Avec Médéric Collignon, le cinéma biche

Je me suis amusé à pêcher au fur et à mesure de mes recherches certains thèmes de plusieurs compositeurs tels que L.Schifrin, D.Shire ou encore Q.Jones. Ils sont tirés des films tels que "Dirty Harry", "Sudden Impact", "The Taking Pelham 1,2,3", "Brubaker" et "Dollars". Je les ai arrangé pour le Jus de Bocse qui mêlera "jeu de scène" et scènes de films. Le son se voit et l’image s’écoute...   Médéric Collignon

 

Tarass Boulba de la voix, il y excelle plus loin que nombre de vocalistes jazzeux qui préfèrent le beau à l'aventureux, avec une technique qui scatte ou se sert de beatbox pour atteindre des suraigus claquants. Athlète du cornet ( avec plusieurs boules), Il joue aussi du double cornet, de la trompette à coulisses, du bugle, ainsi que des claviers, des percussions électroniques, ou de simples jouets.

Après un parcours qui démarre à l' Orchestre National de Jazz avec Paolo Damiani puis Claude Barthélémy, il rejoint le Jazztet de Bernard Struber, le Sacre du Tympan de Fred Pallem, le New Lousadzak de Claude Tchamitchian, puis le MegaOctet d'Andy Emler de 2004 à 2009, avant de monter son Setpik ensemble, puis deux formations en quatuor de Jus de Bocse. Cela, sans oublier les participations à tout projet aventureux qui se présenterait dans les domaines de la musique, de la danse ou du théâtre. Grand dynamiteur d'aqueduc musical, il n'aime rien tant que relire à sa manière les inconnus dignes de ce nom ou les standards qu'il réactualise de biais.

Alors, alors s'être attaqué à Ennio Morricone avec le Septik pour Il était une fois la ré-solution en septet, à mains nues à Georges Gershwin, et Miles Davis, en version classique ou électrique, et en deux parties comme autant d'albums, puis à King Crimson ( A la recherche du roi frippé) le voilà en 2016 qui veut féminiser (un peu),  ou du moins renverser les images machistes qui défilaient dans les films américains et les polars de son adolescence pour un tonitruant ( gag, on parle de polars, vous noterez !) MoOvies.

Cela n'a pas l'air comme ça, mais il s'agit de repousser encore les limites qu'avaient déjà franchies les compositeurs d'excellence du genre Quincy Jones, Lalo Schiffrin ou David Shire en inventant des titres qui allaient déboucher sur le jazz électrique des Headhunters de Herbie Hancock ou des années électriques de Miles Davis. Alors oui, plus de trente ans sont passés, et on peut aujourd'hui les dire ( ces compos) comme du patrimoine, dans l'oreille. C'est là tout le bonheur de la bande du Médéric qui s'en empare - et réussit même à caler des exercices de double chant de gorge mongols (comme sur le dernier Frank Zappa sorti dernièrement Dance Me This) pour faire monter une puissante mayo qui tient bien en place. On y entend bien sûr des extraits de dialogues des films employés pour introduire les titres ou même des zikos employés à contre-emploi avec le batteur à la guitare ou Médéric au tambourin. Et hop, un épique de groove de plus à son apanage. C'est MoOvies, et c'est bien.  

Jus de Bocse - Médéric Collignon MoOvies
(Just Lookin/Harmonia Mundi)