L'AUTRE QUOTIDIEN

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Israël, en cherchant la frontière

L'Israélien Roei Greenberg a arpenté son pays pour y mettre en œuvre une exploration poétique des frontières. La psychogéographie à l'œuvre, entre géographie et histoire... 

Route coupée, Route 90, 2016. © Roei Greenberg

Tour de guet à Pharan, 2016. Une des nombreuses traces du conflit (passé, présent et àvenir?) qui jalonnent cette route. © Roei Greenberg

La faille Syrio-africaine est le nom populaire de la partie de la vallée du Rift qui traverse Israël du Nord au Sud. En suivant son parcours, elle taille la route au travers les hauteurs du Golan, la vallée de la Hula, la mer de Galilée, la vallée du Jourdain, la mer Morte, la vallée de l'Arava et la mer Rouge. Et ce phénomène géologique joue un rôle important dans la façon dont les frontières ont été tracées. Cette faille définit aussi bien les frontières entre Liban et Syrie au nord qu'entre Jordanie et Egypte au sud.

Parc aquatique au nord de la mer Morte, 2016. © Roei Greenberg

Tank syrien abandonné, souvenir de la guerre du Kippour de 1973 à Banias, 2016. © Roei Greenberg

Mon parcours est une exploration poétique des frontières topographiques de ce phénomène géographique. Il s'attache à marquer une autre division inscrite dans le paysage : des champs de mines du Golan vers la frontière libanaise, en croisant les paysage pelés et les murs peints d'un hôtel abandonné à Tibériade via le silence empli de tonnerre de la frontière jordanienne. Comme on le retrouve dans la salle à manger commune d'un kibboutz vide, lieu abandonné sur les rives sèches de la mer Morte entouré de paysages désertiques.

Landscape (painting), Dining Hall, Kibbutz Yiftach, 2015. © Roei Greenberg

Tentes à Dragot, 2016. Témoin à la fois de l'histoire et des ses conflits, comme de la magie du soleil levant sur le désert. © Roei Greenberg

Ici, voyage physique et métaphorique se mêlent pour fonder le projet à montrer cet enchevêtrement. Mon attitude par rapport au lieu n'est limitée ni au lieu ni à l'appartenance, mais s'attarde à une perspective plus complexe, aussi critique que sarcastique d'un côté, quand elle se trouve tout aussi empathique de l'autre. La dualité émotionnelle qui en résulte sert de fil conducteur à tous ces clichés pour les assembler en une mosaïque qui questionne directement l'ici et maintenant, comme ma position de documentariste. Avec un constat final: je m'y sens plus poète que photographe. 

Oasis, Kalya, 2016. hôtel abandonné avec l'évaporation de la mer Morte © Roei Greenberg

Route coupée à la frontière israélo-égyptienne. Red Mountains 2012© Roei Greenberg

Cette approche formelle de la photographie - envisagée comme peinture - avec des formats très larges et des clichés extrêmement détaillés créant un dialogue entre sublime et quotidien.

Photographies et texte de Roei Greenberg, adapté par Jean-Pierre Simard le 4/09/17

Le projet Along the Break est la matrice d'un livre à sortir, résultat de cinq ans de travail à arpenter son pays en suivant cette même idée de la faille.

Peinture murale, Hotel Genosar Tiberiade, 2016. Une peinture naïve des débuts du sionisme qui représentait l'espace comme vacant. © Roei Greenberg

Théâtre Dir Hajla, Jericho, 2016. © Roei Greenberg

Champs de mines sur les hauteurs du Golan. 2013. Les triangles rouges indiquent des zones non déminées et m'inspirent la vision d'une autre forme de végétation. J'en ai croisé deux, histoire de former une étoile de David, témoin d'un autre temps de l'histoire juive.© Roei Greenberg