Noir de lumière avec la flûtiste suédoise Elsa Nilsson
Elsa Nilsson et son groupe se sont tellement approprié le matériel de Dark is Light Is, qu’on pourrait croire que les sept morceaux de l’album sont des originaux de la flûtiste, quand il s'agit d'arrangements de chansons folkloriques suédoises classiques associées au jour de la Sainte-Lucie.
Les traitements ont été développés sur de nombreuses années par la Suédoise et ses compagnons de groupe, le guitariste Jeff McLaughlin, le bassiste Alex Minier et le batteur Cody Rahm, et cela se voit dans ces rendus assurés. Les protocoles liés à la pandémie les ont empêchés de jouer le matériel en direct le 13 décembre, date de la fête, pour la première fois en près de dix ans, mais l'enregistrement offre une satisfaction équivalente, voire supérieure, en permettant à l'auditeur de revoir le matériel quand il le souhaite. Le nom de Lucia vient d'ailleurs du latin Lux, qui signifie lumière, et la fête de Lucia est donc conçue comme une célébration de la lumière la nuit la plus sombre de l'année.
La sortie de Dark is Light Is est précédée par le superbe album du quartet Hindsight en février et, trois mois plus tard, par le EP pour êtres humains avec son groupe SXNE. Une telle accélération de l'activité porte clairement ses fruits sur la dernière sortie, qu’on a l'impression qu'un groupe entre en studio immédiatement après la fin d'une tournée, alors que le rythme est au plus serré.
Par rapport à la rétrospective politiquement chargée, Dark is Light Is est moins agressif, ce qui ne veut pas dire que les concerts sont moins dynamiques. L'attachement de Nilsson à son pays natal et à ses traditions est évident lorsque le quatuor donne de la voix aux mélodies folkloriques résonnantes des chansons, ce qui est très clair lorsque le morceau d'ouverture, "När Juldagsmorgon Glimmar" ("quand le matin de Noël scintille"), facilite l'entrée de l'auditeur dans l'album grâce à des mélodies brillantes et à une ambiance générale resplendissante. McLaughlin durcit rapidement la mélodie avec un solo entraînant, son intensité étant renforcée par un Rahm particulièrement bruyant et un Minier percutant. Les choses se décompressent légèrement lorsque Nilsson entame son solo avant qu'elle ne monte elle aussi en puissance, le groupe se mettant en parallèle. On quitte le spectacle en ayant moins conscience des origines folkloriques de la mélodie et plus de la fluidité avec laquelle le quatuor avance dans les changements.
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"Sankta Lucia" qui alterne flûte et guitare sur un thème dansant, semble être utilisé comme une procession lente et gracieuse lors des fêtes de Lucia. Dans les mains de Nilsson, le matériel habite un espace jubilatoire informé à la fois par le folk, le prog et le jazz. La "Julpolska", que Nilsson saupoudre habilement d'un rythme argentin et de quelques idées harmoniques inspirées de Messiaen, est également enracinée dans la danse. Avec des paroles sur la fugacité de la vie, il n'est guère surprenant que l'ambiance de "Hej Tomtegubbar Slå I Glasen" soit sombre ; le tempo lent permet cependant au quartet de présenter son côté solennel, tout en montrant sa manière sensible de traiter une complainte. När Det Lider Mot Jul", une chanson de Noël suédoise populaire qui traite de la lumière revenant de l'obscurité, est également interprétée avec douceur. Avec Rahm brandissant des pinceaux, l'interprétation fait appel aux ruminations sensibles du flûtiste et du guitariste.
Bien que "Så Mörk Är Natten" ("Comme la nuit est sombre") souligne à quel point l'obscurité hivernale peut être oppressante, elle fait également allusion au retour imminent du printemps avec tout l'espoir que cela implique. Il n'est pas nécessaire d'être un génie pour établir un lien entre de tels détails et l'année terrible que nous avons laissée derrière nous. Le projet est également rafraîchissant à d'autres égards. Les quatuors de saxophones sont nombreux, ceux de flûtes le sont beaucoup moins, peut-être parce que, selon certains, l'instrument ne projette pas avec autant de force. Mais cette croyance s'est évanouie lorsque sa flûte résonne avec autant de force que la guitare de McLaughlin. L'un des principaux plaisirs que procure l'enregistrement est certainement lié au jeu du quatuor. En tant qu'unité, ils passent en douceur de la tendresse à la raucité selon les exigences de la musique, et comme les deux premières lignes, Nilsson et McLaughlin, se montrent une combinaison toujours convaincante.
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Alors, comem voyager tient de plus en plus de l’improbable avec les mécréants qui décident de nos déplacements de manière … qu’on dira aléatoire, mais pas au ski… reste necore la musdique d’ailleurs pour y croire, y sentir le frisson de l’étrange et du peu commun qui va le devenir bientôt. Recommandé.
Jean-Pierre Simard le 26/01/2021
Elsa Nilsson - Dark is Light Is - Bumblebee Collective