Avec Carl Andre, moins c'est beaucoup plus
En tâtonnant à partir de quatre concepts, la platitude, la sculpture comme lieu, la composition modulaire et l'emploi de matériaux bruts, Carl André a révolutionné l'art du XXe via la sculpture et le land art - par son minimalisme. Mais ce n'est pas tout car, on découvre seulement sa poésie…
L’exposition Carl Andre – Sculpture as place, 1958-2010 envisage le spectre de son œuvre et en révèle la cohérence, en présentant aussi bien une quarantaine de sculptures monumentales, de nombreux poèmes, des photographies, que des œuvres sur papier ou des objets inclassables. Les pièces iconiques côtoient des éléments jamais réunis, comme ses Dada Forgeries. Acteur principal du minimalisme (avec Donald Judd et Robert Morris), Carl Andre est aussi associé à l’art conceptuel et au Land art et apparait aujourd’hui comme l’un des plus grands sculpteurs du XXe siècle.
Cette rétrospective révèle comment, à partir d’éléments standards, de matériaux industriels bruts, l’artiste redéfinit la sculpture comme un lieu d’expérience de l’espace, de la forme et de la matière. Carl Andre a également composé nombre de poèmes en employant les mots pour leur valeur aussi bien sémantique et sonore que visuelle. L’apparente simplicité des œuvres remet en jeu les notions traditionnelles de technique, de composition, d’installation où le visiteur est partie prenante de l’œuvre.
Arrivé à New York en 1957, Carl Andre s’essaie à la poésie et réalise ses premières sculptures de petit format. Il s’intéresse rapidement aux propriétés de la matière : forme, poids, surface. Dès 1965, il emploie des éléments industriels qu’il assemble lui-même : bois, métaux, briques, bottes de foin, en relation avec les lieux où il expose. L’artiste n’a de cesse depuis de réagir aux espaces proposés par les galeries, musées, villes. Il travaille avec les éléments qu’il trouve sur place, assemble ce qu’il peut manipuler seul, réalise des ensembles à la fois très présents et en même temps si intégrés aux espaces qu’ils semblent avoir toujours été là.
Avec Carl Andre, l’œuvre d’art change de statut : elle n’est plus un élément symbolique ou figuratif, mais un objet réel qui fait partie du monde, au même titre qu’un arbre ou un mur. Au cours des années soixante, l’artiste a évolué dans sa conception de la sculpture, d’abord comme forme, puis structure et finalement comme un lieu (« sculpture as place »). « J’ai des désirs; je n’ai pas d’idées. C’est pour moi un désir physique de trouver le matériel et un lieu où travailler » (entretien de l’artiste avec Marta Gynp, 2015).
Cette première exposition consacrée à Carl Andre en France depuis vingt ans (la dernière ayant eu lieu au musée Cantini à Marseille en 1997), correspond à la politique du Musée d’Art moderne de relecture des grands artistes fondateurs de la modernité. Commissaires : Sébastien Gokalp, Yasmil Raymond et Philippe Vergne.
Carl Andre: Sculpture as place 1958-2010*--> 12/02/17
Musée d'Art moderne de la Ville de Paris 11, avenue du Président Wilson 75116 Paris