L'AUTRE QUOTIDIEN

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La matrice auto-créative d'Hernease Davis

Avec ses expériences tactiles en photographie analogique, en textile et performance - en direct de Brooklyn -, Hernease Davis use du processus créatif comme d’un outil de résilience.

From the series "...new love". Installation view, The Clemente Soto Vélez Cultural Center | NY, NY © Hernease Davis

Les photogrammes d'autoportraits en grandeur nature de A Womb of My Own (Des erreurs ont été commises lors du développement), incarnent sa renaissance symbolique après des années de traumatisme. "J'ai commencé à faire ces photogrammes en raison d'un besoin réel", explique l'artiste. "J'ai eu cette impulsion de ramper dans mon appareil photo. Je pense que je voulais vraiment recommencer ma vie et construire ma pratique autour de la nécessité de me donner les soins dont j'ai besoin".
En réponse à ce besoin, elle a transformé son salon en un espace de guérison et d'exploration, afin de créer des autoportraits uniques en leur genre : grandeur nature, en les posant sur des feuilles de papier photographique, disposées en grille dans le noir, puis en déclenchant un flash aérien. La zone couverte par le corps de l'artiste ne reçoit aucune exposition à la lumière et apparaît blanche, tandis que les zones entièrement exposées autour de son corps sont noires, créant une étonnante silhouette inversée de sa forme qui témoigne de son expérience en force de sa propre vulnérabilité.

Ces photogrammes ont servi de point de départ à son projet multidisciplinaireA Womb of My Own (Mistakes Were Made in Development) qui comprend installation sonore, oreillers et couvertures crochetés et performance. Davis explique : "Faire ce travail m'a changé. Comme j'ai changé, l'œuvre a changé. J'ai commencé à travailler de manière plus libre et plus intuitive. J'ai cessé de travailler selon une grille, j'ai commencé à appliquer le révélateur à la main et j'ai commencé à intégrer le crochet et les rituels d'autogestion du chant que j'utilise quotidiennement pour rester saine d'esprit. J'ai fait en sorte de ne créer que ce que je ressentais, quand j'avais besoin de le créer pour moi-même".

Performance : Chant d'ancrage, conférence à l'atelier d'études visuelles. Comme pièce de performance, j'ai complété une couverture de la largeur de Anchor Song et j'ai ensuite chanté cette chanson en m'allongeant sur la couverture terminée. Ensuite, cette nouvelle couverture a été ajoutée à l'installation de la couverture Anchor Song à l'intérieur de la galerie. Photos par Sadie Pak. Hernease Davis

"Bare With Me, Foundation, 5", 2018. Photogramme de fibre de gélatine argentée, Fil de soie traité à la lumière liquide, 16" x 20" © Hernease Davis

Travailler pendant la pandémie sur le "#7" dans ma cuisine, mars 2020 © Hernease Davis

Chacune de ces œuvres (toutes) reliées entre elles est une méditation sur la présence qui exploite la création artistique comme moyen de traiter les sentiments. Souvent, différents médiums se chevauchent et s'enrichissent mutuellement, chaque étape alimentant la suivante. Par exemple, Davis crochète en chantant, réalisant la couture initiale qui définit chaque pièce, que les crocheteurs appellent la chaîne de fondation, la longueur d'une seule chanson. Plus tard, elle utilise ses morceaux crochetés dans la chambre noire pour créer des motifs en forme de toile à l'intérieur de ses photo-grammes. Elle installe également ses pièces crochetées comme des œuvres autonomes, parfois en les suspendant au plafond, parfois en les plaçant sur le sol de la galerie et en jouant la musique qui les a inspirées.

"#2", in progress. Cyanotype, canvas, felted wool, 30" x 48" © Hernease Davis

En élargissant sans cesse son approche de la photographie, Davis a franchi sa dernière étape en tant qu'artiste en résidence à la Fondation Elizabeth. Là, elle a commencé à expérimenter le cyanotype, un procédé d'impression photographique historique qui produit des tirages bleu persan à la lumière du soleil. Travaillant dans des parcs de Brooklyn, tels que Prospect Park, Brooklyn Bridge Park et le pocket park près de son appartement, elle a complété ce procédé pour créer des photogrammes abstraits sur tissu en développant et en feutrant de manière sélective des morceaux de toile, de soie et de lin enduits de cyanotype, laissant les parties non développées de chaque tissu se modifier et réagir continuellement à l'environnement.

"Charleston", 2015. Silver gelatin photograms (9), 48" x 60" © Hernease Davis

Tout en combinant ces techniques d'impression et de fabrication de tissus en un hybride qui complique la notion de photographie, elle détourne le médium pour répondre à ses besoins en constante évolution. Davis explique : "Depuis que j'ai fait de ma pratique un moyen de gérer mes sentiments, mon travail est devenu une sorte de journal, documentant ma guérison. Ces cyanotypes sont comme une nouvelle entrée dans ce journal. Les fabriquer, c'est moins réagir au stress que prendre du plaisir à faire de l'art.”

vis"#14", 2019. Silver gelatin photograms (6), 32" x 40" © Hernease Davis

Hernease Davis a obtenu son M.F.A au Centre international de photographie du Bard College. Son travail actuel utilise des photo-grammes, des cyanotypes, des performances et de l'artisanat pour mettre l'accent sur l'autosoin par le biais du processus artistique. L'exposition de sa série, A Womb of My Own (Mistakes Were Made in Development) a été inaugurée à l'Atelier d'études visuelles de Rochester, NY, en mai 2018.

A Womb of my Own, installation d’Hernease Davis le 7/09/2020
Texte de Liz Sales, adaptation de JP Simard