Echos d'un passé non révolu : Don Cherry et Tomaga
Profitons du week-end qui approche pour célébrer des défunts qui n’en ont jamais fini de faire écho à une musique sans limite qui se trouve aussi bien dans le spiritual jazz allemand actuel que chez les regrettés Don Cherry des 70’s et actuels Tomaga, dont la moitié a disparu l’été dernier. Livraison, sans prise de tête garantie à l’heure où le pavé résonne des cris des uniformes.
Tout d’abord, ouvrons le ban avec deux albums perdus de Don Cherry - The Summer House Sessions et Organic Music Theatre : Festival de jazz de Chateauvallon 1972 à paraître chez Blank Forms en juin.
The Summer House Sessions a été enregistré en Suède durant l'été 1968, après que l'ingénieur du son Göran Freese ait invité Don, les membres de ses deux groupes de travail et un batteur à Kummelnäs pour une série de répétitions et de jam-sessions. L'album était présumé perdu, jusqu'à ce que des enregistrements des sessions soient récemment redécouverts dans les voûtes des Archives suédoises du jazz.
Puis, en 1972, les Cherrys dévoilent leur projet Organic Music Theatre, qui englobe la musique de Don, l'art de Moki, ainsi que des éléments de leur vie familiale. Ils font leurs débuts avec le projet Organic Music Theatre au Festival de jazz de Chateauvallon, qui a lieu la même année dans le sud de la France. Se produisant avec les New Researches de Don Cherry - un groupe comprenant Don et Moki, Christer Bothén, Gérard "Doudou" Gouirand et Naná Vasconcelo, le groupe a été rejoint sur scène par des membres du public et une troupe de marionnettes, tandis que les tapis et tapisseries faits main de Moki ornaient le décor. Un album qui a construit en partie la légende de Chateauvallon, le festival dans la pinède au dessus de Toulon. Une musique de voyage autant que voyageuse.
On y croit toujours à peine à la triste disparition de Tom Relleen en août dernier. Et pourtant, c’est ainsi. La moitié du duo Tomaga qu’il a formé avec la percussionniste Valentina Magaletti aura laissé un vide que pas grand chose pourra combler. Au lieu de passer à nous lamenter de son triste sort, il est temps de célébrer une ultime fois son génie avec le chant du cygne du nom de Intimate Immensity.
Tomaga, c’est fini. Mais fort heureusement, le duo prouve qu’ils possèdent toujours autant d’inventivité avec leur sublime mélange entre trip-hop et krautrock du futur. Entre les claviers hyperactifs et percussions joueuses, jamais la musique du duo n’aura sonné aussi brillante qu’auparavant notamment à l’écoute des morceaux analogiques tels que l’obsédant « Idioma » qui ouvre cet ultime disque mais également des passages plus ludiques tels que « Mompfie Has To Say », « The Snake » ou bien encore « More Flowers » qui, elle, étonne pour son étrange beauté.
Définitivement ambitieux, Tomaga arrive à faire parler leurs excentricités musicales si peaufinées et détaillées sur les percussions fiévreuses de « The King of Naples » et les saveurs acoustiques de « British Wildlife ». On pourra également compter sur la présence angélique de Cathy Lucas de Vanishing Twin qui pousse des vocalises sur « Very Never » avant que le duo ira clôturer cette ultime messe avec le morceau-titre qui est à l’image de leur inventivité sans faille. Intimate Immensity sera le dernier chapitre d’un duo qui aura redéfini les codes du trip-hop expérimental et du krautrock futuriste aux arrangements finement construits.
Du premier au second, comme un passage de témoin avec, d’un côté les rémisses d’une musique à venir entre jazz, world et impro et - de l’autre - la pulsion élctro actuelle qui, sans partir des mêmes bases joue une partition similaire. On vote pour l’expension de la conscience par une mlusique non mimétique. C’est dit !
Jean-Pierre Simard le 21/02021
Don Cherry - The Summer House Sessions et Organic Music Theatre : Festival de jazz de Chateauvallon 1972 - Blank Forms
Tomaga - Intimate Immensity - Hands in the Dark