La Grande Marche du Retour marque le début d'une nouvelle campagne de défi des Palestiniens
Dans une approche remarquablement fraîche de leur résistance contre les sept décennies de colonialisme d'Israël, les Palestiniens se sont mobilisés en masse dans ce qui a été baptisé la Grande Marche du Retour. Dès le vendredi 30 mars, des milliers et des milliers de personnes se sont dirigées vers les foyers et les terres d'où elles ont été expulsées depuis 1948. Victimes d'expulsions et de nettoyage ethnique qu’Israël n'a jamais reconnu, malgré leur reconnaissance officielle par les Nations Unies, elles sont parfaitement fondées, en vertu du droit international, à retourner dans leurs terres et à réclamer ce qui leur appartient.
Même si le mois de mars a vu la commémoration du Jour de la Terre chaque année depuis 1976, cette année, il s'est développé de manière très créative. Le sentiment populaire partagé par les Palestiniens de la diaspora ainsi que par ceux des territoires étouffant sous l’occupation est simple: «Le retour à nos terres et foyers volés est légal selon le droit international et les résolutions de l'ONU.» La Grande Marche du Retour est donc une affirmation de ce droit inaliénable garanti par un nombre important de conventions internationales.
Les informations de Gaza révèlent qu'une réponse militaire agressive et hostile à des êtres humains exigeant ce qui leur appartient légitimement est maintenant en cours. Les fuites du QG de guerre de Benjamin Netanyahou ont fait état de menaces de tuer tout Palestinien qui ose s'approcher des barrières de l'apartheid - les fameuses «clôtures» - qui empêchent la population autochtone de rejoindre ses foyers et ses terres . Au soir du vendredi 30, 17 Palestiniens avaient été tués par des tirs israéliens, alors qu'ils n’étaient pas armés et manifestaient pacifiquement; des milliers d'autres ont été blessés.
Au grand dam d'Israël, la Grande Marche du Retour n'est pas prévue pour être un événement d'une seule journée. Pour ajouter au cauchemar de relations publiques d'Israël, la couverture médiatique va probablement revisiter les questions au cœur de cette manifestation populaire à travers une analyse approfondie et des images historiques de sa brutalité systématique.
Cependant, exprimer son mécontentement à travers les médias dominants et piquer sa crise - la réaction israélienne habituelle - n'aidera pas les campagnes de hasbara (propagande) du régime de droite. En fait, une telle réaction sera totalement contre-productive, comme le National Party, à l'apogée de l'apartheid sud-africain, l'a appris à ses dépens.
Il n’est pas possible de dissimuler la sordide réalité de l'imposition par le sionisme d'une entité étrangère - Israël - et les conséquences de la Naqba (catastrophe) de sa fondation en 1948, visibles dans les territoires palestiniens occupés –en 1967 et en 1948 - et les camps de réfugiés disséminés au Liban, en Syrie, en Jordanie et ailleurs, même avec des médias complaisants à la botte d'Israël. En outre, ce serait moralement répugnant d'essayer de le faire.
De plus, il serait tout aussi scandaleux et absolument honteux pour toute plateforme médiatique d'ignorer ou de minimiser l'énorme fardeau auquel sont confrontés les Palestiniens pour se libérer de l'oppression et parvenir à un semblant de justice. La Grande Marche du Retour est donc un défi pour les médias à se dissocier des récits fallacieux israéliens dont ils sont gavés par des campagnes de propagande bien dotées en ressources.
Cela nécessite un retour à la compréhension de l'énormité des pertes subies par les Palestiniens aux mains d'une entité coloniale raciste soutenue et encouragée par le gouvernement britannique il y a un siècle. Cela signifie revisiter des détails historiques notoires qui ne seront certainement pas flatteurs pour les puissances européennes qui ont joué un rôle central dans le nettoyage ethnique de la Palestine.
La Grande Marche du Retour est un défi pour ceux qui, dans les médias, ont été forcés à la soumission par l’intimidation de menaces de sabotage économique et d’accusations d’ «antisémitisme» au cas où ils passeraient la ligne rouge et se jetteraient dans la mêlée. Une vigoureuse introspection et des comptes-rendus courageux sur les raisons pour lesquelles les Palestiniens se sont lancés dans cette campagne de défi mémorable et pacifique devraient être la norme pour les journalistes qui ont à cœur leur propre intégrité et celle de leur profession.
Conformément à sa conduite irrationnelle, Israël a imposé une «fermeture» des zones palestiniennes pour les «vacances de la Pâque». En outre, le régime colonisateur a déclaré les terres adjacentes à la frontière de Gaza « zones interdites ». Le chef d'état-major des Forces de défense israéliennes a admis que «plus de 100 tireurs d'élite» des forces spéciales ont été déployés avec l'autorisation «d'ouvrir le feu»; on a déjà vu les premiers résultats meurtriers de leur savoir-faire.
L'organisation israélienne de défense des droits humains B'Tselem, connue pour avoir défié les violations des droits de l'homme sans crainte ni favoritisme, s'est inquiétée des menaces du régime de déchaîner une force meurtrière contre les manifestants. "Ignorant complètement la catastrophe humanitaire à Gaza et la responsabilité d'Israël dans celle-ci, ils affrontent la protestation planifiée en termes de risque de sécurité, profilant les manifestants comme des terroristes et désignant Gaza comme une « zone de combat » ".
Le nombre de morts s’est élevé, comme B'Tselem et d'autres organisations humanitaires avaient averti que ce serait le cas, et le bellicisme israélien a révélé son mépris flagrant du caractère sacré de la vie palestinienne et, de fait, des obligations de l'État en vertu du droit international.
La Grande Marche du Retour a le soutien de tous les partis palestiniens, dont le Hamas, le Fatah, le Front Populaire pour la Libération de la Palestine (FPLP) et le Jihad Islamique. La protestation devrait se poursuivre tous les jours jusqu'au 15 mai, 70ème anniversaire de la Nakba. Ses revendications trouveront un écho auprès des personnes éprises de justice dans le monde entier : les Palestiniens doivent pouvoir exercer leur droit légitime au retour à leurs foyers et à leurs terres d'avant 1948.
Iqbal Jassat اقبال جاسٹ
Traduit par Fausto Giudice
Iqbal Jassat est un membre fondateur du Media Review Network (Réseau d’examen des médias) à Johannesburg, en Afrique du Sud. Ses articles et analyses sont régulièrement publiés dans des médias traditionnels et alternatifs à travers le monde.
Merci à Tlaxcala
Source: http://mediareviewnet.com/2018/03/great-return-march-a-new-defiance-campaign/
Date de parution de l'article original: 30/03/2018
URL de cette page: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=23111