Testosterror et l'avenir mal barré du crétin masculiniste par Luz
Tout allait bien, comme d’habitude, chez les masculinistes quand, soudain, déboula le rubula12 . Et la testostérone de filer au fond des godasses par une attaque des testicules. Ô rage ô désespoir sur la planète des forts (marris) en coucougnettes. Grand et fin délire signé Luz. On recommande !
Alors c’est l’histoire de Jean-Patrick Boulard, ah oui je vous avais prévenu, on ne va pas donner dans la délicatesse, il vit dans une ville qu’on devine moyenne, il est patron d’une concession automobile où il vend évidemment des gros SUV, il aime la charcuterie, les perceuses, la salle de sport, la sieste et ses copains, mais aussi accessoirement sa femme, et ses trois enfants, à qui il tente d’inculquer un précepte que son père avant lui martelait : en toutes circonstances sortir “la boîte à couilles.” Sauf qu’un jour tout bascule, il est un des premiers atteints par l’épidémie de “rubula 12”, qui contraint le président Macrinion à décréter la fermeture des bars, des stades, des salles de sport, et aussi l'interdiction des poignées de main, pour protéger les hommes.
C’est sans doute ce qu’il y a de plus drôle et de plus intelligent, cette assimilation entre la crise de la masculinité et l’épidémie de Covid-19, qui donne au récit une trame narrative et médicale très convaincante : on suit avant tout l’état d’un patient type, Jean-Pat’, dont le taux de testostérone réduit considérablement, et qui donc s’adoucit, doute de plus en plus de lui-même, sombre dans la dépression, et à qui un médecin affreux prescrit, je cite “un porno le matin, un Rambo le midi, un Schwarzy le soir.” C'est cette bonne idée, qui sous-tend un récit dense, comme c’est souvent le cas chez Luz. Un récit qui multiplie les personnages, les détails sur la page, un album faussement foutraque et en fait très tenu.
Testosterror est d’un point de vue de l’écriture un objet impressionnant, foisonnant, comme Luz sait en faire, et dont le plus fin et singulier humour réside certainement dans les détails à chercher en périphérie du récit principal, petites unes de journaux glissées ici-et-là, bandeaux défilants de chaîne en continu à la marge d’une page, comme celle-ci que je vous cite en conclusion, “le Pape invite tous les fidèles à se serrer les cou…” fin de la case.
Jean-Paul Camisole le 23/10/2023
Luz - Testosterror - Albin Michel