L'AUTRE QUOTIDIEN

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Les Envisagées d'Olivia Gay à la MEP représentent

Depuis 1997 : employées, détenues, surveillantes de prison, dentellières, moniales, employées de maison, caissières de supermarché sont captées par l'approche pudique et curieuse, respectueuse et captivée d'Olivia Gay.

Articulée autour de la représentation féminine, dans un contexte professionnel, mais parfois plus intime : les dentellières de Calais, les prostituées de Cuba, les détenues de la maison d’arrêt de Caen ou bien encore les religieuses du monastère Saint-Maximin en Provence, l'exposition de la MEP confronte des photographies de séries différentes, dans lesquelles la figure féminine se trouve en marge ou en retrait de la société. 

Au plus loin du photo-journalisme, Olivia Gay poursuit sa quête d’un regard. Regard sur le travail sous toutes ses formes – qu’il soit aliéné ou rédimé – et sur les femmes, dont elle narre la rencontre à chaque fois singulière. Olivia Gay dresse ainsi le portrait subjectivé de femmes qu’elle suit au long cours, sous la forme de cet « envisagement » cher au philosophe Emmanuel Levinas.

Elle s’intéresse aux postures, aux gestes et aux regards des corps qu’elle photographie. L’importance toute particulière de la lumière et de la couleur, l’utilisation de costumes et d’un fond neutre permet de décontextualiser la photographie, donnant une valeur iconique et intemporelle aux clichés. Le modèle pictural irrigue ces portraits subtils, qui témoignent d’une immersion à chaque fois renouvelée dans des mondes spécifiques, et de ce qu’on pourrait nommer une spiritualité du visage.

Pour l’historienne et critique d’art Dominique Baqué, « les femmes d’Olivia Gay ne sont pas encore des révoltées, moins encore des militantes : mais elles persistent à exister, elles défient la cécité d’une société fracturée dans l’écart devenu incommensurable entre ceux que le hasard a dotés de tous les biens et qui, sans cesse, se montrent, s’exposent, s’affichent, et ceux qui n’ont rien, et dont l’on voudrait nous faire croire qu’ils ne sont rien. »

Pour rigoler, on dira que pour la France de La République en Marche (arrière) ces femmes saisies dans leur identité propre sont des fake… et on soutiendra ce travail qui parle d'un ici  sans complaisance à l'égard des oubliées des paillettes de TV8. Ce monde auquel nous appartenons, sans fioritures, mais avec émotion et douceur, vérité et dignité.

Maxime Duchamps le 4/04/18

Olivia Gay - Envisagées -> 20/05/18
M.E.P.  5/7, rue de Fourcy  75004 Paris