Chris Carter dans ses œuvres : chimie leçon #1

Débarquant encore une fois sur un terrain où on ne l'attendait que très peu Chris Carter enchante avec son électro minimaliste qui va fouiller dans les sons sans jamais dépasser les titres de trois minutes. Encore! 

TG:  Sleazy, P-Orridge, Cosey Fanni Tutti et Carter à droite

Figure majeure du panthéon des musiques électroniques, Chris Carter s'est d'abord fait connaître au sein du très expérimental et avant-gardiste (en registre visuel et musical) groupe industriel Throbbing Gristle, aux côtés de Peter Christopherson (Coil), Genesis P-Orridge (Psychic TV) et Cosey Fanni Tutti, avec laquelle ( photo d'ouverture) il continue à œuvrer au sein de Chris & Cosey. En dehors de cela, Carter produit de manière erratique des albums solo.

Le premier date de 1980, The Space Between, un vrai album no wave qui a servi de base à pas mal d'autres pour édifier les bases d'albums expérimentaux ambient à venir. Son dernier envoi, Small Moon datait de 1999, et empruntait les voies du downtempo et de l'abstract ambient pour faire évoluer ses recherches personnelles. 

 

20 après Small Moon, Chemistry Lessons Volume 1 est une tentative de globalisation du son électronique que Carter avait commencé avant le décès de son compère Peter Christopherson, qui garde la marque de sa présence/absence et influence le son produit en 25 étapes, comme autant de titres pour l'impact final.

Chemistry Lessons Volume 1 s'avère assez différent de Small Moon, dans le sens où il s'exprime dans la brièveté et la condensation musicale, à l'inverse des ses habituelles méthodes qui laissent la bride à l'improvisation sur de longs développements. Chaque titre vaut pour lui-même, et dès la fin, on passe directement à autre chose. Chacun apportant sa pierre à l'édifice et construisant un concept sensé et défini à la fin. 

Ce grand œuvre qui prend en compte toutes les composantes de l'électronique nous emporte dans son trip évolutif qui démarre avec “Blissters”, un morceau dance des origines qui se poursuit avec d'autres pistes plus hallucinées voire psychédéliques comme sur “Pillars of Wah”,ou  “Post Industrial” qui joue d'une approche plus dark.  

Au fil de l'album, celui-ci mute continuellement, passant sans encombre de la dance au plus noir dessein industriel pour tenter d'en proposer autant d'approches que de recherches par morceau:  “Corvus” et “Tones Map” se posant à des années lumières des sons offerts sur “Blissters”, et creusant le filon des sonorités que Carter a mis au point au fil des ans, poussant jusqu'à l'acide sur “Noise Floor”.

Chemistry Lessons Volume 1 s'avère donc comme un condensé de l'histoire de la musique électronique par un de ses concepteurs qu'il faut écouter en continu pour en saisir les subtilités et l'étendue du terrain parcouru qui voit défiler d'assez affolants paysages sonores d'Ars Vetus jusqu'aux très noir labyrinthes de “Modularity” et la science-fiction à l'œuvre sur “Lab Test”. Grand œuvre, on a dit, on confirme !

Jean-Pierre Simard le 10/04/18

Chris Carter Chemistry Lessons Volume 1 Mute Records (1CD/2LP)