L'AUTRE QUOTIDIEN

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Formuler l'âme des pierres avec Estelle Lagarde à l'Hôtel de Sauroy

Estelle Lagarde présente à l’Hôtel de Sauroy sa série “De Anima Lapidum”, “De l’âme des pierres” où l’architecture du sacré inspire ses mises en scène dystopiques. Sa série inédite “Au Château” y figure aussi. Pascal Therme l’a rencontré. Entretien…

«De-Anima-Lapidum»-Lux-in-tenebris-©-Estelle-Lagarde-agence-révélateur

L’idée de cette série remonte le jour où j’ai enterré l’homme que j’aimais. C’était en 2004 et je me souviens encre très bien, lorsque je me suis penchée sur le cercueil j’ai ressenti une masse sombre au dessus de moi… C’était tout simplement le plafond de l’Eglise qui était très haut. C’est à ce moment là que j’ai eu envie de faire une série sur les Eglises et les Cathédrales. Finalement je l’ai réalisé que plus tard, entre 2013 et 2016. Le point de départ c’est le notion de mort et de disparition. Trois ans après avoir achevé cette série, j’ai encore du mal à m’en remettre…Estelle Lagarde

Estelle Lagarde - Au château - Les Masques

Dans la série “De Anima Lapidum”, il est question de cheminements pluriels dans toute l’œuvre d’Estelle Lagarde. C’est de la rencontre avec une architecture, de l’appréhension d’une lumière et d’un certain écoulement du temps que naissent les narrations photographiques de l’artiste, échos à ses propres interpellations qui deviennent à leurs tours les nôtres.

Ses mises en scène photographiques questionnent l’apparence de nos existences pour mieux explorer nos vies intérieures. Elles sondent de manière onirique, parfois avec humour ou décalage, les enjeux, petits ou grands, de nos existences. La spécificité de chacun des théâtres de ses prises de vues correspondant à telle ou telle interrogation. Avec «De Anima Lapidum» Estelle Lagarde se livre à la matérialisation d’une intériorité. En plaçant sa chambre photographique dans plusieurs édifices religieux, aux quatre coins de la France, elle met en images une réflexion sur les relations s’établissant entre l’humain et les architectures de ces monuments.

 C’est aussi notre propre mystique qui est ici sondée à travers la mémoire, les souvenirs et l’Histoire qui imprègnent les murs de ces monuments sacrés, témoins et gardiens de secrets, de péchés et d’espérances. De petites églises de campagne en majestueuses cathédrales, et jusqu’au Monastère Royal de Brou, Estelle Lagarde porte un regard singulier et inspiré sur ce que suscitent et déclenchent en nous ces architectures souvent millénaires. En compagnie d’étranges personnages, elle nous offre un voyage entre contemplation, rêve et méditation…

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Cette exposition est l’occasion pour Estelle Lagarde de dévoiler la série inédite « Au Château ». Les personnages rencontrés par la photographe semblent être les prisonniers consentants de ce lieu. A l’écart des turpitudes du monde, ils ont connu une évolution qui ai propre à chacun d’entre eux. L’humain se mâtine de végétal, d’animal, reste figé dans un âge, dans une condition, dans un rôle.

Un sentiment familier nous saisit. Les protagonistes nous sont habituels, issus de l’Histoire, de la littérature, du théâtre… Et pourtant quelque chose d’inédit se passe. Un décalage.

L’enfermement et l’isolement ont à la fois stoppé leur possibilité d’émancipation mais également opéré d’étranges mutations ou comportements. Tout ce petit monde semble régi par des règles qui nous échappent. Ils glissent en silence, en chuchotements, en rires contenus. Prêts à disparaître, à se fondre dans les moulures en bois, dans les pierres, à emprunter des portes dérobées.

«Au Château» est un cabinet de curiosités vivant, autonome. Profitons maintenant de la représentation puis laissons l’éternité aux êtres du château… Jusqu’à leurs prochaines apparitions.

Pascal Therme le 29/05/19

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Estelle Lagarde - De Anima Lapidum - > 8/06/19
Hôtel de Sauroy - 58, rue Charlot 75003 Paris