Arthur Russell inédit, avec des chansons de cowboy, mais pas que…
On doit la redécouverte d’Arthur Russell, depuis dix ans, à deux personnes, son ex-copain Tom Lee et Steve Knutson d'Audika Records, qui ont compilé plusieurs albums à partir d’archives inédites. Après “World of Echo” et ses partitions contemporaines, voici qu’arrive “Iowa Dream” qui dévoile encore d’autres facettes : le garçon de l'Iowa, le mystique disco, l'auteur-compositeur-interprète et compositeur, et le perfectionniste féroce au fond d'un monde d'écho.
Ne pas avoir voulu rejoindre les Talking Heads ne l’a pas empêché de collaborer avec d’autres pointures de la scène new-yorkaise puisqu’il a croisé la routes de : Ernie Brooks, Rhys Chatham, Henry Flynt, Jon Gibson, Peter Gordon, Steven Hall, Jackson Mac Low, Larry Saltzman, et David Van Tieghem. Ici, Peter Broderick apporte une touche contemporaine à cette liste puisque, plus de quarante ans après que Russell ait quasi finalisé plusieurs chansons, ce dernier a travaillé avec Audika pour les compléter, en a effectué la restauration audio et le mixage additionnel.
Mais ce ne sont pas les seules curiosités ici dévoilées car, l’album dévoile les maquettes qui l’ont vu flirter avec un quasi succès populaire pour de gros labels - d'abord en 1974, avec Paul Nelson de Mercury Records, puis en 1975, avec le légendaire John Hammond de Columbia Records. Des rendez-vous manqués avec l’histoire…
À la fois kaléidoscopique et intime, Iowa Dream est l'une des œuvres les plus personnelles de Russell, y compris avec des titres folk récemment découverts, titres écrits pendant son séjour en Californie du Nord, au début des années 1970. Pour Russell, l'Iowa n'a jamais été très loin. “ Je vois, je vois, je vois tout ", chante Russell sur la chanson titre : des maisons rouges, des champs, le maire de la ville (son père) en train de défiler à vélo dans sa ville natale. La maison d'enfance et la famille de Russell font aussi écho à travers " Just Regular People ", " I Wish I had a Brother ", " Wonder Boy ", " The Dogs Outside are Barking ", " Sharper Eyes " et " I Felt ". Pendant ce temps, des chansons comme'I Kissed the Girl From Outer Space','I Still Love You','List of Boys' et 'Barefoot in New York' pétillent de grooves pop et dance, témoignant de la dévotion de Russell aux scènes avant-gardistes et disco de New York. Enfin, " You Did it Yourself ", connu seulement via un court clip noir et blanc du documentaire Wild Combination de Matt Wolf, offre une nouvelle version avec un rythme funk entraînant et la voix extraordinaire de Russell.
Sur Iowa Dream, on entend clairement un enfant de la campagne partir à la rencontre du monde et, sans rien perdre de ses rêves, y poser tous ses jouets pour permettre aux autres de communiquer avec lui. Le problème étant qu’il en trouvera du côté musique, mais que côté business, ce ne sera jamais le cas…
Jean-Pierre Simard le 15/11/19
Arthur Russell - Iowa Dream- Audika Records