Se reconstruire et revivre après l'ablation d'un sein, quand on y a tout perdu au passage, est le sujet de Betty Boob. Concoctée par un duo féminin où l'héroïne refuse de marcher à l'ombre en y  retrouvant au passage l'envie et la  liberté, une leçon de vie et de joie. 

Betty Boob, paru en septembre, s'est déjà vendu à plus de 2000 exemplaires. C'est l'histoire de Betty, atteinte d'une tumeur au sein qui doit lui être enlevée. Elle est alors licenciée pour manque de conformité. Elle a perdu son sein gauche, son job et son mec. Elle ne le sait pas encore, mais c'est le meilleur jour de sa vie. Car une troupe de spectacle burlesque lui permet de se reconstruire en lui offrant l'opportunité de monter sur scène et de transformer le regard sur le cancer. 

Outre le clin d'œil à Betty Boop, Boob étant la traduction anglaise du sein féminin, la scénariste Véronique Cazot avait écrit le diptyque Et toi, quand est-ce que tu t'y mets? avec Madeleine Martin (Fluide Glacial, 2011-2012) et publiera Les petites distances le 11 avril chez Casterman, avec Camille Benyamina au dessin. Julie Rocheleau a été révélée avec le triptyque La colère de Fantômas d'Olivier Bocquet (Dargaud, 2013-2015) dont l'intégrale est sortie en octobre dernier. Voilà une BD  à contre-courant qui a le bon goût de ne pas se cantonner à un simple témoignage. Elle aborde évidemment les vraies questions que l’on se pose dans ce moment délicat de l’acceptation et la reconstruction de son identité, mais pas que.

Dès le départ, tout va très vite et les auteures ne perdent pas de temps à introduire la traumatisante maladie. En réalité, cette jeune femme orpheline mammaire est à l’aube d’une nouvelle vie, sorte d’exutoire survitaminé à l’après-cancer. Le dessin plein de vie à la mise en couleur pétillante se passe à merveille de texte. Si tant est que l’on accroche au ton burlesque de ce récit (quasi) muet, le parcours de cette femme se révèle poignant. Et le traitement ( du sujet/ducancer) y est pour beaucoup, à donner des perspectives à ce qui semble au départ sans issue - et s'avère un vrai parcours de reconnaissance de soi et de renouvellement, passage à autre chose. Pas de doxa ici, des femmes qui parlent de sujets qui fâchent et s'en sortent avec la production d'une réjouissante aventure. Vraie réussite, justement récompensée par ce prix.  

Maxime Duchamps le 22/01/18

Betty Boob de Véronique Cazot et Julie Rocheleau, Casterman