L'AUTRE QUOTIDIEN

View Original

A la M.E.P., l'Eurazéo 2018 pour Gilles Coulon

L’exposition consacrée à Gilles Coulon dans le cadre du Grand Prix Eurazéo, à la Maison Européenne de la Photographie présente huit grands tirages, sur les dix photographies présentées, exposées à la Galerie des Donateurs. Il vient de remporter l'édition 2018. 

Supplément d’âme, une seconde exposition a pris place à la salle Hénault de Cantobre, comptant les oeuvres déjà primées des lauréats des années précédentes: Jean-François Rauzier, Alexandre Parrot, Christophe Dugied, Michel Kirch, Hans Silvester, Muriel Bordier, Marc Krüger. Ce prix doté d’une somme confortable de 10 000 € est une belle récompense et un encouragement à la création.

©Gilles Coulon-prix Eurazeo 2017

Cette seconde exposition donne l’occasion de croiser les regards précédemment récompensés, toujours singuliers dans l’accord et l’interprétation des thèmes déjà traités: « Paysages de demain », « L’équilibre », « Lumières et perspectives », « Traits d’union », « L’instant décisif », « L’Éveil du regard », « Nouveaux horizons ». Plus, Outre les œuvres des lauréats du Grand Prix, l’accrochage présente une sélection de la collection photographique d’Eurazeo, une soixantaine d’œuvres, dont celles de Floriane de Lassée, Michael Kenna, Georges Rousse, présentes au premier étage.

Gilles Coulon ayant répondu au thème, apparemment trop corporate de cette sélection, “ré-enchanter l’entreprise”,  s’est intéressé aux lieux désertés, aux bâtisses devenues froides, des “châteaux pinardiers” du Languedoc, sa région d’origine, et au projet de les réhabiliter, tant pour  la viticulture que pour le tourisme afin qu’ils redeviennent de beaux et puissants chais, des maisons d’Hôtes, rayonnantes et accortes, dans la tradition architecturale locale. Tout autant qu’aux bâtiments, c’est aux hommes que Gilles Coulon a pensé et à l’excellence , à l’alchimie de leurs relations avec la Terre, le Soleil et la Pluie. Entre la terre, la vigne et le ciel se tient la main de l’homme, il écrit dans un texte d’intention sur la finalité de ses images : " c’est une reconnaissance du travail acharné de vignerons amoureux, de poètes, d’alchimistes, de chercheurs, de jeunes insensés et de vieux entêtés pour que ses vins se portent vers l’excellence, et que le Languedoc viticole soit aujourd’hui ré-enchanté…."

Les photos exposées ont été réalisées en 2015 et 2016 et présentent la première étape de ce processus. L’importance est donnée à la lumière hivernale qui entre par les fenêtres. Son traitement par la photographie sonne l’heure d’ un retour à la pureté originelle des renaissances, quand tout va naître de la nuit. Gilles Coulon  reçoit le chant distinct du monde, il ne faut pas s’excuser de l’élan poétique et quasi mystique, plus que religieux, de cet adoubement. L’enchantement du photographe concourt à l’avènement de cette renaissance, en trace les temporalités, en retient les étapes. Autrement dit, dans un paradigme plus littéraire, un événement se produit…c’est une photographie faite d’ombres, de lumières et de matières, de pierres ancestrales, de bois et de de temps.

Gilles s’approche de son sujet par la pure expérience de son être là, de sa sensibilité à la préhension, au ressenti des lieux. Il documente certes, mais il fait également le portrait de sa nature profonde. Il est là, sur le chantier dans l’instant présent.  Le prisme du jour décompose les formes, lettre aperçue d’un alphabet de lignes et de matières sues par avance. Tonalités de cathédrale sur des verres cassés, les images naissent du silence comme d’une onde, la couleur dispense la lumière, principe graphique, le photographe est ici le graphe de l’espace re-dessiné selon ses ombres et ses contrastes, cet espace intérieur augural qui scande, recherche les traces du visible venues se joindre à son oeil. Quand on pousse la porte…..Poésie du sensible, le chant de l’oeil intérieur se fait…. Poétique de la joie sèche en sa résilience, Gilles Coulon livre une poétique célébrant le chant du monde et des hommes qui l’accomplissent. On ne pourrait s’étonner qu’alors, certaines corporations s’écrient « Gloire au travail. » et dansent autour d’un feu cerclé de joies authentiques et gaies, à la faveur de ces vins du Languedoc, à la profondeur du chant des cigales noires et des Jais.

©Gilles Coulon-prix Eurazeo 2017

Pascal Therme le 18/01/18

Gilles Coulon à la MEP -> 25/02/18
MEP,  5/7 Rue de Fourcy, 75004 Paris

Plus sur son travail ici et là 

Pascal Therme: Photographe professionnel de reportages, vit et travaille à Paris.