User de l’hyperbole pour parler du travail de sculpture de Kathleen Ryan, c’est le moins qu’on puisse faire, puisqu’elle arbitre à sa manière le faux-semblant d’une chose morte pour lui insuffler valeur et vie là où on sentirait d’entrée plutôt répulsion… Kitsch, une fois !

Dans un romande Boris Vian, les hommes les mieux payés du lieu sont ceux qui, plongeant dans les égouts, ramassent les merdes avec les dents. Pour cela, ils sont très chèrement payés - mais ne peuvent en aucun cas se servir de ce qu’ils touchent comme salaire. Alors, parabole du monde à venir (écrit dans les années 50) ou prescience de notre actualité spectaculaire ou tout ce qui est montré est censé nous distraire de la vraie vie dont nous somme dépossédés par des dirigeants minables … 

Kathleen Ryan est une artiste new-yorkaise qui réalise des sculptures de fruits moisis en pierres précieuses. Le fruit est conçu à partir d’une base polystyrène sur laquelle elle place opale, quartz fumé, malachite et autres pour donner l’illusion de la moisissure.

Le choc visuel créé est énorme et oblige à faire sans cesse l’aller-retour entre figuration et expression des sujets abordés : du dégoût premier à l’admiration finale, en passant par un entre-deux qui ne se prononce pas … . Ses citrons, poires et oranges pourris deviennent hypnotiques dès que l’on pense au tour de passe-passe réalisé. C’est comme un attracteur étrange : prouvant, une fois !

Plus sur son Instagram et le site de sa galerie

Jean-Pierre Simard le 22/04/2020
Les très précieuses pourritures de Kathleen Ryan