Goodbye to Language : Godard rencontre Eno chez Daniel Lanois
L'Adieu au Langage de Daniel Lanois et Rocco DeLucca ramène le producteur canadien sur le devant de la scène avec un album qui a plus à voir avec les productions du label Obscure d'Eno, dans les paramètres utilisés par Roger Eno, Harold Budd et consorts. Et c'est carrément bien !
Goodbye to Language est un retour aux sources années 80, avec ses longs déplacements sonores au fil de plages expérimentales, à la différence près qu'ici ils sont créés avec des guitares lap steel (Dobro ou autre modèle joué à plat), tout en évitant les registres de chanson roots habituels au producteur, comme l'indique clairement le titre : ici pas de chanson, mais des mélopées instrumentales qui diffusent plus clairement qu'avec des mots, les sentiments exprimés.
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Si l'idée d'une guitare lap steel évoque d'emblée quelque chose d'assez simple; il se passe au contraire ici beaucoup de choses. Pas question d'évoquer la moindre musique de fond, on navigue en plein flotà coup de filtreset d'effets de toutes sortes As simple qui donnent le son d'unesorte d'Americana assez hallucinée. Le son de l'album ramène en mémoire les efforts de BJ Cole ou ceux de(Evil) Graham Lee jouant sur le Chill Out de KLF, pour un même résultat de trip spirituel, mais carrément fragmenté dans l'abstrait.
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On trouve même des moments où les guitares sont shuntées, jouent des clusters ou changent de timbre, comme si elles étaient partie prenante d'un mix de musique concrète. Tout semble disjoint et vague, mais cela n'empêche jamais (ou presque) le son de couler tranquille. Un seul titre, le plus noir, a été enregistré par Lanois seul, (“Deconstruction”) , titre avec des riffs étranges qui surgissent dans des vagues de distorsion abrasives, à la manière de Fennesz ou de Tim Hecker.
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Le projet de Godard avec son film éponyme était de montrer les relations entre homme, femme et chien : s'aimer, s'engueuler, se retrouver. De l'espèce humaine on passe à la métaphore. Cela finira par des aboiements. Et des cris de bébé." Goodbye to Language est un album prenant, et puissant, le meilleur de Lanois depuis une dizaine d'années.
Jean-Pierre Simard, publié le 27 février 2017
Goodbye to Language Daniel Lanois / RoccoDeLucca - Anti- Records