L'AUTRE QUOTIDIEN

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John Lennon, "Gimme Some Truth", une vue de l'esprit ?

Après avoir produit “Walking on Thin Ice”, le 8/12/1981, John et Yoko sont rentrés au Dakota, et malheureusement Mark Chapman (l’homme qu’on adore détester) lui colla des balles dans le buffet. Pour célébrer les 80 ans de John, Yoko et Sean ont décidé de reprendre intégralement une série de titres qui se présentent aujourd’hui sous la forme de ce “Gimme Some Truth”. Soient 36 raisons de l’aimer encore plus (ou moins).

I am he as you are me and you are he and we are all together / I’m the Walrus

Parlons pop music, parlons rock, parlons de John Lennon… Quand quatre prolos de Liverpool décident de changer leur vie en 1959 en faisant de la musique, ils ne savent pas qu’ils vont changer la musique et le monde, exprimer plusieurs révolutions et servir de balise à plusieurs générations. La grande gueule du groupe, c’était lui (le fondateur des Silver Beatles), le premier mec à sortir un livre foutraque conçu comme un collage de ses influences en un mix de dessins, de littérature classique anglaise, de nursery rhymes et de son écoute assidue du Goon Show à la BBC ( Spike MilliganPeter Sellers et Harry Secombe) ce sera In His Own Write et il en vendra 800 000 exemplaires… Bien avant le Tarentula de Dylan tout aussi barré.

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Esprit super affûté, d’une intelligence rare, le porte-parole et principal compositeur des Beatles fera du groupe un succès fédérateur et planétaire en mêlant judicieusement expérience musicale continuelle de changement en rapport avec l’expérience vécue des membres du groupe en résonance avec l’évolution des mœurs et des idées de l’époque. Qu’auraient été les 60’s sans eux ? Inimaginable - à pousser le son et les textes ( et la prod hein… ) un cran au dessus à chaque sortie et filer des idées à tous les groupes importants qui s’alignaient à chaque fois sur leurs découvertes pour sonner dans le ton de l’époque et partir de là pour trouver leur son. La fin du groupe annoncée (au grand regret de Lennon) par Paul McCartney va voir un John qui a découvert le bonheur et la femme de sa vie en Yoko et en 67 - partir soigner ses névroses à New York et changer de vie et de carrière.

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Le personnage, millionnaire plein de contradictions va tenter de vivre enfin, de se construire en dehors de l’univers qu’il fréquente et lui a bouffé sa jeunesses en excès divers. Apôtre de la paix et ultra-violent de ses manques affectifs, il va militer et se battre avec l’immigration américaine pour pouvoir devenir résident - et gagner. il est très intéressant de lire sa correspondance, que j’ai traduite avec Eric Francoiseau chez Lattès - faites-nous gagner 20 ct d’€; merci! - qui offre un autre son de cloche que l’orchestration médiatique développée autour de lui dès le début. Les années 70 le voient, façon Brecht et les Affaires de Monsieur Jules César, gérer le quotidien, la notoriété, le présent, élever Sean et faire la paix avec lui-même pour redécouvrir sa passion pour la musique -avant de se faire descendre et enterrer une dernière fois les 60’s par un mec qui ne sortira jamais de prison.

Mais fi de tout cela, l’aujourd’hui de ce Gimme Some Truth, The Ultimate Mixes, c’est deux choses ; la première, retrouver l’immédiateté de cette voix qui vous choppe l’oreille pour ne plus la quitter. A vous raconter des histoires, d’apparemment simples histoires qui racontent un temps d’aventure, de proximité et de changement ; ce genre de petit truc anodin (de génie), un petit moment parfaitement construit pour produire son effet (ne le prenez pas pour un con, il ne l’a jamais mérité) à la façon dont il a captivé le monde entier - dans sa catégorie esprit ouvert de 7 a 177 ans… en y mettant de l’actualité, de la conviction, de la passion, en vous faisant acteur de ce qui se passe par la charisme de l’objet produit et qui vous concerne ainsi directement. Quand Lennon parle, on l’écoute… S’agissait-il de changer le monde ? Il en a apporté la possibilité en la faisant partager à la planète entière. Et les punks qui descendaient l’effet Beatles, en disant leur ras-le-bol de n’entendre qu’eux sur les ondes, ne se sont jamais privés de les reprendre pour les réactualiser en pleine période Thatcher.

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Il est étrange ce 80 ème anniversaire qui voit le monde 20/20 passé à droite toute, avec des leaders politiques qui refilent de l’actualité à Gimme Some Truth par leur pratique des promesses non tenues et leur côté Tartuffe appliqué par des éléments de langage aussi interchangeables que ceux qui les profèrent. C’est exténuant à la fin, non ? Côté cuisine, c’est le second point à développer, produites et choisies par Yoko et Sean Ono Lennon, ces trente-six chansons ont été complètement remixées à partir de zéro, améliorant radicalement leur qualité sonore et les présentant comme une expérience nouvelle - j’avoue j’ai… oui. Le mixage a été réalisé par l'ingé-son Paul Hicks, qui avait dirigé ceux d’Imagine - The Ultimate de 2018, avec l'aide de l'ingénieur Sam Gannon, les chansons ont été entièrement remixées à partir de zéro, utilisant de nouveaux transferts des multi-pistes originaux, nettoyés pour obtenir une qualité sonore optimale. Et c’est une nouvelle clarté qui en surgit, avec une voix moins planquée derrière les effets. Rien à dire sur la puissance des titres qu’on a tous déjà entendus, mais pas comme cela, l’actualisation fait du bien en homogénéisant la prod. Et ce grand enfilage de saucisses témoigne d’une chose : à un moment donné, il y avait bien la possibilité d’une île, on en a même la description névrotique et géniale, parfaitement calibrée pour faire sens et effet, celle d’un monde qui aime, pratique et vit le changement dans tous ses états - sans jamais imposer une seule version de sa puissance politique incapable d’évoluer : de Macron à Trump, en passant par Johnson, Kim Kong, Erdogan ou Poutine.

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Comme cela n’a pas disparu et n’est pas destiné à … ça s’appelle la culture vivante. Et John Lennon en est un parfait exemple qui vous a cerné derrière ses lunettes de myope en vous disant d’aller vous faire mettre. Je plusoie, ne vous en déplaise tyranaux de village à casquette et autrice de mauvais livre porno passée Ministre du mensonge. De fait, un bel objet - et c’est bientôt Noël… 

Jean-Pierre Simard le 9/10/2020
John Lennon - Gimme Some Truth. The Ultimate Mixes - Capitol-UMe