La tristesse hypermoderne de l'homme des bois

Construite par le designer Piet Hein Eek pour le musicien Hans Liberg, cette cabane à Hilversum, aux Pays-Bas, est la synthèse ultime d'un vieil adage: "Pour vivre heureux, vivons cachés", et du désir moderne de retourner vivre dans les bois, avec assez d'électricité et de connectivité pour y installer un studio de musique, mais, d'un autre côté, sans vie, ni tribu autour, pour se protéger. D'où l'option camouflage de cette cabane de rondins déguisée en stère de bois. L'idée est plastiquement belle - elle n'est pas mal, cette maison invisible. Mais on ne peut s'empêcher d'y trouver aussi la marque d'une tristesse. Celle de l'envie, autant que de la peur, d'être seul. Y-a-t-il seulement une cheminée, pour faire de tout ce bois un feu autour duquel rêver? Il semble que l'angoisse atavique de trahir sa présence par la fumée (très fantasmatique aujourd'hui) ait subliminalement barré cette possibilité. Il est donc remarquable que l'homme des bois hypermoderne ne connaisse pas la chaleur du foyer.