Teppaz pépouzes, notre choix de pépites en vinyle

On ne fera pas de top, on dira juste que c’est important… Miles Davis se fait coffret en mono chez Prestige, Airsouth sort son Ep, Léonie Pernet des remixes, Andres un album de hip-hop house, VP Records une compile de 82 titres de reggae. Bon, allez on vous en cause … 

Ne vous fiez pas à l’immonde pochette du coffret Craft, reprenant les enregistrements Prestige du premier quintet de Miles; le contenu fait plus que l’affaire. Avec une formation composée du pianiste Red Garland, du bassiste Paul Chambers, du batteur Philly Joe Jones et d'un saxophoniste ténor relativement méconnu nommé John Coltrane (qui remplace Sonny Rollins), l'ensemble est devenu le petit groupe jazz dominant de la fin des années 1950 qui a contribué à définir le hard-bop. Dans ses notes de pochette, Bob Blumenthal écrit : "Le Miles Davis Quintet entendu ici était le moyen pour Davis de saisir le moment où sa santé physique et ses concepts musicaux étaient en plein essor... C'est le groupe que Davis a organisé quand il voulait que ses enregistrements représentent plus que des instantanés de ses intérêts du moment." Gardez à l'esprit que même s'il s'agit d'un hard bop plein pot, il a en quelque sorte jeté les bases de la prochaine étape de l'exploration Miles/Coltrane de la musique modale et de Kind of Blue, avec l'ajout de Cannonball Adderley, altoiste, et d'une section rythmique différente, à l'exception de Jones, bassiste.
Ces sessions ont été enregistrées entre 1955 et 1956, donnant lieu aux albums classiques Cookin' (1957), Relaxin' (1958), Workin' (1959), et Steamin'(1961). Il y a aussi un bonus avec l'audio des apparitions du groupe à la radio et à la télévision et la première tranche de Miles : Le New Miles Davis Quintet (1956).
Parmi les faits saillants, mentionnons une interprétation de "'Round Midnight'' de Thelonious Monk, que Davis adopterait comme morceau phare, un solo de batterie brûlant de Jones sur "Salt Peanuts", l'utilisation exclusive de la sourdine Harmon mute sur les ballades intimes "My Funny Valentine" et "It Never Entered My Mind", le solo inspirant de Garland sur "If I Were a Bell" et une performance exceptionnelle de la section rythmique sur "Blues by Five". Légendaire est bien le mot … 

The Miles Davis Quintet - The Legendary Prestige Quintet Sessions - Craft Recordings

Le projet Airsouth est né en 2011, en plein boom de la génération Soundcloud et ses bedroom producers. Cette période voit ainsi naître toute une vague de producteurs électroniques à l’ADN similaire, dont M u r a M a s a, C a s h m e r e C a t, F a k e a r ou encore J u m o. Ces derniers inspirent Airsouth à affirmer un style riche en couleurs et en détails, qui tend plus vers l’exploration chirurgicale d’un son.
Je m’inspire de beaucoup de choses dans les rêves. Il y a quelques années, j’ai commencé à m’intéresser aux rêves lucides et donc aux techniques pour les déclencher, les maintenir, les maîtriser...Et ce qui se passe visuellement, je ne le retrouve nulle part au cinéma, c’est vraiment un monde indescriptible et très inspirant, c’est fait de sensations plus que d’images”.
Construit en trois ans et demi, évoluant au fil du temps et des idées, “Exhale” se présente comme une fenêtre ouverte sur les univers rêveurs du cinéma d'animation japonais, et les récits de science fiction technologique. Les morceaux qui le composent passent ainsi de l’introspection à la mélancolie, puis de la tension jusqu’au climax orchestral, à travers des mélodies d’ordinateurs, parfois humainement impossibles. Une belle découverte.

Airsouth - Exhale EP - Kowtow Records

De Crave, son album paru l’an passé, on n’a toujours pas fini de parler puisque il y a déjà un album de remixes et que Léonie Pernet éprouve le besoin de le prolonger d’un autre remix-EP de la meilleure eau. La multi-instrumentiste, batteuse, pianiste, arrangeuse et chanteuse n’en fait qu’à sa tête et c’est encore un sans faute. Elle n’en a rien à battre des registres puisqu’elle compose aussi bien classique, techno, que pop ou électro. Pour l‘instant, touchée par la grâce, on suit aveuglément.

Léonie Pernet - The Craving Tape - Cry Baby/ InFiné

Pour les oublieux, au temps de sa participation à Slum Village, Andres se faisait appeler DJez. Le quatrième album de la série d'albums éponymes du DJ et producteur de Detroit, qui a débuté en 2003 avec Andres, est une synthèse émouvante de ses racines house et hip-hop. Sorti sur le label Mahogani Music de Moodymann, cet album de 18 titres se profile comme un DJ set , avec changments de tempo et d'ambiance au fur et à mesure que l'album évolue.

Après le départ afrobeat de "Back in the Old Times", Andres se lance dans la techno par le biais du synthé "Learn 2 Love (Yoruba Love Dub)", qui est un mélange d'influences jazzy sur "Jungle Pain" et d'un motif piano aux accents sensuels sur "Waist Deep", une véritable bombe de basse P-Funk. Un peu à l’image du set pour Mixmag montré plus haut, ça groove, ça pousse et n’oublie jamais ses racines. On l’aime aussi pour ça . Top !

Andres - Andres IV - Mahogani Music

VP Records' Down in Jamaica est une copieuse carte de visite (82 titres) de la production du label deVincent et Patricia Chin, dont la trajectoire a été synonyme de celle du reggae dancehall lui-même. Lancé dans un glacier du centre-ville de Kingston, le commerce initialement appelé Randy's Records est passé d'un guichet unique pour la cire locale à un studio d'enregistrement coté et au plus grand label de reggae indépendant au monde ; après que les Chins se soient installés en Jamaïque, dans le Queens, à la fin des années 1970 et se soient tournés vers les marchés étrangers. Au fil des ans, VP est devenu le premier distributeur international de musique jamaïcaine. Peu de labels ont joué un rôle aussi central dans l'ère du reggae moderne, documentant la montée en force des deejays rappeurs et des riddims numériques, et au XXe siècle, en acquérant son rival Greensleeves, en 2008. Cette sélection se distingue par sa représentation de l'évolution du dancehall, la relation du genre avec la scène "roots and culture" et la persévérance du reggae en tant que sentiment, style et marque d'une nation. Tout ne vaut pas ici, certains titres ayant pris de l’âge avec les tics de production afférents, mais ça mérite quand même.

VA. - Down in Jamaica - 40 Years of VP Records - VP Records

Jean-Pierre Simard le 10/12/19

The Miles Davis Quintet - The Legendary Prestige Quintet Sessions - Craft Recordings,
Airsouth - Exhale EP - Kowtow Records,
Léonie Pernet - The Craving Tape - Cry Baby/ InFiné,
Andres - Andres IV - Mahogani Music,
VA. - Down in Jamaica - 40 Years of VP Records - VP Records