Collapsologie : n’attendons pas la nuit des temps pour en finir avec le capitalisme !

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A l’heure où la jeunesse de différents pays entame des mobilisations de masse face à la catastrophe climatique, se pose de façon d’autant plus urgente la nécessité de débattre des cadres d’analyses et des réponses politiques face à la crise environnementale. Parmi les courants de pensée les plus récents sur le marché éditorial, la collapsologie[1] s’avère être un succès de librairie, en particulier grâce aux livres co-écrits par Pablo Servigne. Ce succès, largement porté par une campagne publicitaire des plus classiques, est-il un bon signe pour les luttes écologiques et sociales ? Ou n’obscurcit-il pas les horizons émancipateurs que de telles luttes sont à même dessiner ?

« Le regard tourné vers l’avant est d’autant plus pénétrant qu’il est conscient. L’intuition, authentique, se veut nette et précise. Ce n’est que si la raison se met à parler que l’espérance, vierge de toute fraude, recommence à fleurir » (Ernst Bloch)

Dans leur ouvrage Comment tout peut s’effondrer, paru en 2014, Pablo Servigne et Rafaël Stevens créaient le concept de « collapsologie », qu’ils définissaient comme suit :

« La collapsologie est l’exercice transdisciplinaire d’étude de l’effondrement de notre civilisation industrielle et de ce qui pourrait lui succéder, en s’appuyant sur les deux modes cognitifs que sont la raison et l’intuition et sur des travaux scientifiques reconnus ».

Ce n’était qu’un point de départ. En 2017, Pablo Servigne signait un deuxième ouvrage – L’autre loi de la jungle – avec Gauthier Chapelle. Les auteurs y reprenaient la thèse de l’anarchiste russe Kropotkine qui, dans un essai célèbre, paru en 1902, défendait l’idée – déjà émise par Marx et Engels – que l’évolution des espèces ne résulte pas seulement de la compétition, mais aussi de l’entraide[2]. Enfin, en octobre 2018, le trio Servigne-Chapelle-Stevens signait Une autre fin du monde est possible. Vivre l’effondrement et pas seulement y survivre.

L’impact de cette trilogie mérite qu’on s’y arrête. Les « collapsologues » jouissent en effet d’une grande renommée, dans des milieux extrêmement différents. D’une part, ils sont fort populaires sur les réseaux sociaux, dans des mouvances alternatives et auprès de nombreux/ses activistes de la mouvance écologique radicale. D’autre part, ils ont été reçus à Bercy et à l’Elysée, invités par les fédérations patronales de Belgique et de Suisse et les plus grands médias mainstream ont amplement commenté leurs écrits. Certains journaux dits « de qualité » ont même été jusqu’à saluer en eux les fondateurs d’une nouvelle discipline scientifique…Qu’est-ce donc qui suscite tant d’intérêt, voire d’engouement ?

On se concentrera ici sur le dernier livre paru, Une autre fin du monde est possible. Pablo Servigne et ses amis y répondent implicitement à certaines critiques, en ignorent d’autres et approfondissent des thèmes développés précédemment. La grande nouveauté de l’ouvrage est de proposer aux lecteurs de passer de la « collapsologie » à la « collapsosophie », autrement dit de la science de l’effondrement à la philosophie de l’effondrement. On verra que cet exercice ambitieux les entraîne vers des conceptions fort discutables, et même dangereuses.

De « l’espoir toxique » à « l’espoir actif »

 
 

A première vue, Une autre fin du monde est possible semble présenter un certain nombre d’avancées par rapport aux ouvrages précédents. C’est ainsi que les auteurs nuancent partiellement l’affirmation d’inspiration bouddhiste que « l’espoir est toxique »[3]. Pour ce faire, ils introduisent une distinction entre « l’espoir passif » et « l’espoir actif ». Selon eux, le premier serait le synonyme démobilisant de « la certitude que tout ira mieux demain », tandis que le second serait « l’espérance en mouvement », celle qui va de pair avec « le courage d’ouvrir les possibles » et de se battre pour les concrétiser.

Cette réponse implicite aux critiques soulignant le fatalisme de la démarche « collapsologique » est positive, mais est-elle suffisante ? Est-il vrai que « l’espoir passif » serait toujours et inévitablement un « poison » qui « endort les gens » et renforce l’ordre établi, comme disent les auteurs ? Le philosophe Ernst Bloch suggérait une approche plus dialectique[4] : l’espoir, même passif, même assoupi, exprime toujours en dernière instance l’aspiration au changement en direction d’une vie meilleure. Cela semble évident : comment un espoir actif, qui a identifié son objet et concentre sa volonté dans cette direction, pourrait-il naître sans être précédé d’un forme plus vague, comme celle qui s’exprime dans les rêves éveillés ?

Mais laissons là ce débat philosophique et actons provisoirement que les collapsologues semblent prendre certaines distances avec le fatalisme de la catastrophe inévitable, qui ne nous laisserait d’autre choix que d’entamer anticipativement le travail du deuil.

Rompre avec le fatalisme ? Oui mais non…

C’est un point important. En effet, le fatalisme était au cœur de Comment tout peut s’effondrer. L’ouvrage n’offrait qu’une seule perspective : se « débrancher » du « système industriel » pour ne pas être « entraîné dans sa chute ». Toute réponse globale, toute tentative de réforme structurelle étaient considérées comme génératrices d’illusions. Même la décroissance était écartée – les auteurs lui reprochaient d’entretenir « l’hypothèse irréaliste » d’un possible évitement de l’effondrement… Le livre ne comportait pas un mot d’encouragement à ces actions de désobéissance civile que Naomi Klein appelle Blockadia [5]. Pablo Servigne enfonçait le clou par diverses interviews : face à l’inéluctable, il n’est d’autre issue que la construction de petites communautés résilientes, car rien d’autre ne survivra à la catastrophe.

Une autre fin du monde laisse entendre par moments un autre son de cloche. Les « collapsologues » évoquent à plusieurs reprises « la lutte », et même la « lutte anticapitaliste ». L’expression revient un très grand nombre de fois, et quelques exemples sont donnés. Les auteurs, par exemple, font leur cette citation de Christophe Bonneuil : « Les luttes indigènes et afro-descendantes du Sud, comme les alternatives et mouvements anti-productivistes et autonomes au Nord, inventent des formes avancées d’émancipation et d’autogestion démocratiques ». Les collapsologues n’avaient rien écrit de semblable dans leurs précédents ouvrages.

Plus étonnant (car encore plus contradictoire avec leurs affirmations antérieures) : Servigne, Stevens et Chapelle s’appuient sur le précédent de l’effort de guerre contre les nazis pour dire que le projet d’un vaste plan de mobilisation générale, d’investissement public et de rationnement équitable contre le changement climatique « pourrait être porteur ». Ils émettent des réserves, mais admettent que ce récit

« vient nourrir ce qui manque aux mouvements de la transition -une coordination efficace- (…) et qu’il donnerait un immense coup de fouet à toutes ces personnes qui ressentent une profonde envie de changer le monde mais qui ne trouvent pas de satisfaction dans les injonctions aux petits gestes quotidiens individuels ».

La rupture avec le fatalisme semble ainsi se confirmer. Cependant, au lieu de poursuivre dans cette voie, au lieu d’explorer les stratégies pour faire converger les luttes des salarié.e.s, des femmes, des jeunes, des paysan.ne.s, des peuples indigènes ou afro-descendants, les collapsologues retombent dans l’ornière de leur premier ouvrage : il faut avant tout « passer par un processus de deuil », par une « transition intérieure ». Pourquoi ? Parce que ce à quoi nous sommes confronté.e.s, écrivent-ils, « n’est pas un problème qui appelle des solutions mais un ‘predicament’, une situation inextricable qui ne sera jamais résolue, comme la mort ou une maladie incurable ».

Alors, exit les luttes ? Exit la mobilisation générale pour gagner la guerre du climat ? Oui : « Avant d’agir, et même avant de proposer des pistes d’action (sic !), il y a encore des choses à comprendre et un chemin intérieur à faire ». Comme dans le premier volume de la trilogie, il faut « apprendre à vivre avec », atteindre « l’étape de l’acceptation de l’effondrement ». Dans ce troisième volume, les auteurs ajoutent même que cette acceptation est « le prérequis pour repenser radicalement la politique ». Sorti un instant par la porte, le fatalisme revient par la fenêtre, plus fort que jamais.

« La leçon est d’arrêter de se battre »

Ce retour apparaît on ne peut plus clairement lorsque les auteurs cherchent à s’inspirer de la pratique médicale pour déterminer la meilleure façon d’annoncer des nouvelles terrifiantes. L’intérêt des « collapsologues » pour cette problématique découle de leur expérience vécue. En effet, Servigne et ses amis ont pu constater que la prophétie de l’effondrement-certifié-inévitable-par-la-science est anxiogène. On le voit aux réactions de personnes membres de groupes « collapsistes » sur les réseaux sociaux : untel se félicite d’avoir convaincu un proche de ne pas avoir d’enfants, unetelle autre se désespère de ne pas être en mesure d’acheter à la campagne le lopin de terre indispensable à sa survie pendant l’effondrement, etc…

Pour répondre à l’angoisse qu’ils ont contribué à créer, les « collapsologues » croient pouvoir s’appuyer sur un travail réalisé autour de la maladie de Huntington. Il s’agit d’une maladie dégénérative héréditaire, rare et incurable, qui se révèle généralement vers la quarantaine et peut entraîner une mort rapide. La manière souvent inadéquate dont des patient.e.s ont été informé.e.s par leur médecin a suscité des réactions ; des philosophes se sont investies dans un collectif constitué autour d’une des malades et un certain nombre d’idées ont été formulées concernant la manière la plus appropriée d’annoncer la mauvaise nouvelle, et de vivre avec elle.

C’est sur ce travail que Servigne, Stevens et Chapelle se basent pour évaluer leur discours sur l’effondrement :

« Il y a trois leçons à tirer de ce parallèle avec la maladie, écrivent-ils. La première est d’arrêter de se battre, car cela n’apporte pas grand chose de constructif (…). La deuxième leçon est qu’on ne peut pas annoncer que ‘tout est foutu’ (et encore moins sans préciser ce qui est foutu) (…). La troisième est que, à la suite des deux types d’annonce (la mort et l’effondrement, DT), il faut retrouver confiance en soi par la création, l’exploration, le partage des expériences ».

Que les auteurs comprennent la nécessité d’arrêter de dire que « tout est foutu », on ne peut que s’en réjouir. Il aurait été préférable qu’ils le comprennent plus tôt, et il reste à espérer – mais cet espoir est vain, on le verra – qu’ils ne parleront donc plus de « l’Effondrement » mais de menaces d’effondrement(s), en précisant de quelles menaces il s’agit, à quoi elles sont dues et comment les écarter dans la mesure du possible… Ceci dit, il est tout simplement hallucinant de lire qu’il faudrait, selon eux, « arrêter de se battre » !

Car quelle est la cause principale de la catastrophe grandissante ? La croissance à tout prix, résultat de la concurrence pour le profit maximum. Par conséquent, si on veut trouver un point de comparaison dans le domaine médical, ce n’est pas une maladie génétique qu’il faut choisir, mais une maladie provoquée par la course au profit. L’asbestose constitue un bon exemple. Or, qu’ont fait les victimes de l’asbeste ? Se sont-elles résignées à leur sort ? Non, elles se sont mobilisées avec acharnement contre les multinationales de l’amiante parce que celles-ci les ont empoisonnées, en pleine connaissance de cause, pendant des décennies et avec la complicité des gouvernements.

Il saute aux yeux que cette comparaison avec l’asbestose est infiniment plus fertile que celle des « collapsologues » avec la maladie de Huntington. En effet, nous empoisonner, c’est ce qu’ont fait et continuent de faire les multinationales du pétrole, du charbon et du gaz : leurs responsables savaient que la combustion des combustibles fossiles entraînerait le changement climatique, mais ils ont continué à exploiter ceux-ci, en payant de faux savants pour nier la réalité. Les gouvernements aussi savaient les conséquences, et ils n’ont rien fait, ou presque, pour protéger les citoyen.ne.s. La « maladie » dont nous souffrons n’est donc pas « héréditaire » ou « génétique », c’est-à-dire « naturelle » : elle est historique, sociale et politique. Dans ce contexte, « arrêter de se battre » signifie rien moins que capituler face à l’exploitation, tendre l’autre joue en se résignant à l’injustice.

« Capitalisme » ? Vous avez dit « capitalisme » ?

Au-delà de l’anecdote, la fausse comparaison des « collapsologues » est révélatrice des biais de leur théorie. D’abord, on voit qu’ils se placent d’eux-mêmes dans la position de pouvoir du médecin, l’homme en blouse blanche qui « annonce » et prescrit. Ensuite, il est évident que les auteurs sont intoxiqués par leur propre récit « effondriste », puisqu’ils croient en démontrer la validité en recourant à une comparaison manifestement erronée (ils se mystifient donc eux-mêmes)… Enfin, la référence à une maladie héréditaire indique autre chose encore : Pablo Servigne et ses amis ont beau, dans cet ouvrage, évoquer abondamment la « lutte anticapitaliste », ils persistent à ne pas comprendre en quoi consiste le capitalisme et pourquoi il « épuise les deux seules sources de toute richesse – la Terre et le travailleur »/la travailleuse (Marx).

De cette incompréhension, Une autre fin du monde contient tant de manifestations qu’on ne pourrait les énumérer toutes. En voici quelques-unes :

• A un certain moment, les auteurs énumèrent les « ennemis diffus » à affronter et ils mettent dans le même sac « le changement climatique, la perte de biodiversité, le capitalisme, les gaz à effet de serre, l’industrie des combustibles fossiles et l’inaction des gouvernements ». L’absence de toute articulation des phénomènes socio-politiques (le capitalisme, l’industrie, les gouvernements) et des transformations induites dans l’environnement (le changement climatique, la perte de biodiversité) saute aux yeux.

• D’un côté, les auteurs semblent accepter le constat qu’il y a des antagonismes de classe, ils veulent même « ajouter au refus de l’exploitation de certaines classes d’humains, le refus d’exploiter d’autres espèces ». Bien. Mais, de l’autre côté, ils appuient le plaidoyer de Bruno Latour pour dépasser le clivage entre droite et gauche. Or, Latour défend l’idée de former de « nouvelles alliances » en cherchant « des alliés chez des gens qui, selon l’ancienne gradation, étaient clairement des ‘réactionnaires’ » et chez d’autres qui, « toujours selon l’ancien repère, étaient clairement des ‘progressistes’, et même peut-être des libéraux, voire des néolibéraux »[6]. Cela ne gêne pas les collapsologues, qui renchérissent : « Nous sommes tous sur le même bateau » et « nous avons besoin de tout le monde ».

• Evoquant « les sociétés précapitalistes », Servigne, Stevens et Chapelle estiment qu’elles se caractérisaient par « des économies soutenables », que « le capitalisme » y a mis fin car il « a eu besoin de se débarrasser d’une vision trop personnifiée de la nature (en effet, comment tuer ou voler sa propre mère nourricière ?) pour développer une pensée froide et calculatrice ». L’apparition du capitalisme serait donc le point clé d’une déconnexion des relations entre humanité et nature ? Oui mais non : à quelques pages de distance, on lit que « l’étape clé de la déconnexion a été l’invention du langage abstrait ». Il est vrai que les singes, qui n’ont pas de langage abstrait, sont moins « déconnectés » de la nature que les humains ; mais voilà : ils ne sont pas humains…

Des références fort peu recommandables…

L’extrême confusion des auteurs se traduit aussi dans l’extrême diversité des personnalités convoquées à l’appui de leurs thèses.[7] Ce bric-à-brac idéologique racoleur pourrait prêter à sourire si n’y figuraient pas aussi des personnalités aussi peu recommandables que Mircea Eliade et – au premier plan ! – Carl Gustav Jung. Or, « peu recommandables », ici, est malheureusement un euphémisme…

Théoricien des religions et des mythes, le Roumain Eliade était membre avant-guerre du parti fasciste et antisémite « la garde de fer ». Erreur de jeunesse ? Que nenni : après la guerre, Eliade répéta son admiration pour diverses personnalités d’extrême-droite[8]. Vu le sujet qui nous occupe, soulignons qu’il prêta son soutien à Alain de Benoist lors de la fondation du GRECE (Groupe de recherche et d’étude pour la civilisation européenne, appelé aussi la Nouvelle Droite).[9] Or, de Benoist est un.e des auteur.e.s qui ont tenté par la suite de formuler une écologie politique d’extrême-droite.[10]

Disciple dissident de Freud, le psychiatre suisse Carl Gustav Jung n’a pas milité dans un parti fasciste, comme Eliade, mais il a néanmoins collaboré avec les nazis de 1933 à 1939.[11] Après la guerre, Jung prétendit avoir agi pour aider ses confrères juifs allemands à poursuivre leur activité professionnelle. Or, l’antisémitisme du psychiatre suisse est indéniable. Ses penchants fascistoïdes resurgirent d’ailleurs indirectement en 1960 : à l’époque, il préfaça élogieusement un livre du néo-nazi mystique Miguel Serrano, un Chilien qui voyait en Hitler un avatar de Wotan et de Vishnu, promis à revenir pour sauver le monde…[12]

Comme on le voit, dans Une autre fin du monde, les collapsologues ne se contentent pas de retomber dans l’ornière psychologisante et fataliste de leur premier ouvrage : ils creusent cette ornière si profondément qu’ils glissent dans une caverne. Une caverne archaïque où ils nous invitent à les rejoindre pour nous « ré-ensauvager » en « dansant avec nos ombres », afin de « vivre avec tous les aspects de nos vies qui nous semblent inacceptables ». Il ne s’agit plus simplement de « faire le deuil » mais de « renouer avec nos racines profondes ». Celles-ci ne sont autres que « les archétypes au sens défini par Jung, à savoir des symboles primitifs, universels, appartenant à l’inconscient collectif, une forme de représentations préétablies (sic) qui structurent la psyché ».

Carl Gustav Jung, l’inconscient collectif et le nazisme

Jung est ainsi désigné comme référence centrale de la « collapsosophie ». La troisième partie de l’ouvrage, que les auteurs disent « essentielle » fait constamment référence à son œuvre, en particulier à la notion très contestée d’archétypes.

Sur le plan scientifique, il faut savoir que l’existence de ces archétypes n’a jamais été prouvée, ni par Jung ni par ses successeurs. Aucune recherche n’a établi que la psyché serait « structurée par des représentations préétablies, des symboles primitifs, universels, appartenant à l’inconscient collectif ». Le symbole de la Terre-mère, par exemple, n’est pas universel, contrairement à ce que disent certains. L’anthropologue Jean-Loïc Le Quellec a montré que les soi-disant démonstrations de l’existence des archétypes se caractérisent toutes par leur circularité, et que les partisan.e.s du concept projettent sur la préhistoire leurs propres préjugés, voire leurs propres fantasmes…

Au-delà de la controverse scientifique, les « archétypes » et le prétendu « inconscient collectif » sont au cœur d’un important débat philosophique et politique. Le caractère réactionnaire de ces notions jungiennes ressort en effet de leur définition même. Pour Jung, au plus un groupe humain est développé, au plus il a refoulé ses racines primitives, sauvages et barbares. Or, celles-ci sont sources de vitalité et de créativité. Chaque peuple doit les retrouver pour les assumer, faute de quoi les archétypes resurgiraient violemment, hors de tout contrôle.

C’est à ce point précis qu’on saisit comment une théorie basée sur une prétendue universalité des représentations a pu faire le lit de ce qui est, par excellence si l’on peut dire, la négation raciste et antisémite de l’universalité : le national-socialisme. Les nazis, en effet, ont compris rapidement que la nécessité soulignée par Jung d’assumer « l’inconscient collectif » du peuple allemand pouvait légitimer leur politique. C’est pourquoi ils se saisirent de Jung contre Freud, et brûlèrent les livres de l’inventeur juif de la psychanalyse, accusé de polluer l’inconscient aryen.

Jung n’est certes pas coupable de l’instrumentalisation de ses théories par les nazis… Mais il ne s’en est jamais indigné et il l’a même cautionnée. Du fait de sa longue histoire, la « race juive » était, pour lui, l’exemple typique d’un groupe humain très éloigné de ses racines. Dès lors, comparant en 1934 la psychologie de cette « race » à celle de la « race aryenne », voici ce que le psychiatre suisse écrivait dans le bulletin de la Société internationale de psychothérapie :

« Abstraction faite de certains individus créateurs, le Juif moyen est déjà bien trop conscient et différencié pour receler les tensions d’un avenir encore non conçu. L’inconscient aryen a un potentiel plus élevé que l’inconscient juif ; tel est l’avantage et le désavantage d’une jeunesse qui n’est pas encore complètement étrangère à la barbarie.(…) Freud ne connaissait pas l’âme allemande, il la connaissait aussi peu que tous ses officiants germaniques. Le grandiose phénomène du national-socialisme, que le monde entier contemple les yeux étonnés, les a-t-il édifiés ? Où se trouvaient cette énergie et ces tensions inouïes lorsque le national-socialisme n’existait pas encore ? Elles étaient cachées dans les profondeurs de l’âme germanique ».[13]

De l’écoféminisme à l’éloge des « nouveaux guerriers »

Curieusement, il semble que Servigne, Stevens et Chapelle soient arrivés à Jung notamment en lisant certaines auteures écoféministes. Je dis bien « certaines auteures », car, logiques avec la naturalisation des rapports sociaux qui est un de leurs traits caractéristiques (j’y reviendrai en conclusion), les collapsologues semblent s’être limités à cette variété d’écoféministes qui essentialisent les différences entre hommes et femmes dans la relation à « la nature ». S’ils avaient embrayé aussi des auteures qui expliquent ces différences par le rôle social que le patriarcat impose aux femmes, et non par la « nature » des femmes, ils auraient peut-être évité le dérapage dont nous allons parler maintenant. Hélas, ils ne l’ont pas fait. Du coup, le cocktail des théories jungiennes et des conceptions essentialistes les entraîne aux antipodes du féminisme – et des luttes d’émancipation en général. C’est ce que nous allons voir à présent.

D’emblée, le lecteur est frappé par une contradiction : Servigne, Stevens et Chapelle découvrent l’écoféminisme… mais Une autre fin du monde n’évoque ni la lutte des femmes pour leur émancipation, ni la nécessité d’un mouvement autonome des femmes, ni la place centrale de ce mouvement dans les combats contre la destruction environnementale et sociale. Les auteurs préfèrent développer l’idée que les « archétypes féminin et masculin » sont « des polarités qui ne s’opposent pas ». Estimant que « les hommes souffrent aussi de la blessure secrète du patriarcat », ils plaident pour la « réconciliation hommes-femmes » et nous invitent à pratiquer à cet effet des « rituels initiatiques ».

C’est là que la « collapsosophie » dérape pour plonger dans la régression archaïque, non seulement en paroles, mais en actes. Question rituels, les auteurs recommandent en effet leurs bonnes adresses : aux lecteurs mâles, ils conseillent de suivre, comme ils l’ont fait eux-mêmes, les week-ends d’initiation du « nouveau guerrier » (New Warrior Training Adventure) organisés par le ManKind Project, dont ils chantent les louanges.

Ce ManKind Project est un business mis sur pied par trois étasuniens à l’initiative d’un certain Bill Kauth. Pour celui-ci, psychothérapeute jungien, il s’agissait de répondre à la vague féministe des années quatre-vingts. Impressionné par le potentiel émancipateur des groupements féministes, Kauth décida de mettre sur pieds des groupes non mixtes censés permettre aux hommes aussi de se libérer, en retrouvant leurs racines profondes et leur âme de mâles « adultes et sains ». Bref, en assumant leur archétype masculin.[14]

Des « excuses aux femmes » au masculinisme

Selon Jung et ses adeptes, le patriarcat serait apparu il y a 5000 ans environ. Avant cette date, les sociétés humaines auraient été matriarcales. Bien qu’ils se piquent d’exhaustivité scientifique, les « collapsologues » se rangent derrière cette hypothèse sans sourciller, sans même signaler sa contestation par la plupart des spécialistes de la préhistoire… Du coup, ils se retrouvent au coude à coude avec Kauth, qui ne rate pas une occasion de « s’excuser auprès des femmes pour les cinq millénaires de domination qu’elles ont subis ».

L’entrée dans le ManKind Project commence par un week-end initiatique – payant – dont les aspirants « nouveaux guerriers » s’engagent par écrit à ne pas divulguer le contenu secret. Un coin du voile a toutefois été levé par des journalistes infiltrés : ils décrivent un évènement très encadré, au cours duquel les participants, coupés du monde extérieur, manquant de sommeil et de nourriture, sont soumis à diverses épreuves physiques et émotionnelles rudes, visant à les « confronter à leur dépendance aux femmes » en descendant au plus profond de leur âme pour « entrer dans le royaume de la masculinité. » [15]

Jung s’intéressait à « l’âme germanique », son disciple Kauth s’intéresse à « l’âme masculine ». Il explique :

« Je distingue l’esprit – ce qui monte, la quête de Ia lumière, la réponse juste, la perfection et la vérité cosmique – de l’âme – ce qui descend dans le mystère, le non-savoir, la confusion, l’obscurité, le matériel ». Selon lui, « notre culture nous noie dans l’esprit et nous sommes désespérément en manque d’âme. » Le parcours du nouveau guerrier a du succès, dit-il, car il travaille à 95% sur l’âme. « C’est ce dont les hommes ont besoin pour se sentir complets et équilibrés ».[16]

Comme on le voit, l’inconscient collectif masculin remplace l’inconscient collectif racial, mais la logique est identique. Le lien entre les week-ends d’initiation et les théories jungiennes sur le patriarcat ? C’est très simple : on transformera les hommes en les amenant à retrouver les racines de leurs ancêtres préhistoriques, ces guerriers sains, droits et courageux d’avant le patriarcat. D’où la dénomination « nouveaux guerriers »… Entre autres rituels, les participants dansent donc nus la nuit dans la forêt, autour d’un grand feu, au son des tambours. Au terme du week-end, ils sont censés être apaisés et sereins, débarrassés de leur culpabilité. Conscients de leur « magnificence d’hommes », ils « retrouvent le chemin d’un masculin sacré »[17]…

Il faut être naïf ou de mauvaise foi pour croire aux vertus féministes et émancipatrices de telles simagrées. Que les hommes soient déstabilisés par le féminisme, c’est une évidence, puisque nous vivons dans une société dominée par les hommes. A l’instar des boys clubs qui reviennent à la mode, les groupes mâles non-mixtes sont donc toujours, par définition, des groupes de dominants. (Le fait que certains hommes souffriraient du « syndrome masculin dépressif » mentionné par Servigne et ses amis n’y change rien.) Les « excuses aux femmes pour les 5000 ans de patriarcat » sont un écran de fumée : le ManKind Project est une branche du mouvement masculiniste. Sa spécificité a été bien saisie dans un article anonyme, publié sur le site Rebelyon, et consacré au danger de cette mouvance :

« Les ‘nouveaux guerriers’ effectuent une transformation de la domination masculine, rejetant certains aspects de la masculinité pour en valoriser d’autres – sans prendre en compte le fait que la masculinité elle-même est une position de pouvoir ».[18]

« Aucun arbre ne peut pousser jusqu’au paradis sans que ses racines n’atteignent l’enfer » : cette citation de Jung est mise en exergue, bien en vue, de la troisième partie de Une autre fin du monde. Tout personne informée des controverses entourant la personne du psychiatre suisse est en mesure d’imaginer la manière dont les nazis ont pu interpréter cette phrase : l’arbre est le Reich de mille ans promis par Hitler, l’enfer s’appelle Auschwitz. Et le masculiniste Bill Kauth, dans quel enfer pense-t-il que les nouveaux guerriers doivent s’enraciner pour s’élever jusqu’au paradis de la « magnificence masculine » ? Nul ne le sait. N’empêche : il est pour le moins étonnant que la descente de Servigne et ses amis « dans le mystère, le non-savoir, la confusion et l’obscurité » de l’irrationnel jungien à la sauce masculiniste soit (à ma connaissance) passée inaperçue des critiques…[19]

Ni rire ni pleurer, comprendre

Ayant été un des premiers, dans le monde francophone, à démasquer la pseudo-science misanthropique et raciste de Jared Diamond dans L’Effondrement [20], l’auteur de ces lignes s’est intéressé très tôt aux « collapsologues », dont la filiation avec Diamond est évidente. Mais il s’est efforcé de mener avec eux un débat rigoureux, ouvert, sans caricature, en insistant principalement sur le danger du fatalisme[21]. La raison de cette attitude ? Ecosocialistes et collapsologues partagent jusqu’à un certain point un diagnostic commun sur l’extrême gravité de ce qu’on appelle « crise écologique » – qui est bien plus qu’une « crise » et appelle une alternative de civilisation… De plus, Pablo Servigne n’est pas Diamond : il se réclame de la tradition libertaire. Il s’agissait donc aussi de débattre pour rassembler, dans la diversité, les forces anti-productivistes.

Après Une autre fin du monde , il n’est pas sûr que ce débat ait encore un sens. L’avenir le dira. En attendant, il s’agit de s’interroger – sans rire ni pleurer, à la façon de Spinoza, : comment Servigne et ses amis en sont-ils arrivés là ? La réponse à cette question est importante, en particulier pour celles et ceux qui ont cru trouver dans la « collapsologie » une expression de la radicalité antisystémique indispensable aujourd’hui pour relever le gant de la catastrophe grandissante. En conclusion de cet article, on ébauchera quelques pistes de réflexion.

Aucune fatalité, aucun automatisme ne devait conduire les collapsologues à leur sortie de route actuelle. Il y avait cependant des indices : le refus de prendre position contre Malthus et son Principe de Population, le choix de ne pas répercuter les travaux scientifiques qui pulvérisent les sombres élucubrations de Jared Diamond[22], les accointances avec l’ex-ministre Vert Yves Cochet, sans oublier la tendance à ensevelir le lecteur sous une avalanche de références scientifiques sélectionnées par les auteurs… en fonction, souvent, de leur « intuition effondriste ».

S’agissant de l’intuition, justement, la méthode des « collapsologues » mérite d’être mise à plat. Pour alerter sur la gravité de la situation, on peut, comme ils le font, « s’appuyer sur les deux modes cognitifs que sont la raison et l’intuition ». Mais à une condition : que la raison tente d’embrasser à la fois la destruction « anthropique » de l’environnement, d’une part, et la responsabilité précise de la forme sociale historique responsable aujourd’hui de cette destruction, d’autre part. Sans articuler ces deux volets de la réalité, plus on accumule les données relatives à la destruction, plus la question posée au public – « Où votre intuition vous dit-elle que cela nous mène ? » – débouche invariablement sur la réponse souhaitée : « Tout va s’effondrer ». Sans conscience sociale, l’intuition est biaisée, le raisonnement est circulaire et on fait de la pseudo-science. C’est le sens de la citation de Bloch en exergue de cet article.

Au-delà de la méthode, le fond du problème est la notion même de « L’effondrement ». Ce super-concept absolu, absorbant tout, cache mal sa prétention hégémonique. Mais il comporte un piège que deux personnes attentives ont bien mis en évidence.

« La catastrophe, écrivent-elles, n’a de sens qu’à être conjurable, saisie dans un récit où l’on puisse lui trouver des prises, qui ne soit pas clos sur lui-même et dépourvu d’aspérités. Faute de quoi, on perd les pédales, on glisse, on dérape, on patine en essayant désespérément de remonter le long de la courbe de toutes ces asymptotes, qui sont le motif de l’anthropocène. La conséquence pratique, c’est un sentiment d’accablement tenace qui conduit tout droit, à l’avenant, au cynisme, au nihilisme ou à l’aquoibonisme ».[23]

Dans sa critique de la « collapsologie », Elisabeth Lagasse a pointé pour sa part le rôle de la naturalisation des rapports sociaux dans la formation de ce super-concept :

« Derrière cette idée de l’effondrement réside une vision du monde qui met en avant le système plutôt que les acteurs.rices et les rapports sociaux de pouvoirs. L’effondrement viendrait d’abord des ‘limites’ d’un système qui ne fonctionne plus, plutôt que d’injustices sociales. Pour prouver cet effondrement, les collapsologues s’en réfèrent généralement а des données quantitatives, issues des sciences naturelles. Ce faisant, ils effectuent un glissement entre les sciences naturelles et les sciences sociales, en étudiant la société comme un ‘écosystème’, et en déduisant de données ‘physiques’, un effondrement social. Cette idée qu’il existerait des déterminismes sociaux découlant de lois de la nature porte un nom : le positivisme. Cette épistémologie a été largement critiquée par des courants théoriques qui affirment que la société n’est pas un objet observable depuis l’extérieur, et qu’il n’est donc pas possible d’étudier la société de façon neutre, sans jugements de valeurs. »[24]

Incapables de « trouver des prises » à l’aide de leur propre récit positiviste, les « collapsologues » ont en effet perdu les pédales, glissé, dérapé, patiné. Pour s’en sortir, ils auraient pu s’ouvrir à la critique de la société capitaliste et choisir leur camp social. Mais, sur cette voie-là, Marx est incontournable. Or, les collapsologues n’en veulent pas, c’est une autre de leurs caractéristiques. Ils se sont donc agrippés à Jung et à ses archétypes. Paradoxalement, cette porte de sortie irrationnelle était compatible avec leur prétention scientiste à l’hyper-rationalité. Seulement, voilà : elle mène tout droit aux ténèbres. On n’insinuera pas que celles et ceux qui se réclament du psychiatre suisse tombent inévitablement à l’extrême-droite, ce serait stupide. Mais il s’agit de constater et de mettre en garde : pour Jung, le futur de l’humanité réside dans sa préhistoire. Comme elle est basée sur le mythe de l’inconscient collectif, cette pensée acquiert quasi immédiatement une dimension politique (beaucoup plus que celle de Freud)[25]. Or, cette politique est régressive, réactionnaire au sens littéral du terme. Quand on y met le doigt, le corps tout entier risque d’y passer.

En guise de conclusion

Parler aux arbres et danser autour d’un feu dans la forêt est enrichissant mais la remarquable vision du monde qui est celle des peuples indigènes[26] est une source d’inspiration, pas un produit d’exportation. Il est impossible de la copier pour la coller comme un sparadrap sur « l’extrême déchirement » que constituait (dans les termes de Marx !) l’arrachement capitaliste de la population des campagnes à la terre nourricière, ce moment historique majeur de la séparation entre l’humanité et le reste de la nature. A l’échelle de la société, la conscience d’une connexion avec l’ensemble du vivant doit être réinventée, reconstruite à partir des mouvements sociaux. Aucun raccourci ne permet de faire l’économie du travail ardu de convergence des luttes des exploité.e.s et des opprimé.e.s autour d’un projet de société assurant à tous et toutes une vie bonne par la satisfaction des besoins humains réels, démocratiquement déterminés dans le respect des écosystèmes.

« Assurant à toutes et tous » : ces petits mots sont ici décisifs. En effet, Une autre fin du monde se termine sur cette phrase : « Il n’y a rien d’incompatible à vivre une apocalypse et un ‘happy collapse’ ». Mais, nulle part dans leur trilogie, les auteurs n’ont répondu à la question clé de l’impact de cette « apocalypse » sur la population mondiale, sur les pauvres, en particulier les pauvres dans les pays pauvres… Ils connaissent pourtant le problème. Leur bon ami Yves Cochet prophétise que « l’effondrement » de la « société thermo-industrielle » entraînera inévitablement la disparition de la moitié du genre humain durant les années trente de ce siècle[27]. « Happy collapse » ?!

Daniel Tanuro,  Europe solidaire sans frontière.

Notes

[1] Voir à ce sujet les articles publiés par Contretemps : https://www.contretemps.eu/effondrement-ou-autre-futur-entretien-avec-pablo-servigne/ ; https://www.contretemps.eu/effondrement-societes-humaines-tanuro/ [[Publié antérieurement notamment sur ESSF (article 43714), L’effondrement des sociétés humaines est-il inévitable ? Une critique de la « collapsologie » : C’est la lutte qui est à l’ordre du jour, pas la résignation endeuillée, http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article43714 ; https://www.contretemps.eu/effondrement-mondes-possibles/

[2] Pierre Kropotkine, L’Entraide, un facteur de l’évolution, Paris, éditions du Sextant, 2010. Bernard Naccache, Marx critique de Darwin, VRIN, 1980.

[3] Pablo Servigne, interview à Moins ! – Journal romand d’écologie politique, mars 2018.

[4] Ernst Bloch, Le principe espérance, Bibliothèque de philosophie, Gallimard 1976.

[5] Naomi Klein, This Changes Everything. Capitalism vs the Climate, Simon & Schuster, 2014

[6] Bruno Latour, Où atterrir ? Comment s’orienter en politique, la Découverte, Paris, 2017

[7] On y trouve tout à la fois Frédéric Laloux (spécialiste en vogue de la réorganisation du management capitaliste), Paul Hawken (technocrate champion du capitalisme vert), Isabelle Stengers (philosophe anticapitaliste de tendance constructiviste), Arne Naess (fondateur du courant de « l’écologie profonde »), Sylvia Federici (théoricienne féministe du lien entre capitalisme, patriarcat et destruction de la nature), Yuval Noah Hariri (historien végan qui considère l’invention de l’agriculture comme la plus grande catastrophe de l’histoire), Joanna Macy (écophilosophe bouddhiste) et beaucoup, beaucoup d’autres, de divers plumages.

[8] Le philosophe italien d’extrême-droite Julius Evola, le raciste français Arthur de Gobineau et l’idéologue nazi Alfred Rosenberg.

[9] Daniel Dubuisson, Impostures et pseudoscience, l’œuvre de Mircea Eliade, Presses universitaires du Septentrion, 2005.

[10] Notamment à travers son ouvrage Demain la décroissance ! Penser l’écologie jusqu’au bout.

[11] En tant que président de la Société internationale de psychothérapie mise sur pied par le régime hitlérien, Jung collabora étroitement avec le président de la branche allemande, le psychiatre nazi Matthias Goering (cousin d’Herman). Ce Goering fit notamment un éloge vibrant de Mein Kampf lors d’un congrès international, en présence de Jung. Ses textes nauséabonds furent régulièrement publiés dans le journal de la Société internationale, sous la responsabilité de Jung.

[12] Jean-Loïc Le Quellec, Jung et les archétypes. Un mythe contemporain, Sciences humaines éditions, 2013.

[13] Cité par Jean-Loïc Le Quellec, op. cit.

[14] Lire par exemple A Conversation with Bill Kauth, https://mankindprojectjournal.org/2010/09/bill-klauth/, 2010.

[15] Tom Mitchelson, My (very) weird weekend with the naked woodland warriors who travel to remote England to ‘reclaim their masculinity’, Daily Mail, 13/3/2019. David Le Bailly, Ça y est j’ai des couilles Laurence, j’ai testé un camp de masculinité, https://www.nouvelobs.com/societe/ 4/8/2018

[16] A Conversation with Bill Kauth, op. cit.

[17] Miriam Gablier, Des hommes authentiques, https://www.inrees.com/articles/des-hommes-authentiques/ 29/6/2015

[18] Attention, danger : Masculinisme ! 31/10/2011 https://rebellyon.info/Attention-danger-Masculinisme

[19] Pour Libération, le livre Une autre fin du monde est « l’éloge de l’action rationnelle face au déclin écologique ». Le site de la Radio Télévision Suisse estime qu’il « redonne du courage ». Le carnet et les instants (revue des Lettres belges et francophone) « loue les auteurs de parier pour la mise en œuvre des passions joyeuses de Spinoza ». Etc… On n’a pas dû lire le même livre…

[20] Jared Diamond, Effondrement : Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie, 2004, Viking Press. Mes articles sur le sujet : L’inquiétante pensée du mentor écologiste de Nicolas Sarkozy, Le Monde Diplomatique, décembre 2007 ; le débat sur cet article https://blog.mondediplo.net/ ; [Catastrophes écologiques d’hier et d’aujourd’hui : la fausse métaphore de l’île de Pâques], ESSF (article 7405), http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article7405 ; « Questioning Collapse » : des historiens et des anthropologues réfutent la thèse de « l’écocide », ESSF (article 24604), http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article24604 et https://entreleslignesentrelesmots.blog/ ; Iles de Pâques (recension) : La réhabilitation du peuple rapanui, martyr du colonialisme ESSF (article 44285), Iles de Pâques (recension) : La réhabilitation du peuple rapanui, martyr du colonialisme, http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article44285 et https://www.gaucheanticapitaliste.org/

[21] Lire Daniel Tanuro, Crise socio-écologique : Pablo Servigne et Rafaël Stevens, ou l’effondrement dans la joie http://www.lcr-lagauche.org/ et ESSF (article 35111), http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article35111, in Moins !, Mars 2018 – Sur ESSF (article 43714), L’effondrement des sociétés humaines est-il inévitable ? Une critique de la « collapsologie » : C’est la lutte qui est à l’ordre du jour, pas la résignation endeuillée, http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article43714http://www.contretemps.eu/

[22] Citons en particulier deux ouvrages : McAnany Patricia et Norman Yoffee (ed), Questioning collapse. Human resilience, ecological vulnerability, and the aftermath of empire, Cambridge University Press, Cambridge, 2010 ; Terry Hunt and Carl Lipo, The Statues that walked : Unraveling the mystery of Easter Island, Free Press, 2011.

[23] François Thorau et Benedikte Zikouni Contre l’effondrement, agir pour des milieux vivaces https://lundi.am/Un-recit-hegemonique

[24] Elisabeth Lagasse Contre l’effondrement, pour une pensée radicale des mondes possible, Contretemps, 18/7/2018

[25] Pour Freud, l’inconscient est le passé refoulé de l’individu, pas celui de la nation, de la race, ou du genre.

[26] On conseillera en particulier l’ouvrage d’Edouard Kohn, Comment pensent les forêts. Pour une anthropologie au-delà de l’humain. Zones sensibles éditions

[27] Yves Cochet, Les trente-trois prochaines années sur Terre, Tribune libre dans Libération, 23/8/2017