L'AUTRE QUOTIDIEN

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Marvin Pontiac renaît soudain - tout est à renégocier

Mais qui est donc Marvin Pontiac pour passer pour une légende avec pour unique album, jusqu'à présent, un greatest hits sorti en 1999 sur le label Strange and beautiful ? Les seules photos qu’on connait de lui ont été prises à l’hôpital Esmeralda State Mental Institution par un autre patient nommé Nephets Notrot six mois avant sa mort, suite à un accident dans un bus en 1977.

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Né en 1932 à New York, d’un père Malien et d’une mère Juive, Marvin Pontiac a grandi entre Bamako et Detroit. Il quitta le Mali à 15 ans pour arriver à Chicago où il fût accusé par Little Walter de copier sa façon de jouer de l’harmonica. Cette accusation a mené à un pugilat à l’extérieur d’un petit club sur Maxwell Street. La perte du combat contre Little Walter beaucoup plus petit que lui, était si humiliante pour le jeune Marvin qu’il quitta Chicago et se déplaça vers Lubbock, au Texas où il devint l’assistant d’un plombier. Dans les années 50, une rumeur mal fondée disait que Marvin pouvait avoir été impliqué dans un cambriolage de banque. On le retrouve en 1952, où il enregistre un premier titre « I’m A Doggy » pour Acorn Records. Dans les années qui suivirent il continua d’enregistrer, mais en 1970 il devint soupçonneux vis-à-vis de l’industrie du disque et c’est à partir de cette époque qu’il sombra peu à peu dans la folie.

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L’histoire pourrait continuer longtemps et d'ailleurs… Sauf que tout ce qui précède n'est qu'une pure et géniale invention de John Lurie. Le Lounge Lizard en chef ayant soudain décidé de lâchez ses anches pour tenir le micro.  On le connaît ici pour ses apparitions et compositions musicales dans Down By Law et Stranger than Paradise de Jim Jarmusch, moins pour ses docu télés, totalement à l'ouest  Fishing with John où il part délirer et parler de n'importe quoi avec un invité (ici, Dennis Hopper) et carrément pas non plus, comme peintre depuis  2005.

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De qui peut bien être la pochette, à votre avis? Mais puisque la légende perdure avec cet envoi, sobrement intitulé Asylum Tapes et sorti, tiens donc, sur le propre label de Lurie, Strange & Beautiful, on voyage tranquille d'une aile à l'autre de cette maison de fondus,  en essayant d'en repérer les angles morts, les vicissitudes et les beautés (étranges et pénétrantes). Cela se décline de la possession d'un nain de jardin aux chevaux qui se ramassent dans un puits, en passant par l'amour des porcelets, le fait d'être cinglé ou pas ( la dominante de l'album en au moins cinq titres) et l'amour des fringues pour le moins étranges et les monstres japonais… 

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Temple of Banjos Marvin Pontiac

Autant dire que l'habillage musical qui hésite constamment entre blues roots (banjo, guitare sèche, voix et harmonica) et arrangements barrés Residents désarçonne au  premier abord, mais l'effet est durable et le subterfuge de bon aloi. Comme il le dit lui-même, si vous n'aimez pas ça (comment ne pas…) n'en dégoûtez pas les autres car, après tout, il peut même vous inviter dans sa cellule pour mieux vous faire comprendre la substance de son histoire.

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Don't Fuck with Me Marvin Pontiac

Au finish, on obtient un canular bivalve: d'un côté un disque de blues qui sinue de mal en pis, suivant l'adage et, de l'autre, un pastiche rigoureux, rigolard au second degré qui, mine de rien aligne dans son viseur, tous ceux qui dans l'Alt-country font comme si rien n'était advenu depuis le blues du  Delta… A ce niveau, ce n'est plus Tic et Tac, c'est carrément Emaux et Camés. On adore positivement. Boom, tchica boom boom…

Jean-Pierre Simard le 13/12/17

Marvin Pontiac, Asylum Tapes, Strange  & Beautiful