Harry Callahan recadre Aix-en-Provence en 1958

À propos de ce voyage, le premier qu’il entreprit à l’étranger, il déclara : “Je sais juste que, d’une manière ou d’une autre, l’Europe a eu sur moi une influence décisive.”

En 1956, Harry Callahan (1912-1999) dirigeait le département de photographie de l’Institute of Design de Chicago. Il reçut une bourse de la Fondation Graham pour le projet de son choix.  Callahan prit une année sabbatique en Europe avec sa femme Eleanor et sa fille Barbara, alors âgée de sept ans. Après deux mois en Allemagne, il va séjourner à Aix-en-Provence de septembre 1957 à juillet 1958.

Le dépaysement est total pour l'Américain qui n’a jamais quitté le nord des États-Unis. Découvrant pour la première fois l’Europe et le pittoresque de cette bourgade française, Harry Callahan donne à voir, dans les images réalisées à Aix-en-Provence, la même rigueur et les mêmes préoccupations esthétiques que celles prises précédemment à Chicago et dans le Middle West : son rapport à la ville et à l’architecture, ses photos de rues dont les silhouettes furtives sont le plus souvent féminines, son approche minimaliste de la nature et, bien sûr, la présence constante d’Eleanor, son épouse.

Callahan ne s’intéresse ni à la riche architecture d’Aix-en-Provence ni à son patrimoine historique, mais trouve dans ses rues, ensoleillées même en hiver, le théâtre idéal pour ses recherches sur l’ombre et la lumière et le graphisme des façades ordinaires.
Ses images produites à Aix-en-Provence constituent l’un des rares cas où un maître de la photographie américaine se confronte, dans les années 1950, au décor d’une petite ville européenne avec ses rues étroites et ses modestes boutiques, gardant une distance certaine face aux habitants de la cité. Il se dégage des French Archives une poésie froide et distanciée sans aucune nostalgie.


Quant aux études de nature, elles ont pour certaines été réalisées dans le jardin de la maison qu’il occupait sur la route de la montagne Sainte-Victoire, chère à Cézanne. Callahan y poursuit son approche minimaliste du paysage, privilégiant les motifs resserrés, et prolongeant ses recherches expérimentales et formelles – Callahan a enseigné à l’Institute of Design de Chicago, émanation du New Bauhaus de Moholy-Nagy qui l’avait engagé en 1946 –, en utilisant pleinement les ressources du médium photographique pour traduire ses propres sensations. Il avait déjà réalisé des surimpressions, mais la symbiose entre les paysages de Provence et le corps d’Eleanor fut pour lui une véritable révélation et il s’attacha à en décliner de multiples variations. Interrogé sur ces images, Harry Callahan a répondu que chaque fois qu’il regardait le paysage, il pensait à Eleanor.

Harry Callahan French Archives 9/11 ->>29.01.2017
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