédie acte 2 : les « blouses blanches »
Cette tragédie du 12 août 1952 ne sera que le premier acte, le second aura lieu un peu plus tard.
Après la vague d’arrestations des années 1948 et 1949, après le massacre du 12 août 1952, on pouvait espérer que les persécutions allaient s’arrêter. Mais l’horreur continuait. Ainsi une très mauvaise nouvelle parvint à tous les habitants de l’URSS le 13 janvier 1953, quand à la radio on procéda à la lecture d’un article qui venait de paraître, dans la Pravda sous le titre « Sous le masque des médecins universitaires, des espions tueurs et vicieux ». Il dénonçait un soi-disant « complot d’un groupe de neuf médecins », dont six furent Juifs. On les accusait d’avoir empoisonné les hauts dignitaires du régime. Selon les mêmes sources, ces médecins étaient, au moment de leur arrestation, sur le point d’assassiner d’autres importantes personnalités soviétiques.
Parmi les médecins inculpés se trouvait le médecin personnel de Staline, Vladimir Vinogradov ainsi que le général Miron Vovsi, le médecin-chef de l’Armée rouge, tous deux très respectés par la profession. (Miron Vovsi était un cousin de Solomon Mikhoels) De nombreux Juifs, médecins, pharmaciens, infirmières, furent accusés d’avoir participé au complot et furent arrêtés. Au début il y avait 37 personnes arrêtées, mais le chiffre s’éleva rapidement à plusieurs centaines. Dans des hôpitaux et des dispensaires, les patients hystériques refusaient d’être soignés par des Juifs. Simultanément, une violente campagne antisémite se mit en place non seulement en Union Soviétique, mais aussi dans l’ensemble des pays du bloc de l’Est. C’est alors que les bruits se répandirent dans la communauté juive que le pouvoir s’apprêtait à exiler tous les Juifs d’URSS vers le Birobidjan par des convois entiers.
À l’époque de « l’affaire des blouses blanches », j’étais encore trop petite pour retenir tous les détails. Je me souviens néanmoins d’une période brève, mais très angoissante.
Au mois de mars au Birobidjan, l’hiver était encore loin d’être terminé. Mais en mars 1953, les Juifs de l’Union Soviétique passèrent du désespoir absolu à l’espoir encore timide.
Mort de Staline
Le 4 mars 1953, la radio communiqua la nouvelle de la grave maladie du Guide Suprême. Et le 5 mars, à 6 heures du matin, (heure de Moscou) après un long et lugubre roulement de tambour suivi de l’hymne national, c’est la voix du speaker le plus célèbre de l’URSS, Youri Lévitan, que tous les Soviétiques reconnaissaient d’emblée, tant ils s’étaient habitués à l’entendre pendant la guerre, qui annonça :
« Le cœur de Iossif Vissarionovitch Staline, compagnon d’armes de Lénine et génial continuateur de son œuvre, guide d’une infinie sagesse du parti communiste et éducateur du peuple soviétique a cessé de battre ». Il relira plusieurs fois dans la journée le communiqué gouvernemental de sa voix grave.
On ne pouvait qu’être stupéfait par la rapidité des événements qui allaient suivre. Déjà un mois après la mort de Staline, la presse soviétique publia des articles, expliquant que « le complot des blouses blanches » n’avait jamais existé, et les médecins arrêtés furent libérés (Remarquons que parmi les neufs accusés deux étaient morts en prison, probablement sous la torture.)
Même les habitants de la Région autonome juive pouvaient sentir la fin du cauchemar et bientôt dans la ville, comme partout en Union Soviétique, les anciens prisonniers commençaient à revenir de plus en plus nombreux.
Mais il faudra encore attendre le XXème Congrès du Parti communiste, en février 1956 pour que le timide dégel commence vraiment !
* Ada Shlaen est professeur agrégée de russe, et a enseigné aux lycées La Bruyère et Sainte-Geneviève de Versailles
[1] Depuis la chute de l’URSS Kouïbychev avait retrouvé son vieux nom de Samara.
[2] Władysław Sikorski (né le 20 mai 1881, mort le 4 juillet 1943 à Gibraltar dans un accident d’avion). Militaire et surtout homme politique polonais, général et chef des forces armées polonaises, et Premier ministre du gouvernement polonais en exil de 1939 à 1943. Sa mort suspecte au moment de la découverte du charnier de Katyn provoqua beaucoup de rumeurs quant à l’implication des divers services secrets.
[3] Ivan Maïski (pseudonyme de Yan Liakhovetski, né le 19 janvier, mort le 3 septembre 1975). Diplomate et historien soviétique.
[4] Viktor Alter ou Wiktor Alter (né le 7 février 1890 en Pologne, fusillé (probablement) le 23 décembre 1941 à Kouïbychev (Samara), militant actif du Bund et membre du comité exécutif de la Deuxième Internationale.
[5] Henryk Ehrlich (né en 1882 à Lublin, fusillé (probablement) le 23 décembre 1941 à Kouïbychev. Il existe une autre version de sa mort, par suicide. Il fut un militant actif du Bund, un journaliste très populaire, un élu de la municipalité de Varsovie avant 1939 et un membre très actif du comité exécutif de la Deuxième Internationale.
[6] Lavrenti Beria (né le 29 mars 1899, fusillé le 23 décembre 1953). Il fut sans conteste une figure clé du pouvoir soviétique de 1938 à 1953 : chef des services de sécurité intérieure sous des noms différents : NKVD, MGB, puis KGB. Son rôle fut primordial dans l’organisation du Goulag, le développement des réseaux d’espionnage internationaux, la mise au pas des pays de l’Europe Centrale et Orientale après la guerre.
[7] David Bergelson (né le12 août 1884, fusillé le12 août 1952 à Moscou), écrivain de langue yiddish. Né en Ukraine, il vécut à Berlin jusqu’à l’arrivée au pouvoir d’Hitler. Il décida alors de retourner en Union soviétique. Cependant comme beaucoup d’autres écrivains juifs, il devint la cible de la campagne antisémite de Staline. Il fut arrêté en janvier 1949, condamné à la peine de mort et fusillé avec ses autres codétenus le 12 août 1952 lors de la nuit des poètes assassinés. Il sera réhabilité après la mort de Staline.
[8] Peretz Markish né le 7 décembre 1895, était considéré comme le poète yiddish le plus connu des années 1920 et 1930. Accusé de trahison, il fut fusillé avec ses autres codétenus le 12 août 1952 lors de la nuit des poètes assassinés). Il sera réhabilité en 1955.
[9] Fefer Itzik (né en 1900 et fusillé à Moscou le 12 août 1952) poète soviétique de langue yiddish. Pendant la guerre il fut un correspondant des journaux soviétiques. I. Fefer fut un poète parmi les plus fidèles à l’idéologie communiste. Ceci ne pourra pas d’ailleurs le sauver, car en 1948, après l’assassinat de Mikhoels, il fut arrêté et accusé de trahison. Il est fusillé avec ses autres codétenus le 12 août 1952 lors de la nuit des poètes assassinés. Il sera réhabilité en 1955.
[10] David Oïstrakh (né le 30 septembre 1908 à Odessa et mort le 24 octobre 1974 à Amsterdam) est l’un des violonistes parmi les plus réputés du XXe siècle.
[11] Piotr Kapitsa (9 juillet 1894, mort le 8 avril 1984) physicien soviétique très respecté, aussi pour son courage personnel. Ainsi lors de la « Grande purge » (1937-38), il parvint au péril de sa vie, à défendre ses collègues L. Landau et V. Fock menacés d’arrestation et de prison. Il fut lauréat du prix Nobel de physique de 1978.
[12] Sergueï Eisenstein (né le 22 janvier 1898 à Riga et décédé le 11 février 1948 à Moscou) célèbre metteur en scène soviétique, peut-être le plus connu en Occident, grâce à ses deux films » Le Cuirassé « Potemkine » (1925) et « Octobre » (1927). Il est toujours considéré comme le créateur des bases du montage cinématographique moderne.
[13] Lina Stern (née le 26 août 1878, morte le 7 mars 1968) professeur de physiologie, seule femme membre de l’Académie de Sciences de L’URSS. Elle est arrêtée au début de 1949 et condamnée à quatre ans d’emprisonnement. Elle est la seule des dirigeants du CAJ à survivre à la campagne antisémite de cette période.
[14] https://mabatim.info/2016/09/22/portrait-littraire-ilya-ehrenbourg/
[15] Vassili Grossman (né le 12 décembre 1905, mort le 14 septembre 1964 à Moscou). Au début de sa carrière, il était un écrivain soviétique fidèle à la ligne du parti qui peu à peu arrivera à dénoncer très durement le régime, surtout dans son roman Vie et destin. Pendant la guerre il était un correspondant de guerre parmi les plus lus par des soldats. En juillet 1944, il entra avec les soldats soviétiques dans Maidanek et dans Treblinka à peine libérés. Il fut ainsi le premier journaliste à décrire les camps d’extermination. Son récit L’Enfer de Treblinka servira de témoignage au procès de Nuremberg.
[16] « Le Livre noir ». (Translittération yiddish : Dos Shvartze Bukh). Titre complet : Le Livre noir sur l’extermination scélérate des Juifs par les envahisseurs fascistes allemands dans les régions provisoirement occupées de l’URSS et dans les camps d’extermination en Pologne pendant la guerre de 1941-1945) est un ouvrage élaboré sous l’égide du Comité antifasciste juif destiné à recueillir des témoignages et des documents sur l’extermination des Juifs et leur participation à la résistance armée dans les territoires de l’URSS occupés par l’armée allemande durant la Seconde Guerre mondiale. Le livre noir fut interdit en Union Soviétique et ses épreuves furent détruites. Mais Vassili Grossman réussit à cacher une version des épreuves chez un ami qui l’offrit à la fille d’Ilya Ehrenbourg, Irina, en 1970. Plus tard celle-ci parviendra clandestinement à la sortir de l’URSS. Le Livre noir sera publié en France en 1999 et en 2010 en Russie.
[17] Viatcheslav Molotov (né le 9 mars 1890, mort le 8 novembre 1986) homme politique et diplomate soviétique. Chef du gouvernement de l’URSS de 1930 à 1941, ministre des affaires étrangères jusqu’en 1949, (à ce titre, il signa le pacte germano-soviétique d’août 1939) membre titulaire du Politburo de 1926 à 1957, il fut considéré comme le bras droit de Staline, d’une fidélité indéfectible et ceci malgré l’arrestation de sa femme, Polina Jemtchoujina, en 1948. Il demeura un membre influent du Parti communiste de l’Union soviétique jusqu’à son éviction lors de la déstalinisation.
[18] La liste de treize personnalités assassinées est la suivante : Leib Kvitko, David Hofshtein, Itzik Feffer , Peretz Markish, David Bergelson, Veniamine Zouskine, Solomon Lozovsky, Boris Shimeliovich, Emilia Teoumina, Yossif Youzefovitch, Ilya Vatenberg, Léon Talmi, TchaykaVatenberg-Ostrovskaïa. Parmi eux, les cinq premiers étaient effectivement des gens de lettres, les autres étaient des journalistes, des traducteurs et des personnalités politiques.
[19] Veniamine Zouskine (né le 28 avril 1899, fusillé le 12 août 1952 à Moscou) fut l’un des acteurs principaux du Théâtre d’État Juif de Moscou et il assuma la direction du théâtre après la mort tragique de Michoels. Il joua aussi dans de nombreux films, y compris dans Les chercheurs du bonheur film de Vladimir Korch-Sabline (1900-1974), tourné en 1936. C’est un film de propagande, assez réussi par ailleurs, pour inciter des Juifs à partir pour le Birobidjan.