Librairie musique funk avec la redécouverte de Giuliano Sorgini
L'album a été publié à l'origine en 1980 par le label assez obscur Goldfinger, pour tomber rapidement dans l'oubli le plus total et devenir une chose plus fantasmée que réelle. Le retour de Lavoro e tempo libero de Giuliano Sorgini reste une chouette (re)découverte.
Comme les rééditions actuelles le prouvent, l'âge d'or de la musique de bibliothèque italienne est plein de grandeur. Et parmi ces archives largement oubliées, le trésor perdu et trouvé de Giuliano Sorgini, Lavoro E Tempo Libero, brille de tous ses feux. Lavoro E Tempo Libero a connu ce malheureux destin, même si Sorgini a composé des classiques cultes tels que Zoo Folle, Under Pompelmo et The Living Dead at the Manchester Morgue - sans parler du travail sous le nom de Raskovich, aux côtés de la légende de la bibliothèque Alessandro Alessandroni (alias Braen).
Sonor Music Editions vient de ressortir l’album du néant - avec, en prime, une remasterisation de premier ordre et des œuvres d'art réimaginées. Traduit par Travail et temps libre, Lavoro E Tempo Libero incarne ces deux opposés - ce que Sorgini lui-même explique comme étant son intention, dans les notes de la réédition. Comme on pouvait s'y attendre, cela donne lieu à une expérience d'écoute variée, qui crée une tension musicale intense et une relaxation totale. Pour nous mettre au travail, il y a une série de shakers funkés comme "Produzione Intensiva" et des exercices de rock motivants comme "Ciclo Continuo". Et si l'on considère la période de l'album, l'aube des années 80 apparaît à plusieurs reprises, Sorgini saluant souvent la culture yuppie de l'époque avec des numéros de guitare très aigus et sordides.
Parfois, cependant, cela passe aussi par des morceaux de proto hip-hop fascinants, comme "Ingranaggi Pesanti", un album très rythmé et inondé de réverbérations, qui fait sonner Lavoro E Tempo Libero avec des années d'avance sur son temps. Mais alors que ces moments plus difficiles voient Sorgini faire preuve d'une grande créativité, c'est le "temps libre" du disque qui vole souvent la vedette. Avec Nino Rapicavoli à la flûte, Sorgini nous livre quelques-uns de ses actes musicaux les plus aérés et les plus appropriés au lounge, tels que le voyage funk décontracté "Lavoro Cerebrale" et le flirt reggae "Curiosità" - un morceau qui démarre avec une mélodie de guitare muette que Dr Dre tuerait pour avoir. Chaque fois que l'album va trop loin dans le travail, il y a toujours des eaux calmes au coin de la rue pour faire redescendre le tout. Lavoro E Tempo Libero est une œuvre fascinante, qui prouve que Sorgini est un véritable maestro de la bande son, autant en 1980 qu'en 2020.
On rappelle aux oublieux que Bob Sinclar se servant des BO de Carpenter ou Howie B. démarrant sa carrière de producteur dans un studio londonien de musique au mètre; il est plus que temps de rendre hommage à ce genre mineur, à l’origine d’une des constante du trip-hop. C’est dit, amusez-vous au travail et tout ira bien …
Jean-Pierre Simard le 17/04/2020
Giuliano Sorgini – Lavoro e tempo libero - Sonor Music Editions