Pas de coup d’État au Brésil ! la gauche dans la rue, par Mariano Quiroga

(Crédits photo : Alice Medina)

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Le peuple brésilien a inondé encore une fois les rues des principales villes du pays, faisant sien le slogan « Ils n’auront pas de coup d’État, ils auront une lutte ! ».

La terreur généralisée qui avait ébranlé la presque totalité des 54 millions d’électeurs de Dilma Rousseff lors des dernières élections, quand ils ont vu qu’on voulait emprisonner Lula et qu’une énorme marée jaune avait déferlé dans les rues, inspirée par une haine qui réclamait le jugement politique de la présidente. Pas parce qu’il y a des preuves, mais parce qu’ils ne tolèrent plus le gouvernement du PT (Parti des Travailleurs).

Outre les militants du syndicat CUT (Centrale unique des travailleurs) et des partis PT et PSOL (Parti socialisme et liberté), nous avons rencontré beaucoup de collectifs dans la rue, qui revendiquaient fortement le rôle de la femme, se réjouissaient d’avoir une femme pour présidente et montraient que les lieux étaient remplis de femmes au « clitoris durci », comme les a appelées Lula Da Silva quand, il y a quelques jours, ce sont les femmes qui ont manifesté contre son arrestation.

Je me suis entretenu avec certaines représentantes du collectif « El Arte por la Democracia », qui arboraient l’une des bannières les plus grandes et colorées de l’événement. Elles m’ont dit qu’elles cherchaient à transmettre un message positif pour contrebalancer l’attitude putschiste qui veut mettre fin à la Bolsa Familia [1] (bourse familiale) et veut faire cesser la démocratie. Alors elles revendiquaient qu’il y aurait « plus d’éducation publique et gratuite, plus de noirs et de noires, plus de femmes, plus de transsexuels, plus de tout ». Mariana Pimentel, professeure d’art, disait : « Nous pouvons critiquer le gouvernement du PT, mais nous ne pouvons nier l’autonomisation des minorités au cours de ces 13 années ».

 

(Crédits photo : Alice Medina)

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Les jeunes

Les jeunes n’étaient pas les plus nombreux, mais les nouvelles générations étaient fortement représentées et leur voix plus bruyante se détachait du reste de la foule. Nous nous sommes entretenus avec Luma, du mouvement Levante Popular de Juventudes, qui représente les jeunes des périphéries, le Mouvement des Sans terre et les universitaires. « Nous, les jeunes, sommes dans la rue parce que nous croyons que le coup d’État est un coup de poignard contre les jeunes. Les jeunes des périphéries sont les principales victimes de la police, et celle-ci est financée par les grands hommes d’affaires qui financent également les partis politiques », décrivait de façon énergique la jeune activiste.

Ils ne renient pas Dilma, ni Lula, mais ils déplorent que les politiciens soient financés par les entreprises et ils exigent « un engagement supérieur auprès du peuple ». Plusieurs des orateurs de l’événement ont répété ce message. « Il faut changer d’alliés », disait l’une des artistes. Le message transmis au Centre Rio de Janeiro, Carioca, pourrait se résumer ainsi : il faut délaisser les alliances politiques et économiques et s’appuyer sur les bases.

 

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Démocratie

« Il s’agit d’un coup d’État juridico-médiatique, très évident, parce qu’il n’y a pas de motifs juridiques pour faire le jugement politique. Dilma a utilisé des fonds comme l’ont fait tous les dirigeants du pays, et personne n’a perdu son mandat pour l’avoir fait. Le problème majeur est que ce peloton juridique compte sur la complicité du plus grand groupe médiatique : le réseau Red O Globo. C’est pourquoi il mobilise autant de Brésiliens, mais ils utilisent des renseignements mensongers », nous racontait Iván Sangahara du groupe Teatro por la Democracia. Nous l’avons consulté au sujet de l’appui à la démocratie des artistes, et il nous a dit que « la classe artistique a été la plus persécutée par la dictature, ayant souffert la torture, la censure, l’exil. Aujourd’hui, les gens savent ce que font les forces armées, ce n’est pas une exagération de notre part. Par chance, les artistes et les intellectuels ont fait leur manifeste et ils accompagnent les gens dans les rues, en faveur de la démocratie ».

La démocratie n’est pas négociable. Il y avait des ingénieurs, des employés de justice, des professeurs, des étudiants, des travailleurs de la culture, des mouvements sociaux, le Mouvement des Sans Terre et tant d’autres qui se ralliaient dans cette défense de la souveraineté populaire. Mais l’horizon de lutte pointe vers l’approfondissement des changements, vers la non-acceptation des pouvoirs établis.

Les gens ont manifesté et ils ont été clairs et précis. C’est maintenant au tour du PT, de Dilma et de Lula de retirer les pommes pourries de leur gouvernement, et de progresser vers l’autonomisation du peuple brésilien. Un peuple qui ne se cachera pas et qui est prêt à se battre.

(Crédits photo : Alice Medina)

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[1] NdT. « Bourse familiale » est un programme social brésilien destiné à lutter contre la pauvreté et mis en place sous la présidence de Luiz Inácio Lula da Silva. Il fait partie du programme plus général Fome Zero. C’est un « programme conditionnel », où le versement d’aides est conditionné à certaines obligations d’éducation, par exemple, mais qui se rapproche néanmoins du concept de revenu de base. (Source)

Traduit de l’espagnol par : Silvia Benitez