Au risque de la cuisson, les céramiques de Tschiember et Armleder

Les œuvres en céramique que présentent Armleder et Tschiember ont été réalisées au Centre d’expérimentation et de réalisation en céramique contemporaine de la Haute École d’art et de design à Genève, à partir d’une sélection de moules, datant du XIXe siècle à nos jours.  En 2013, Morgane Tschiember y avait réalisé les Shibaris, sa première série d’œuvres, représentative de son expérimentation des matières. La session d'émaillage des œuvres s’appuie, quant à elle, sur les expérimentations de la couleur de John M. Armleder, à l’image de sa série de peintures iconique Coulures, en référence, notamment, à l’œuvre de Larry Poons.

John M Armleder et Morgane Tschiember, CERCCO (Centre d’expérimentation et de réalisation en céramique contemporaine de la Haute École d’art et de design — Genève (HEAD)), novembre 2017.© HEAD-Genève, N. Schopfer.

EspècesTea time : une rencontre entre Morgane Tschiember et John M Armleder. Règlement en espèces d’une addition ornée de minuscules étoiles. Après le salon de thé, la galerie. Un papier peint rose pailleté recouvre les murs du white cube. Ni Tschiember ni Armleder n’ont l’âme à s’émouvoir d’un destin décoratif de l’art. Sur le papier peint bubble gum, une constellation de motifs argentés, prenant tour à tour des allures de cibles, avec lesquelles il n’est pas facile de mettre dans le mille, et de croix résultant de l’agrandissement, de la déformation et de la pixellisation des étoiles de la facture. Le prix du display. Un papier peint a, au fond, toujours la possibilité de n’être que le décor de lui-même. Ici, tel n’est pas le cas.

John M Armleder et Morgane Tschiember, CERCCO (Centre d’expérimentation et de réalisation en céramique contemporaine de la Haute École d’art et de design — Genève (HEAD)), novembre 2017.© HEAD-Genève, N. Schopfer.

Dans l’espace, entre les murs roses, des céramiques trônent sur un podium, rappelant les marches d’une piscine. La peinture n’est pas, comme à l’ordinaire, sur les murs mais sur ces Espèces. Ses coulures, qui n’ont plus pour objet d’exprimer son être profond, se contentent d’orner les vases. Deux artistes, deux céramiques. C’est en effet par paires que celles-ci se présentent à nos regards et qu’elles ont été produites, selon la technique de l’estampage au moule. Les moulages ont été cuits en couple et les liens qui les attachaient les uns et les autres se sont désintégrés durant la cuisson, en laissant de bien curieuses traces.

John M Armleder et Morgane Tschiember, CERCCO (Centre d’expérimentation et de réalisation en céramique contemporaine de la Haute École d’art et de design — Genève (HEAD)), novembre 2017.© HEAD-Genève, N. Schopfer.

Dans le four, quelque chose a dû survenir car les deux artefacts n’en sortent pas dans le même état : l’un est impeccablement cuit ; l’autre est brisé par endroits. De quel conflit ces paires disparates pourraient-elles être l’allégorie ? Essayez de répondre. Peintures sur céramique et papier peint. Artisanat de haute lutte et science du display. Les Espèces ornent-elles le papier peint ou le second sert-il de décor aux premières ? Tout est décidément possible — quand John rencontre Morgane.

Morgane Tschiember, CERCCO (Centre d’expérimentation et de réalisation en céramique contemporaine de la Haute École d’art et de design — Genève (HEAD)), novembre 2017.© HEAD-Genève, N. Schopfer.

Maxime Duchamps avec Marjolaine Lévy le 20/12/17 

John M Armleder / Morgane Tschiember En affinité(s) #5 → 20/01/18

Galerie Loevenbruck 6, rue Jacques Callot 75006 Paris

 

John M Armleder, CERCCO (Centre d’expérimentation et de réalisation en céramique contemporaine de la Haute École d’art et de design — Genève (HEAD)), novembre 2017.© HEAD-Genève, N. Schopfer.