Rituel de purification par Peter Perret

Que Peter Perrett soit encore en vie après les décennies de mauvaises habitudes qu'il s'est infligées peut sûrement surprendre ceux qui ont suivi sa carrière depuis le milieu des années 70. S’il y a eu d’abord England's Glory, puis les exquis Only Ones et, plus récemment, une carrière solo clignotant par intermittence, toutes ces occurrences ont produit des hymnes brûlants à propos des bas-fonds de la société.

À 72 ans, Perrett est sans doute l'incarnation de l'adorable canaille qui en est à son troisième acte, et le fait qu'il produise encore des disques de la qualité coupable de The Cleansing est tout simplement miraculeux, d'autant plus qu'il s'agit d'une de ces bêtes rares - un double album qui ne nécessite pas d'édition lourde. Bien sûr, il y a plus qu'une suggestion d'un Lou Reed du sud de Londres dans ses récits ironiques et narcotiques, où non seulement ses fils Jamie et Peter Junior fournissent le poids musical derrière la voix charismatique de Perrett, mais aussi des apparitions d'invités comme Johnny Marr, Carlos O'Connell de Fontaines DC et Alice Go de Dream Wife - sans oublier l'éternel fanboy du rock'n'roll, Bobby Gillespie. Cependant, les morceaux présentés ici sont bien plus qu'un retour sur des gloires passées et le sens de l'humour noir de Perrett transparaît à chaque ligne. Il enchante là ou Gros Bob nous ennuie profondément… 

Sur "I Wanna Go with Dignity", il proclame que "si je dois me jeter sous un train, j'attendrai après Noël", tandis que sur "Secret Taliban Wife", il admet qu'"elle m'a envoyé des vidéos sur WhatsApp. Je suis pris au piège". Inévitablement, on retrouve aussi le cynisme narquois caractéristique de Perrett, qui prévient que "rien n'est risqué, rien n'est perdu" sur la chanson-titre et que "vous ne voyez pas qu'ils ne prennent plus leurs médicaments" sur le foudroyant "Survival Mode". A travers ces chansons sur l'art, l'addiction et le vieillissement, Peter Perrett reste assurément le poète officiel du romantisme sombre et distancié et The Cleansing est un nouvel ajout à une carrière musicale qui n'a jamais été à la mode, mais qui a souvent été le dernier mot en matière de fraîcheur. On a bien dit Romantisme sombre et distancié, pas gothique en sneakers qui ramasse la thune en s’auto-parodiant. C’est dit, achetez-le - même si c’est en souvenir de Lou Reed qui, lui est mort depuis belle lurette.

Jean-Pierre Simard, le 4/11/2024
Peter Perrett - The Cleansing - Domino