Macron a fait tomber le tabou de la répression des classes moyennes. Avec quelles conséquences ?
Ce qui distingue le mouvement social de 2020 de ceux qui l'ont précédé, c'est l'implication des "classes moyennes" que le gouvernement a eu l'imprudence de ne pas imaginer pouvoir un jour monter en première ligne contre lui, et encore moins manifester aux côtés des travailleurs : chercheurs, enseignants, travailleurs de l'Opéra de Paris, de la Comédie française ou de la Bibliothèque nationale, avocats, chefs de service hospitalier, internes en médecine etc.
Désorienté, ne sachant quoi faire d'autre, par habitude ou parce qu'il a fini par en prendre son parti, se sachant de toute façon de plus en plus minoritaire; il fait ce qu'il fait désormais tout le temps : appeler le 17, envoyer la police. Laquelle fait à son tour logiquement ce à quoi elle est désormais employée tout entière à plein temps (brigades anti-banditisme comprises): matraquer, gazer, arrêter les contestataires. Le lycéen, l'invalide, le retraité, le syndicaliste, l'enseignant, l'opposant. Ceux de "l'autre camp" (merci au préfet Lallement d'avoir dit tout haut les consignes et les pensées de ses employeurs, c'est très bien ainsi).
Cette extension du domaine de l'opposition, et donc de la répression, qui l'accompagne aujourd'hui sans tarder, est évidemment un tournant dans la société française. Macron est entouré d'idiots diplômés, de flagorneurs choisis sur casting, de losers dans leurs partis respectifs miraculeusement arrivés au pouvoir grâce à lui pour avoir su retourner leur veste et renier leurs engagements (c'est le plus grand point commun du personnel politique d'En Marche : tous des perdants de leurs primaires respectives), de technocrates idéologues et imbus de leur personne (Blanquer, l'Iznogoud du rectorat enfin devenu calife à la place du calife en est le parfait exemple), de cadres supérieurs habitués à être surpayés pour se faire obéir et de hauts fonctionnaires toujours à deux doigts de retourner pantoufler dans le privé si le vent tourne.
Qui s'entoure aussi mal pour s'assurer de rester seul aux commandes est condamné à être mal conseillé. Macron ne comprend pas ce qui lui arrive. La carte si surjouée l'an dernier d'un "grand débat" qui ne tournait finalement qu'autour de lui et de sa personne (des heures et des heures de "Questions pour un champion") ne pourra pas être abattue deux fois. Tout le monde n'est pas Laurent Berger, qui a accepté avec empressement, tellement il était content d'être invité à la table du maître, de participer à une négociation avec sur la tempe le pistolet d'une décision finale du souverain, ou d'un 49.3, si les résultats ne lui convenaient pas.
Game over ?
Christian Perrot, le 22 janvier 2020